Haute-Garonne: Petit paradis pour tortues, le refuge de Bessières enfin ouvert au public
BIODIVERSITE•Bâti par des bénévoles, le refuge pour tortues de Bessières a ouvert ses portes au public le 24 avril. Le site cherche à financer son agrandissement, rendu nécessaire par sa croissance démographiqueNicolas Stival
L'essentiel
- Le refuge pour tortues de Bessières, près de Toulouse, accueille un millier d’animaux, récupérés auprès de particuliers ou des autorités.
- Il est ouvert au public depuis le 24 avril.
- Pour agrandir la zone de quarantaine, qui abrite des pensionnaires de plus en plus nombreux, une campagne de financement participatif a été lancée.
En Haute-Garonne et au-delà, la petite ville de Bessières est connue pour son omelette géante de Pâques. Un peu moins pour le millier de tortues terrestres et aquatiques, soit un quart de la population humaine, qui mène une vie paisible à 30 km au nord-est de Toulouse. Derrière cette colonie à carapace, pas forcément typique du coin, se trouvent Jérôme Maran et ses amis.
Le président de l’Association du refuge des tortues (ART) est un homme heureux : le refuge est ouvert au public depuis le 24 avril. « Dès qu’il fait beau, il y a du monde, les gens sont supercontents », se félicite-t-il. Dimanche, 150 personnes ont visité ce lieu « unique en France », fruit du travail acharné de l’ART, née en 2006 et forte aujourd’hui de 500 adhérents.
Après un long sommeil pour certains pensionnaires, tout le monde est réveillé. Comme Zizou, « la mascotte du refuge », tortue grecque qui doit son nom à sa propension à délivrer des coups de tête dans les pieds des visiteurs. Ou bien Ségolène et François, deux solides tortues alligators.
Une quarantaine d’espèces
« Il y a environ une quarantaine d’espèces différentes, explique Jérôme Maran. Les tortues nous sont données par des particuliers qui ne peuvent plus s’en occuper, ou alors par l’administration comme les douanes, l’ONCFS [Office national de la chasse et de la faune sauvage] ou les services vétérinaires qui font des saisies. Nous ne sommes pas un centre d’élevage, nous ne proposons pas d’animaux à l’adoption. Ici, c’est un sanctuaire. »
D’aussi loin qu’il s’en souvienne, ce Toulousain de 45 ans a vécu avec des tortues, « des animaux symboliques, à la merci des activités humaines, qui supportent la captivité et sont autonomes ».
Une tortue africaine porte son nom
Face à cette passion, l’histoire-géo étudiée à la fac du Mirail (aujourd’hui Jean-Jaurès) n’a pas pesé lourd. Jérôme Maran est donc parti à travers le vaste monde observer les testudines, quand il ne travaillait pas dans un parc (à tortues évidemment) en Corse. Au cours de ses explorations, il a même découvert trois nouvelles espèces en Afrique. L’une d’elles, débusquée en pleine forêt équatoriale gabonaise, porte son nom : la Pelusios Marani.
Jérôme Maran et l’ART ont longtemps bataillé pour trouver un terrain adéquat, sur une ancienne gravière de Bessières, afin de loger une grande famille qui croît chaque année. « On a recueilli 647 animaux en 2018 », détaille le quadragénaire.
La fête de la tortue, chaque mois de juin, attire plus de 3.000 personnes et donne un bol d’air financier à cette association loi 1901. Désormais, une nouvelle étape est donc franchie, avec un accueil du public permanent.
« Tortue du curé » et tortue alligator
« Il s’agit d’un centre d’éducation à l’environnement, toutes les visites sont guidées pendant 45 minutes ou une heure, avec la possibilité pour chacun de refaire la visite seul. » Le public apprend ainsi l’histoire de la « tortue du curé », qui a vécu pendant 45 ans chez un prêtre de la région toulousaine, aujourd’hui décédé. Ou encore celle de la tortue alligator d’une trentaine de kilos, originaire des Etats-Unis mais découverte dans un lac normand par un pêcheur à la carpe.
Jérôme Maran est intarissable sur le refuge, patiemment bâti par les bénévoles de l’association avec des matériaux de récupération. Dans ce petit village où la vitesse n’est pas un souci, rues et ronds-points constituent autant d’hommages aux pionniers de l’herpétologie et aux bienfaiteurs de l’ART. Comme la Fondation Brigitte-Bardot, la SPA ou 30 Millions d’Amis…
« Ce projet est né de la solidarité des gens », répète celui qui consacre sept jours sur sept à sa passion, en « surfant sur ses réserves » financières. Le Haut-Garonnais cite l’exemple de ce « papy » venu porter un cageot de pommes pour nourrir les tortues. Des centres commerciaux du coin fournissent aussi fruits et légumes invendus.
aMais la solidarité locale trouve aujourd’hui ses limites, devant l’afflux de nouvelles pensionnaires. D'où le recours au financement participatif. Le refuge doit s’agrandir, notamment la zone de quarantaine, aire de transit des dernières arrivantes, vermifugées et pucées grâce à un partenariat avec l’école vétérinaire de Toulouse.
En projet : une serre de 80 mètres carrés, afin d’y loger 13 bassins pour tortues aquatiques et quatre enclos pour leurs cousines terrestres. Mais aussi cinq bassins extérieurs, réservés aux tortues alligators, à carapace molle et aux chélydres serpentines. Coût total des travaux : plus de 31.200 euros.
L’ART a besoin d’aide pour couvrir ces frais. Afin de croître et de durer, pourquoi pas, aussi longtemps que certaines de ses protégées.
Prix de la visite : 7 euros pour les adultes, 4 euros pour les enfants de moins de 11 ans. Contact au 06 70 08 71 84.