COP 24: Pour lutter contre le réchauffement climatique, les toits de Paris vont-ils bientôt tous être peints en blanc?
ENVIRONNEMENT•Des toits de Paris ont été recouverts d’une peinture blanche réflective pour diminuer la chaleur des bâtiments et la formation d’îlots de chaleur urbains. La COP 24 va-t-elle inciter la capitale à mettre un grand coup de pinceau ?….Floréal Hernandez
L'essentiel
- L’entreprise Cool Roof a créé une peinture blanche réflective pour les toits qui permet de les rafraîchir et de limiter la chaleur à l’intérieur d’un bâtiment.
- A Paris, une péniche a réussi à faire baisser de 20°C la chaleur de ses pièces en période de canicule après un coup de pinceau sur son toit.
- Pour trouver la formule de sa peinture, l’entreprise bretonne s’est inspirée des techniques méditerranéennes et des navettes spatiales de la NASA.
Les toits de Paris vont-ils passer au blanc ? Passés du noir – bitume ou métal – au vert avec leur végétalisation, une entreprise bretonne propose de les blanchir pour absorber la chaleur solaire et lutter contre la formation d’îlots de chaleur urbains. A New York, depuis 2010, 6 millions m2 de toits ont été peints en blanc. A Paris, quelques toitures ont déjà été passées à la peinture réflective de la société bretonne Cool Roof comme celui de la péniche du centre de jour L'Adamant, quai de la Râpée dans le 12e arrondissement. Et ça a changé leur été 2018.
« Il n’y a pas photo avec avant », avoue la salariée qui nous répond au téléphone. Arnaud Vallet, coordinateur de cet hôpital de jour de psychiatrie adulte, poursuit : « C’est très simple. En période de canicule, on avait mesuré une température de 58°C dans la péniche. Là, on a perdu 20 degrés. 38°C, c’est chaud mais c’est vivable avec une petite clim ou un ventilo. » Ce gain de confort a profité aux patients et aux équipes médicales. « Après les deux mois d’été, elles étaient rincées, souligne le cadre infirmier, et il y avait des arrêts maladie. »
Economie d’énergie et gain de productivité
Initialement, la péniche hôpital avait opté pour un toit végétalisé. « Mais on ne pouvait pas le faire financièrement ni en pratique car c’était trop lourd », explique Arnaud Vallet. Par le bouche-à-oreille, le centre de jour entend parler de la solution de la peinture réflective à 20 euros/m2 – « peinture fournie et posée », indique Cool Roof – et franchit le pas. À contrecœur pour certains : « les équipes n’étaient pas réjouies, elles n’y croyaient pas. » A tort.
L’efficacité de la peinture de Cool Roof est également testée dans une école du 10e arrondissement. « On a peint le toit au-dessus d’une salle et pas celui d’une autre. En plein été, la différence de température entre les deux classes était de 6°C, détaille Antoine Horellou, le directeur général de l’entreprise créée en 2015 et installée à Brest. Ça a supprimé l’inconfort pour les enfants. » En diminuant la chaleur à l’intérieur d’un bâtiment, on réduit la consommation énergétique des climatisations. Outre des économies d’électricité, on produit alors moins de CO2, gaz contribuant au réchauffement climatique.
En rafraîchissant les toits, Cool Roof permet également de limiter les îlots de chaleur urbains et la dégradation de la toiture. Blanchir un toit doté de panneaux voltaïques a aussi un double intérêt. « En réduisant la chaleur de la toiture, on permet aux panneaux de produire plus. Le blanc augmente aussi la luminosité, donc la productivité, développe Antoine Horellou. Il y a une réflexion avec la mairie de Paris. » Celle-ci a inclus la solution de la peinture réflective pour les toits dans son Plan climat de mai 2018.
Le gisement des toits des surfaces commerciales
Pour trouver la formule de sa peinture fabriquée dans l’ouest de la France – mélange de pigments, de résines (à base de pétrole) et d’eau –, l’entreprise de l’économie sociale et solidaire s’est inspirée des techniques méditerranéennes et des navettes spatiales de la NASA. Avec la région Bretagne, elle tente de se détacher du pétrole via de la recherche et développement pour inclure des poussières de coquilles d’huîtres et des algues dans sa formule. « Pour réduire notre empreinte carbone, on veut utiliser des composants le plus localement biosourcés. »
Lauréate de plusieurs concours, l’établissement breton d’une dizaine de salariés est présent à la COP 24. Son DG annonce avoir des protocoles d’accord avec des pays d’Afrique de l’ouest et démarche au Maghreb. Mais l’un des grands chantiers que vise Cool Roof, ce sont les toits des surfaces commerciales en France. Là où tout a commencé pour Cool Roof : sur le toit de 6.000 m2 d’un Leclerc de Quimper. « Les surfaces commerciales, c’est un gisement !, lance Antoine Horellou. On estime à 400 millions de m2 de surface en France. On pourrait faire plus de 100.000 tonnes d’économie de CO2. »