TRANSPORT«Energy Observer», le bateau-laboratoire, s'en va tester les ailes du futur

« Energy-Observer» : Le bateau-laboratoire met le cap au nord propulsé par les ailes d'un genre nouveau

TRANSPORTTester les énergies du futur pour décarboner le transport maritime. C’est la mission de l’ Energy Observer, catamaran high-tech qui repart cette semaine pour un nouveau voyage. Destination le cercle polaire cette fois, aidé d’ailes verticales futuristes
Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

L'essentiel

  • Le bateau-laboratoire Energy Observer, mis à l’eau en janvier 2017 et parrainé par Nicolas Hulot, s’est fixé un tour du monde en six ans sans aucune émission de gaz à effet de serre. En misant sur l’hydrogène, le solaire et l’éolien.
  • Sur ces 20.000 premiers kilomètres effectués le long des côtes atlantiques et en mer Méditerranée, l’équipage de ce catamaran high-tech se dit satisfait sur la partie hydrogène et solaire. Mais beaucoup moins sur la partie éolienne.
  • Pour son troisième voyage, commencé ce mardi et qui l’amènera jusqu’au cercle polaire, l’Energy Observer a troqué ses deux éoliennes et son aile de kite pour des OceanWings, des ailes rigides verticales sur lesquelles l’équipage mise beaucoup.

Dunkerque ce mardi, Anvers ce jeudi, Amsterdam et Hambourg en avril, la Scandinavie ensuite jusqu’à mi-juin, puis Saint-Pétersbourg avant de traverser les lacs de Carélie et le canal de la mer Blanche pour frôler ensuite le cercle polaire…

Vous l’avez compris, l’Energy Observer, parti cette nuit de Saint-Malo, met le cap vers le grand nord, ce qui n’est pas une mince affaire pour ce bateau-laboratoire dont le défi est d’avaler les milles nautiques en autonomie énergétique et sans aucune émission de gaz à effet de serre.

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Depuis l’été 2017, le catamaran high-tech (30,5 m de long pour 12,80 m de large) a déjà réalisé deux expéditions, le long des côtes françaises puis en mer Méditerranée. De quoi déjà parcourir, en seize mois de navigation, 20.000 km, visiter 14 pays et effectuer 33 escales. De quoi surtout tester un panel de technologies que l’équipe d’Energy Observer espère un jour voir adaptées aux cargos de transport maritime et/ou aux navires de croisières afin de réduire leur recours aux énergies fossiles.

Bilan jusque-là décevant sur l’éolien

Pour alimenter les deux moteurs à propulsion électriques du navire mais aussi répondre aux besoins en énergie des huit équipiers à bord (électricité, chauffage, eau chaude sanitaire), l’Energy Observer puise dans trois sources d’énergies renouvelables. Le solaire, avec 130 m² de panneaux photovoltaïques qui tapissent son pont. Le vent via deux éoliennes à axe vertical mais aussi une aile de traction géante, développée par Beyond the Sea et inspirée de celles qu’utilisent les adeptes de kitesurf. L’énergie hydrolienne enfin, l’Energy Observer étant doté d’une chaîne de production d’hydrogène lui permettant de transformer l’eau de mer, préalablement désalinisée, en hydrogène par électrolyse de l’eau, puis en électricité via une pile à combustible.
Sur le solaire et l’hydrolien, l’équipage se dit satisfait. En 2018, la production d’hydrogène à bord a atteint 500 kg qui ont contribué à environ 60 % de l’énergie nécessaire aux navigations [1 kilogramme apportant 1h30 d’autonomie]. L’énergie solaire a apporté les 40 % restants.

En revanche, sur la partie éolienne, c’est la déception. « Les deux éoliennes verticales n’ont pas produit l’énergie escomptée, du moins pas suffisamment au regard de leurs poids sur le bateau et de la perte en aérodynamisme qu’elles engendraient », précise Victorien Erussard, capitaine du navire contacté par 20 Minutes. Quant à l’aile de traction, nous sommes persuadés qu’il s’agit d’une solution d’avenir pour réduire la consommation en fioul lourd dans le transport maritime international, mais sans doute que notre aile n’était pas adaptée à notre navire. »

Comme des ailes d’avion… mais plantées à la verticale

Pour sa troisième expédition, l’Energy Observer se sépare donc de ces deux solutions mais sans pour autant tourner totalement le dos au vent. « Cela reste un gisement d’énergie à exploiter, d’autant plus que nous naviguerons cette fois-ci en Europe du Nord où nous aurons sans doute un taux d’ensoleillement moins important qu’en Méditerranée. » A la place, le bateau-laboratoire testera des ailes rigides de douze mètres d’envergure semblables à celles d’un avion mais dressés à la verticale sur le navire. Baptisée OceanWings, cette technologie a été conçue par le cabinet d’architecture navale parisien VPLP. Le prototype sortira dans les prochains jours des ateliers de la CNIM (Constructions industrielles de la Méditerranée) à La Seyne-sur-Mer pour être installé sur l’Energy Observer lors de son escale à Amsterdam, courant avril.

Victorien Erussard parle de ces OceanWings comme d’une « véritable technologie de rupture ». « Cette solution est inspirée des ailes déjà utilisées sur les bateaux de course de la Coupe de l’America [compétition nautique internationale], explique-t-il. Mais quand la gestion est manuelle en régate, ce qui représente un travail considérable pour les équipages, ces oceanwings sont entièrement automatisées. Elles se règlent parfaitement en fonction de la force et de la direction du vent et, même si elles sont rigides, il reste possible d’en réduire la surface totalement ou partiellement. »

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Produire de l’hydrogène tout en naviguant

Ces ailes devraient permettre d’augmenter la vitesse du navire et de soulager les deux moteurs à propulsions électriques. Jérôme Delafosse, le chef d’expédition d’Energy Observer, parle même d’u coup triple. « On utilise le vent [avec les OceanWings], on soulage notre production et l’énergie solaire qu’on va recevoir, au lieu de la mobiliser pour propulser le bateau, on va l’envoyer dans électrolyseur, la chaîne de production d’hydrogène », précise-t-il à l’AFP.

C’est l’un des gros défis de ce troisième voyage du bateau-laboratoire : « Parvenir à fabriquer de l’hydrogène tout en naviguant, chose qu’on ne pouvait pas faire jusque-là », évoque Victorien Erussard.

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Les OceanWings ne sont pas la seule nouveauté de ce troisième voyage. L’Energy Observer s’est également doté de 25m² de panneaux photovoltaïques supplémentaires et a travaillé sur la récupération de chaleur. « Une pile à combustible [qui permet de transformer l’hydrogène en électricité] génère pour moitié de l’électricité et pour moitié de la chaleur, détaille Victorien Erussard. Nous allons tester un dispositif qui permettra de récupérer cette chaleur, de la stocker et de la valoriser pour chauffer le bateau et produire de l’eau chaude sanitaire. »

Les JO de Tokyo en 2020

Une fois le cercle polaire approché, l’Energy Observer prendra peu à peu la route du retour pour arriver à Londres où s’achèvera cette tournée septentrionale courant octobre. L’équipage prévoit ensuite un mois de travaux à Saint-Malo, son port d’attache avant de remettre les voiles direction… les Jeux olympiques de Tokyo, du 24 juillet au 9 août 2020. « Ce devrait être les JO de l’hydrogène », glisse Victorien Erussard. Une manière de dire que l’Energy Observer se devait d’y être.