Antilles: Une association attaque les niveaux autorisés d’un pesticide ultra-toxique
POLLUTION•Le Chlordécone, surtout utilisé pour la production de banane, jusqu’en 1993, a des conséquences catastrophiques encore aujourd’hui sur les populations, hyperexposées…Rachel Garrat-Valcarcel
Chlordécone. C’est le nom d’un pesticide ultra-toxique qui a été longtemps utilisé dans les bananeraies françaises des Antilles. S’il n’est plus utilisé depuis 1993, comme il a la caractéristique d’être ultra-persistant, ses effets se font encore bien sentir. Et pour des centaines d’années encore. Des conséquences sur l’environnement comme sur les humains. D’après Le Monde, il contamine aujourd’hui la quasi-totalité des Guadeloupéens et des Martiniquais. Le journal révèle que les limites réglementaires de chlordécone dans les aliments vont être attaquées par une association locale.
Cette plainte survient après qu’en décembre 2017 l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a conclu que les seuils actuels étaient suffisamment protecteurs. Impensable pour les associations et scientifiques locaux. « Nous sommes considérés comme des sous-hommes, comme une sous-population donc on peut nous faire subir n’importe quoi », explique au quotidien du soir Philippe Verdol, président de EnVie-Santé, qui attaque les niveaux en vigueur.
« Une forme de néocolonialisme »
Il faut dire que les conséquences sur la santé de la trop grande exposition au chlordécone des Antillais sont tout simplement dramatiques. Au-dessus d’un certain seuil, le risque de développer un cancer de la prostate double. Or, la Martinique a justement le taux de cancer de la prostate le plus fort au monde. Les effets sont aussi terribles sur les femmes enceintes : les pertes de QI des nouveau-nés seraient de l’ordre de 10 à 20 points. « D’une terre de champions, nous sommes en train de devenir une terre d’abrutis », explique Philippe Verdon au Monde.
Autre point soulevé par l’association : les niveaux acceptés de chlordécone ne sont pas les même en métropole et en outre-mer. Deux fois plus élevés pour les aliments cultivables sous les climats tropicaux. Il s’agit, pour EnVie-Santé, d’une « rupture d’égalité », d’une « discrimination » qui est le résultat « du lobby de la banane et d’une forme de néocolonialisme ».