Marseille: Une école de commerce rase 300 arbres, au moment même de «l'appel de la forêt»
BIODIVERSITE•Pour son projet d'extension, l'école de commerce Kedge a rasé 300 pins d'Alep, dont certains centenaires...Adrien Max
L'essentiel
- L’école de commerce Kedge a rasé 300 arbres pour l’extension de ses bâtiments.
- Beaucoup d’opposants critiquent cet abattage, d’autant plus que l’école se situe à Luminy, aux portes des calanques.
- Dans le même temps, les députés de la filière bois lancent « l’appel de la forêt » pour replanter 1 million d’arbres.
Comme un décalage. A l’heure où les députés en charge de la filière bois lancent « l’appel de la forêt », l’école de commerce Kedge, à Marseille, vient de couper près de 300 arbres pour son extension. Pas n’importe où, puisque l’établissement se situe sur le campus de Luminy, aux portes des calanques.
Depuis l’annonce de ce projet d’extension, beaucoup d'opposants grincent des dents. La colère est encore montée d’un cran lorsque, le 22 mai, les machines sont venues couper 292 pins d’Alep. « Il s’agissait d’arbres en parfait état, qui n’avaient aucune trace d’incendie et dont certains pouvaient atteindre 140 ans », dénonce Georges Aillaud, fervent opposant au projet d’extension.
« Ces études sont bidon »
Selon lui, les études d’impacts réalisées en amont n’ont pas été correctement menées. « Ils sont venus une fois sur place en mai, et une fois en novembre. Vous pensez vraiment qu’une journée sur place est suffisante pour se rendre compte de l’importance de la faune et de la flore ? Pour moi ces études sont nulles et non avenues, elles sont bidon », peste-t-il férocement.
En guise de bonne foi, Kedge, qui à chaque fois renvoie vers le site du projet pour avoir des informations, s’est engagé à replanter des arbres. « Les 292 pins d’Alep coupés, qui sont une espèce commune, seront compensés par la plantation de 292 chênes verts, une espèce endémique qui réduit le risque d’incendie », explique le site. Mais Georges Aillaud ne l’entend pas de cette oreille. « Il s’agit d’arbres issus de pépinière, ils vont les arroser pendant deux ans, puis ils crèveront. On trouve ces chênes à Luminy, mais au fond de la cuvette, pas sur les collines », explique-t-il.
Parc national des calanques
Sans compter l’installation d’espèces n’appartenant pas à la garrigue provençale. « Ils vont recouvrir l’endroit où étaient ces pins de terrasses qu’ils arboreront de sauge des Canaries, ou de rose de Chine et c’est comme ça qu’ils pensent restaurer la biodiversité ? », s’étonne Georges Alliaud, qui considère les dirigeant de Kedge comme des éco-cide.
Une stratégie d’autant plus étonnante que le campus de Luminy se trouve à proximité immédiate du Parc national des calanques. « On est dans une aire d’adhésion, qui correspond en réalité au cœur géographique du Parc, et pourtant ils construisent un mur de béton aux portes des calanques. A croire que la CCI, la préfecture et la mairie n’ont pas du tout conscience des enjeux liés au patrimoine végétal », se désole Stéphane Coppey, président de France Nature Environnement dans les Bouches-du-Rhône.
« L’appel de la forêt »
Ces enjeux sont rappelés par les députés en charge de la filière bois, et l’association Reforest’Action. Si des arbres ne sont pas replantés massivement à court terme la filière pourrait disparaître, et ce n’est pas la seule conséquence. « Planter un arbre, ça purifie l’air, ça stocke du CO2, ça renforce la biodiversité, ça filtre l’eau, ça procure de l’emploi. Il y a 440 000 emplois en France qui dépendent de l’exploitation durable des forêts », confiait Stéphane Hallaire, à Franceinfo.
Quant à l’utilisation des 292 pins d’Alep coupés, mystère. « On attend de connaître le tonnage exact pour savoir ce que l’on va en faire », explique Kedge, qui doit verser 5.500 euros de compensation au fonds forestier national. Insuffisant, considère Georges Aillaud : « On se moque de nous sur tous les aspects ! »