Climat, biodiversité, pollution... Dans quel état environnemental est la France ?
PANORAMA•Le ministère de la Transition énergétique a publié jeudi un panorama de l’état environnemental en France. Un pavé de mauvaises nouvelles ? Pas totalementFabrice Pouliquen
L'essentiel
- Gaz à effet de serre, qualité de l'air, biodiversité, qualité des rivières et des mers… Le ministère de la Transition écologique a publié jeudi un panorama de l’état de l’environnement en France.
- Au fil des 200 pages, il y a des bonnes nouvelles. Les émissions de gaz à effet de serre ont par exemple diminué de 18 % en France, entre 1990 et 2018.
- Il n’empêche, en parallèle, d’autres indicateurs de l‘état de l’environnement en France se dégradent. Et pour d’autres encore, les efforts restent largement insuffisants
Qualité de l’air, acidifications des océans, changement d’utilisation des sols, érosion de la biodiversité, changement climatique… Quel est l’état environnemental de la France ? C’est à cette vaste question que répond le panorama publié jeudi par le ministère de la Transition écologique et sobrement intitulée « L’environnement en France ».
Depuis 1994, ce travail est réalisé tous les quatre ans par le service statistique du ministère de la transition écologique. « C’est un engagement pris par l’Etat, en signant la convention d'Aahrus, de rendre accessible et disponible l’information environnementale », rappelle Elisabeth Borne, ministre de la transition écologique.
Des émissions de gaz à effet de serre en baisse depuis 1990
Cette évaluation, la septième depuis 1994, s’étale sur près de 200 pages. Un pavé de mauvaises nouvelles ? Pas tout à fait. Certains indicateurs sont au vert. A commencer par les quantités de gaz à effet de serre émises en France. Même si elles sont reparties à la hausse depuis 2017, il n’en reste pas moins qu’elles ont diminué de 18 % entre 1990 et 2017, rappelle le rapport. « La seule exception est le transport, secteur pour lequel les émissions ont bondi de 10 % depuis 1990 », détaille Christelle Larrieu, chargée de mission « synthèses environnementales » au ministère de la Transition écologique.
Même tendance pour les émissions de polluants dans l’air extérieur : elles ont globalement baissé sur la période 2000-2017. Christelle Larrieu prend l’exemple du dioxyde de souffre (SO2) « dont les rejets ont diminué de 77 % sur cette période, du fait du développement des énergies renouvelables, aux économies d’énergie, ou encore à l’utilisation de combustibles moins soufrés. » Les émissions d' oxyde d’azote (Nox) ont par ailleurs baissé de 49 %, grâce au renouvellement du parc de véhicules ainsi qu’à l’équipement progressif des véhicules en pots catalytique, et malgré l’intensification du trafic et l’accroissement du parc de véhicules.
De plus en plus d’emplois liés à la protection de l’environnement
Le rapport note également une amélioration de la qualité chimique de nos rivières. « Certes, la situation est contrastée d’un territoire à l’autre, commence Valéry Morard, sous-directeur de l’information environnementale au ministère. Mais, une nouvelle fois, la tendance globale est à la baisse. » La présence des nitrates a ainsi baissé de 12 % en France métropolitaine entre 1998 et 2017. « Ces progrès s’expliquent notamment par une réglementation plus contraignante sur les teneurs en phosphates dans les détergents, par un moindre recours aux engrais phosphorés et par l’amélioration des performances des stations d’épuration », précise le rapport. Pour ce qui est des teneurs en pesticides, même s’ils sont encore nombreux à être détectés dans la plupart des cours d’eau, leur présence globale a diminué de 19 % en métropole et de 21 % en outre-mer entre 2008 et 2017, ce que le rapport explique par l’interdiction de plusieurs herbicides sur cette période.
Un autre chiffre enthousiasmant est le nombre de Français travaillant directement dans les domaines de la protection de l’environnement. « Cela présentait 500.000 emplois en 2017, précise Christelle Larrieu. Après sept années de croissance, ce chiffre s’était stabilisé entre 2011 et 2015 et est reparti à la hausse depuis. Ces “éco-activités” représentent aujourd’hui 1,8 % de l‘emploi total en France. »
Qualité de l’air et émissions de gaz à effet de serre… La France pas au niveau
Voilà quelques bonnes nouvelles. Il y en a d’autres encore au fil des 200 pages de ce rapport. Il n’empêche, en parallèle, de nombreux indicateurs de l‘état de l’environnement en France se dégradent. Et sur d’autres encore, les efforts restent largement insuffisants
Dans un jugement rendu jeudi, la Cour de justice de l’Union européenne a épinglé la France pour avoir dépassé « de manière systématique et persistante » le seuil limite de dioxyde d’azote, un gaz polluant issus des moteurs diesel. Tout un symbole. Sur les émissions de gaz à effet de serre, si elles ont baissé depuis 1990, la France reste loin de la cible fixée par l' Accord de Paris sur le climat qui appelle à limiter le réchauffement à au moins +2°C d’ici 2100.
Artificialisation des sols et empreintes cachées de nos consommations
Autre indicateur dans le rouge : l’artificialisation des sols. Soit la transformation d’un sol à caractère naturel (terres agricoles, forestières ou laissée en friche, etc.) par l’urbanisation ou le développement d’infrastructures. « Son rythme reste élevé en dépit des dispositions mises en place pour la maîtriser, note Valéry Morard. Chaque année, on peut considérer qu’on perd 0,1 % du territoire en France ou l’équivalent d’un département tous les dix ans », précise Christelle Larrieu.
Cette artificialisation des sols est l’un des facteurs qui induit la perte de biodiversité, autre point noir en France. Sur quelque 10.000 espèces évaluées sur le territoire, particulièrement riche en biodiversité grâce à ses Outre-mer, 18 % sont éteintes ou menacées d’extinction.
Enfin, le rapport insiste sur l’empreinte matière des Français, celle que nos modes de consommations engendrent. « Nous n’avons pas conscience du poids réel de nos consommations, constate Valéry Morard. C’est-à-dire de l’ensemble des ressources naturelles qui sont mobilisées pour la production des biens d’équipements que nous achetons. » Le cas des smartphones est parlant. Tout au long de son cycle de vie (extraction de matières premières, fabrication, utilisation, élimination), un téléphone portable pesant 120 grammes va nécessiter 70 kg de matières mobilisant plus de 70 matériaux différents, pointe le rapport.
Un rapport à retrouver sur un site Internet dédié
« En moyenne, chaque Français mobilise près de 13 tonnes de matières par an pour ses besoins en biens et services, souligne Valéry Morard. Soit 873 millions de tonnes par an si on totalise les empreintes des 66 millions de Français. » Une partie de ces matières est extraite sur le territoire national, une autre est mobilisée hors de nos frontières pour produire des biens et services qui seront ensuite importées.
C’est alors l’un des messages clés de ce rapport : l’impact écologique de la France ne peut être examiné dans le seul cadre de nos limites territoriales. Le document est consultable sur un site Internet dédié. « C’est une nouveauté de cette septième évaluation, précise Elisabeth Borne. Le rapport s’accompagne d’une plateforme web où l’ensemble de ces données sur l’état de l’environnement en France sera regroupé et actualisé et enrichi régulièrement. »