Incendie en Amazonie : Les solutions des ONG pour protéger la forêt
CATASTROPHE•La forêt amazonienne est en proie aux flammes, du fait de la déforestation galopante et de ses conséquences sur le climat local. Pourtant il y a des solutions pour protéger le poumon vert de l’humanitéRachel Garrat-Valcarcel
L'essentiel
- La déforestation à un rythme délirant de l’Amazonie, principal « poumon vert de la planète », est la principale cause des incendies qui ravagent actuellement le secteur.
- Les ONG attirent depuis longtemps l’attention sur le problème et ont des solutions.
- Parmi les pistes: abandonner le modèle agricole productiviste, prendre conscience de la pression à la déforestation que l’Occident exerce même en dehors de ses frontières et miser sur le développement local.
Le poumon vert de la planète crache de la fumée. Les incendies qui ravagent en ce moment l’Amazonie inquiètent, à raison. 20 % de l’oxygène du monde est produit grâce à la photosynthèse de cette immense forêt tropicale. L’enjeu est bien international. On sait comment on est en arrivé là : la déforestation est galopante et même endémique depuis l’arrivée de Jair Bolsonaro au pouvoir au Brésil. Le feu est utilisé pour nettoyer les zones déforestées, qui facilitent ensuite la progression de l’incendie.
Que faire ? Les ONG y réfléchissent depuis longtemps. WWF France et Greenpeace France donnent des pistes à 20 Minutes.
Changer de modèle agricole
C’est là la clef. Si on déforeste à tour de bras, c’est pour libérer de l’espace pour l’élevage intensif de bœufs ou de veaux. Et aussi pour libérer des champs de soja qui servent à l’alimentation du bétail précité. « Il faut cesser d’encourager l’agro-industrie, prévient Clara Jamart, responsable de la campagne forets à Greenpeace. Or Jair Bolsonaro leur fait des ponts d’or. » Le productivisme dans l’élevage, voilà l’ennemi pour les ONG. « Le Brésil doit cesser de supprimer les mesures de protection de l’environnement, poursuit Clara Jamart. Jair Bolsonaro a une vraie volonté de défaire ce qui a été fait, alors que ça n’était déjà pas suffisant. Il faut au contraire des mesures volontaristes et contraignantes. »
Cela passe peut-être par un vrai Code forestier. C’est en tout cas ce que pense Pierre Cannet, codirecteur des programmes du WWF France. « C’est un enjeu majeur. La situation est critique à cause de la dérégulation, le message politique est très clair », d’après lui. Un code forestier remettrait un peu de droit dans un secteur où c’est surtout la loi du plus fort et du plus riche qui règne.
Lutter contre « l’importation de la déforestation »
La formule désigne le double discours des pays occidentaux qui importent beaucoup de soja brésilien – cause d’une bonne partie de la déforestation – mais blâment le Brésil pour sa gestion de la forêt. Ainsi, les déclarations d’Emmanuel Macron, qui font des incendies une crise internationale font doucement sourire les ONG : « La France a une belle stratégie pour enrayer sa participation à la déforestation hors de ses frontières, mais elle n’est pas appliquée », explique Clara Jamart.
C’est donc bien « un enjeu pour le G7 », ajoute Pierre Cannet : il faudrait que les pays occidentaux décident d’importer moins de soja brésilien pour leur propre bétail. « Un soja OGM produit grâce à des engrais interdits en Europe et dans des conditions sociales difficiles », précise la représentante de Greenpeace. Pour cela, eh bien il faudrait aussi manger moins viande, car moins de viande, c’est moins d’importations de soja, donc une moins grande pression sur la forêt.
Or, l’accord de libre-échange avec le Mercosur risque d’aggraver la situation : « Il va faciliter l’entrée de produits responsables de la déforestation », dit Clara Jamart. Du soja, donc, mais aussi directement de la viande. Le WWF « salue » d’ailleurs la décision d’Emmanuel Macron de suspendre la ratification de l’accord mais restera « mobilisé ».
Jouer local
« Il faut renforcer les droits des populations indigènes qui sont les premières protectrices de la forêt, leur survie en dépend », explique Clara Jamart, de Greenpeace France. Or, c’est tout l’inverse qui se passe. Les populations indigènes n’étaient pas beaucoup plus protégées avant l’arrivée de Jair Bolsonaro, mais son début de mandat est marqué par une violence particulière contre elles. Le président d’extrême droite les menace directement, avec de réelles conséquences selon les militants sur place et l'ONU : fin juillet, un chef indigène a été tué par les mineurs qui voulaient pouvoir exploiter sans problème le riche sous-sol local.
Pour protéger la forêt, l’aide internationale n’est peut-être pas de refus. La non-exploitation économique de la surface ou des sous-sols est compensée par les financements internationaux, et l’appât du gain industriel à la déforestation est ainsi moins grand. Depuis une dizaine d’années, l’ONU coordonne à cet effet le projet REDD+ (Réduire les émissions de CO2 provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts, en français), qui mesure précisément des programmes de protection de la forêt et de la biodiversité locale. « On apporte une valeur économique supplémentaire », conclut Pierre Cannet.