Alimentation: Du saumon transgénique canadien peut-il arriver dans nos assiettes avec le CETA?
FAKE OFF•Jordan Bardella, du Rassemblement national, s'est inquiété de voir du « saumon transgénique » arriver dans l'UE après la signature d'un accord de libre-échange. L'importation de ce produit est interdite dans l'UEMathilde Cousin
L'essentiel
- «On peut aujourd’hui consommer du saumon transgénique ». C’est ce qu’a soutenu jeudi Jordan Bardella du Rassemblement national.
- Une allusion à un saumon commercialisé au Canada.
- L’UE a signé un traité de libre-échange avec le Canada, mais l’importation de ce produit n’est pas autorisée actuellement.
Il avait déjà lancé cette affirmation lors d’un meeting dans la Manche. Jeudi matin sur Europe 1, Jordan Bardella, la tête de liste du Rassemblement national aux Européennes, s’est inquiété du risque de voir débarquer un « saumon transgénique » dans les assiettes des Européens.
Interrogée sur l’importation de produits dans l’UE, la tête de liste du Rassemblement national a expliqué qu'« on peut aujourd’hui consommer du saumon transgénique. » « Le saumon transgénique nous vient de ces accords de libre-échange avec le Canada, avec le CETA, a développé le candidat. Vous savez que le système de contrôle étant très restreint au Canada, il est impossible de distinguer un saumon d’origine naturelle d’un saumon transgénique », avant d’ajouter « les contrôles sont très faibles au sein même de l’Union européenne ».
FAKE OFF
De quoi parle-t-on ?
Jordan Bardella évoque le saumon AquaAdvantage, un poisson génétiquement modifié développé par l’entreprise AquaBounty. Cet animal d’élevage, de la variété Atlantique, a la particularité de se développer plus rapidement que les autres saumons : il lui faut 18 mois pour être mis sur le marché, contre trois ans pour un saumon non modifié génétiquement, explique l'entreprise.
Actuellement, les œufs sont cultivés au Canada, avant d’être envoyés pour développement au Panama. Les poissons sont ensuite importés au Canada.
Quel lien avec le CETA ?
Ce traité de libre-échange signé entre l’Union européenne et le Canada et adopté par le Parlement européen il y a deux ans instaure une baisse des droits de douane de 2 à 0 % pour le saumon, un changement peu significatif.
Quelle est la traçabilité de ce produit ?
C’est le problème mis en avant par les associations de défense de l’environnement : « Il n’y a aucune obligation d’étiquetage des produits OGM au Canada », explique à 20 Minutes Samuel Leré, de la fondation pour la nature et l’homme. Un manque également souligné par un rapport d'experts remis au gouvernement en septembre 2017 : « S’agissant notamment des produits OGM ou à base d’OGM (le Canada est le premier pays à commercialiser un saumon transgénique en 2017), il est indispensable que ces produits fassent l’objet d’un étiquetage explicite, y compris pour les produits transformés en application du règlement (CE) n°1829/2003. »
Les experts soulignent que cette absence d’étiquetage « pose la question de la traçabilité de ces produits ». Un risque écarté par la Commission européenne, qui rappelle à 20 Minutes que, si le produit venait à arriver en Europe, « l’étiquetage obligatoire en vigueur dans l’Union européenne s’appliquerait, et ce, quelles que soient les règles d’étiquetage en vigueur hors UE ». Les associations s’inquiètent également du développement de l’entreprise : celle-ci a déposé un projet d’usine au Canada qui lui permettrait de passer sa production à 250 tonnes métriques par an. « On passe à un stade industriel », souligne Samuel Leré. En comparaison, AquaBounty a commercialisé 4,5 tonnes de saumon sur le marché canadien en 2017, tout comme en 2018.
Ce produit peut-il arriver dans nos assiettes ?
En 2015, un représentant d’AquaBounty avait expliqué que son entreprise « n’a aucun plan pour produire ou vendre le saumon AquaAdvantage au Royaume-Uni ou en Europe », soulignant que les « politiques dans l’UE ne sont pas favorables aux produits comme les nôtres ». Toutefois, « si ces politiques devaient changer, nous serions naturellement intéressés pour considérer ces marchés », ajoutait-il. Pour le moment, la marque n’a déposé aucune demande de commercialisation en Europe, précise la Commission européenne, une démarche obligatoire pour les produits contenant des OGM.
Entre 2014 et 2016, l’UE a très peu importé de saumon Atlantique, la variété du saumon transgénique, selon des chiffres de la Commission européenne. Ce sont les autres espèces qui sont importées. Si ce poisson était amené à être commercialisé en Europe, il serait soumis à des contrôles, car ceux-ci « ne dépendent pas des accords commerciaux conclus par l’UE », ajoute la Commission européenne. Ces contrôles sont effectués « au départ », « à la frontière » et « sur le marché », détaille la Commission.
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