HISTOIREQuand un puissant séisme détruisait des villages de Provence en 1909

Histoires des catastrophes naturelles (3/3): Quand un puissant séisme ravageait des villages de Provence en 1909

HISTOIREEn 1909, un séisme de magnitude 6 sur l’échelle de Richter détruisait plusieurs villages provençaux, occasionnant 46 morts…
Adrien Max

Adrien Max

L'essentiel

  • Un séisme d’une magnitude 6 sur l’échelle de Richter a ravagé la Provence le 11 juin 1909 à 21h17.
  • Le séisme a causé la mort de 46 personnes et en a blessé 250.
  • De nombreux villages au nord-ouest d’Aix-en-Provence ont été détruits.

Cette semaine, 20 Minutes revient sur les catastrophes naturelles qui se sont abattues en France en partenariat avec Retronews, le site de presse de la Bibliothèque nationale de France. Aujourd’hui, retour sur ce puissant séisme qui a ravagé la Provence en juin 1909.

« Des pans de murs déchiquetés, hachés, tailladés par place comme si les mâchoires d’une gigantesque cisaille s’étaient acharnées sur eux, des toitures défoncées, béantes, qui, dans leur effondrement ont entraîné avec elles les plafonds, et les meubles, des portes arrachées, éventrées, réduites en miettes. » Dans le Petit Parisien du 14 juin 1909, un journaliste décrit le paysage de désolation qu’il vient de découvrir dans les communes voisines d' Aix-en-Provence.



Le 11 juin 1909 à 21h17, un séisme de magnitude 6 sur l’échelle de Richter vient ébranler la Provence. « La secousse a frappé à nos portes. Elle a jeté bas des villages de notre Midi. Elle a enfui sous les décombres des douzaines de cadavres. Elle a fait des ruines et créé des douleurs. Elle a jeté sur tout ce sol de gaîté et de beauté qu’est notre Provence un voile de deuil », raconte-t-on dans l’édition du 13 juin 1909 du Matin.

46 morts et des villages détruits

Si les secousses sont « ressenties de Nice à Montpellier », et donc à Marseille, Toulon, Aix-en-Provence, qui ne connaissent que très peu de dégâts, des petites communes au nord-ouest de cette dernière sont, elles, ravagées. « Dans ces localités le désastre est complet, Saint-Cannat est détruit, Rognes l’est aux trois-quarts, les maisons de Lambesc qui restent debout sont lézardées du haut en bas, les petits villages disséminés dans la plaine sont dans la désolation », écrit Le Petit Parisien le 13 juin 1909.

Les pertes humaines sont nombreuses, 46 personnes sont tuées et 250 blessées. « A Rognes les ravages sont tels qu’on se demande comment le nombre de morts n’est pas plus considérable, le clocher a été renversé, les trois-quarts des habitations se sont écroulées et d’énormes quartiers de roches obstruent les rues », décrit Le Petit Parisien dans cette même édition.

Les prédictions d’un savant

Un savant, M. de Parville aurait prédit la catastrophe quelques jours auparavant. « C’est un événement malheureux mais il devait se produire dans un endroit quelconque du globe. Depuis près de quarante deux ans que j’étudie ces dates critiques, que je les compare aux événements d’ordre météorologiques ou géologiques qui se produisent, je puis dire que ces dates ne m’ont jamais trompé. Si on peut, pour ainsi dire, déterminer dans le temps à l’avance des mouvements sismiques, on ne peut malheureusement point les localiser dans l’espace. »



Olivier Bellier ne partage pas cette vision. « Les séismes ne sont pas prévisibles, il n’existe pas de technique fiable. Il peut y avoir des phénomènes précurseurs mais ils ne sont pas systématiques. On peut par exemple prédire que la faille voisine de celle qui a provoqué ce séisme bougera demain. Mais demain en géologie ce peut être dans un siècle, comme dans 10.000 ou 20.000 ans », explique le géologue et directeur du centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement (Cerege, Aix Marseille-Université).

Une faille et des contraintes

Quoi qu’il en soit, le tremblement de terre de Provence a permis une prise de conscience à la fois sur les causes et sur les conséquences de ces catastrophes naturelles. Ce qui permet aujourd’hui de mieux nous y préparer. Le docteur en sciences Paul Lemoine écrivait le 3 juillet 1909 dans Le Petit Journal : « La plupart des villages atteints se trouvent en ligne droite, or elle coïncide avec une grande faille. D’autres villages, aussi en ligne droite, coïncident avec une autre faille, quoique moins éprouvés que les précédents villages, ils ont été cependant assez atteints. On est donc amené à penser que le tremblement de terre de Provence est dû à la tendance qu’aurait eue à remuer les compartiments des calcaires massifs qui constituent la chaîne des côtes, entre les deux failles. »



Un constat que partage Olivier Bellier : « Pour qu’il y ait un séisme, il faut une faille et des contraintes. La faille est bien présente et les contraintes résultent pour partie du rapprochement entre l’Afrique et l’Europe. La Provence est régionalement prise en étau entre les Alpes et les Pyrénées, les failles formées au cours des temps géologiques peuvent être réactivées par la tectonique. »

« Prise de conscience dans le milieu »

Paul Lemoine remarquait également que le séisme avait été moins ressenti dans les charbonnages de Gardane, « les ouvriers, au fond de la mine, déclarent n’avoir rien éprouvé », et conclut à la nécessité de procéder à des fondations profondes. Il avance également l’argument de ne pas construire d’habitation sur les failles décrites plus tôt.

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Des conseils avant-gardistes, que renouvelle Olivier Bellier, en y apportant néanmoins une nuance : « Le séisme de 1909 a entraîné une prise de conscience dans le milieu. Depuis des réglementations contraignantes ont été mises en place, comme l’obligation de réaliser des fondations plus profondes, arrimées à la roche. Des secteurs ont aussi été rendus inconstructibles, comme le haut de certains villages. En plus d’être positionnées sur la faille, certaines conditions de sites peuvent jouer un rôle dans la puissance ressentie. Comme le fait qu’un village soit construit sur un piton rocheux, par exemple. »

La Provence n’a donc pas fini de connaître des séismes, mais ceux aussi puissants que celui de 1909 resteront très rares. Et la région y est mieux préparée.