Vosges: Avec le réchauffement climatique, que deviendront les stations de ski du massif?
METEO•Si l’hiver 2017-2018 a plutôt été très bon de l’avis des professionnels de montagne, le réchauffement climatique demande aux stations de ski de réfléchir à leur avenir à long terme. Particulièrement dans les Vosges…Bruno Poussard
L'essentiel
- Malgré un très bon hiver 2017-2018, le réchauffement climatique demande inévitablement aux stations de ski de réfléchir à leur avenir à long terme.
- C’est particulièrement vrai dans le massif des Vosges de plus faible altitude, où la diversification a déjà débuté, mais pas encore vraiment en hiver.
La neige n’a pas totalement fondu en ce début avril dans les Vosges. L’hiver 2017-2018 a plutôt été très bon. Mais il reste loin de l’époque des avalanches observées en dessous de 600 mètres d’altitude dans les fonds de vallées à la fin du XIXe siècle, et même jusqu’en 1952, à côté de Mittlach. Le réchauffement climatique et ses effets…
Même si la variabilité est forte d’un hiver à l’autre, la neige en montagne est forcément touchée. Chef du centre Météo France de Besançon, Bruno Vermot-Desroches embraye : « Il y a toujours eu des hivers sans neige et d’autres avec beaucoup de neige. Mais en 30 ans, la durée moyenne d’enneigement a diminué de 10 jours à 900 mètres. »
Un enneigement plus que divisé par deux en 2100 ?
Selon les mesures, depuis les années 60, la quantité de neige diminue aussi. Du point de vue climatique, les montagnes perdent l’équivalent d’un centimètre de hauteur par jour. « Sur 10 ans, ça fait près de 40 mètres, 400 sur 100 ans », calcule le météorologue chargé, entre autres, du suivi du manteau neigeux dans les Vosges et le Jura.
Au centre d'étude de la neige de Grenoble, les enregistrements de Météo France sont injectés dans des modèles pour tenter d’estimer la baisse de l’enneigement à l’avenir. « D’ici la fin du siècle, à 1.500 mètres dans le massif de la Chartreuse, la quantité de neige pourrait être divisée par deux », complète l’ingénieur Nicolas Eckert.
Les Vosges, elles, culminent seulement à 1.424 mètres… Selon les mêmes hypothèses des chercheurs, les conditions actuelles à 600 mètres d’altitude pourraient être celles des crêtes du massif en 2100.
Jusqu’à quand pourra-t-on skier dans les Vosges ?
Ce changement interroge l’avenir des stations de ski des Vosges - nées à travers les skis clubs dès 1895 et développées à partir des années 1960. Le 29 mars, la Chambre de commerce et d'industrie d'Alsace et Alsace destination tourisme ont réuni à ce sujet nombre d’exploitants et d’acteurs touristiques du massif à Colmar.
Ici, le ski représente des millions d’euros de chiffre d’affaires et des milliers d’emplois saisonniers. Côté lorrain et côté alsacien, chacun semble avoir pris conscience des conséquences du réchauffement sur cette activité. Au Lac Blanc, à la création du gros télésiège en 2005, un bikepark pour VTT a été créé pour le faire vivre toute l’année.
« À l’heure actuelle, il y a toujours de la neige »
Sur l’installation proposant une diversification des activités, le vélo ne représente pour autant que 20 % du chiffre d’affaires, contre 80 % pour le ski. « On est conscient que la Terre change mais à l’heure actuelle, il y a toujours de la neige », rebondit Christophe Bergamini, directeur de l’office du tourisme de la vallée de Kaysersberg à proximité.
« « Aujourd’hui, rien ne peut encore remplacer entièrement le ski qui s’est tellement démocratisé… En hiver, qu’est-ce qui rapporte autant que le ski ? Pour quelle autre activité autant de gens seront-ils prêts à mettre 50 ou 60 euros par jour ? » »
Loin d’être fermée à la mutation, la station haut-rhinoise a néanmoins monté un projet de luge sur rail entre deux pistes de ski - freiné, lui, par une étude d’impact environnemental à refaire. « La luge ne remplacera pas le ski, mais elle complétera l’offre, termine Christophe Bergamini. C’est un début. Avant, peut-être, d’allonger la période de VTT. »
D’autres activités créées, mais laquelle remplacera le ski ?
Plusieurs pistes de diversification existent. Mais essentiellement pour les autres saisons, pas forcément énormément en hiver. Le Markstein a par exemple une luge d'été. Le Champ du Feu propose, lui, des balades à cheval toute l’année. L’escalade, le ski de fond, la randonnée, les raquettes ou les chiens de traîneaux se développent toujours.
Avant la révision de la stratégie touristique du massif des Vosges, celle de la région Grand Est et une étude sur le ski nordique, ces réflexions sur le futur ne pourront être évitées. Visant à aider les sociétés du Rhin-Supérieur à s’adapter aux changements climatiques, le projet européen Clim'Ability n’oubliera pas les massifs dans ses fiches. Car oui, dans 100 ans, il sera probablement bien rare de skier dans les Vosges.