VIDEO. Méditerranée: «Le plastique menace partout», le constat alarmant d'une campagne inédite de recensement des cétacés
ETAT DES LIEUX•Florence Descroix-Comanducci va révéler ce mercredi à Monaco les résultats d’une expédition d’observation de la faune marinePropos recueillis par Fabien Binacchi
L'essentiel
- L’Accord sur la conservation des cétacés de la mer Noire, de la Méditerranée et de la zone Atlantique adjacente a mené une campagne d’observation à large échelle et inédite des cétacés.
- Les pollutions sonore et plastique, notamment, sont préoccupantes.
- Les résultats de cette expédition doivent aider les gouvernements à prendre des mesures efficaces pour la préservation de la faune marine.
Activité humaine, pollution sonore et surtout plastique... La pression sur la faune marine est forte et la campagne d’observation menée cet été au nom de l’Accord sur la conservation des cétacés de la mer Noire, de la Méditerranée et de la zone Atlantique adjacente (Accobams) en atteste.
Florence Descroix-Comanducci, la secrétaire exécutive de l’organisation intergouvernementale, dévoile les résultats de cette expédition inédite, qui feront l’objet d’une conférence ce mercredi à la Monaco ocean week.
En quoi a consisté cette expédition ?
L’été dernier, de la mi-juin à la mi-août, 100 scientifiques ont été mobilisés en Méditerranée et sur la mer Noire pour une opération d’observation visuelle et acoustique et de comptage des cétacés. Huit avions ont effectué 800 heures de vol [sur 70.000 km] en zigzag pour couvrir tout le périmètre. Six voiliers ont aussi sillonné les deux mers. C’est une grande première. Jamais aucune campagne de recensement n’avait été organisée à cette échelle. L’Accobams l’a menée au nom de ses 24 pays membres et pour un budget non négligeable de quatre millions d’euros, financé également par des bailleurs de fonds et la fondation Prince Albert-II de Monaco.
Qu’avez-vous découvert ?
Que la faune est plus nombreuse dans les aires protégées, comme au sein du sanctuaire Pelagos par exemple. Nous avons pu mesurer la pollution acoustique, très forte du fait du trafic maritime. Sur les routes les plus fréquentées, les cétacés souffrent d’un appauvrissement du langage. Nous avons enregistré une diminution des fréquences de leurs communications. Et puis il y a la pollution plastique, le problème le plus préoccupant.
Certaines zones sont-elles épargnées ?
Malheureusement non. Partout où les avions et les bateaux sont passés, des macrodéchets ont été observés. Le bassin occidental est encore plus touché que le bassin oriental, mais le plastique menace partout. Au total, 75 % des débris rencontrés en sont constitués. Et les deux-tiers sont des emballages, en grande majorité alimentaires. L’impact sur les cétacés, qui ingèrent ces déchets, est indiscutable. Il y a également le problème des bouts de filets, abandonnés, qui continuent à "pêcher" tout seuls. Pendant l’expédition, nous avons retrouvé des animaux, tortues et oiseaux compris, emmêlés, à l’agonie.
A quoi vont servir ces travaux ?
L’année 2020 sera une année charnière pour les gouvernements. Ils se sont fixé des objectifs pour protéger la biodiversité et les résultats de cette initiative doivent permettre la mise en œuvre de mesures efficaces comme la réduction de la vitesse de certains navires ou la création de zones de non-pêche. Cette campagne pose un état zéro, une vision globale de la méga faune à un instant donné. On fournit des éléments tangibles, irréfutables. Après ça, plus aucun état n’aura d’excuse pour ne rien faire. Il est temps d’agir avec détermination si l’on veut arrêter de voir diminuer la biodiversité.