VIDEO. Russie: Des ours polaires massés sur une île à cause du réchauffement climatique
CLIMAT•Le changement climatique transforme l’habitat naturel des ours polaires et accroît la concurrence pour la recherche de nourriture…20 Minutes avec AFP
Une scène qui pourrait devenir de moins en moins rare. Les touristes venus admirer en bateau les paysages glacés de l’Arctique russe ont d’abord cru voir de petits blocs de banquise sur la rive. Il s’agissait en réalité de 200 ours polaires en plein festin, affairés sur la carcasse d’une baleine.
« Nous étions tous estomaqués », témoigne Alexandre Grouzdev, le directeur de la réserve naturelle de l’île Wrangel, dans l’Extrême-Orient russe, où a eu lieu cet automne cette rencontre, « unique » selon lui. Les ours polaires s’étaient rassemblés au bord de l’eau pour dépecer la carcasse d’une baleine échouée sur la rive. Le large groupe comprenait de nombreuses familles, dont deux mères suivies chacune par quatre oursons, une vision peu fréquente, explique Grouzdev.
Obligés de passer plus de temps sur la terre ferme
Si un tel spectacle peut fasciner les touristes, pour les scientifiques il illustre les conséquences du réchauffement, qui transforme l’habitat naturel des animaux, accroît la concurrence pour la nourriture et les rapproche des zones habitées. Le changement climatique provoque la fonte des glaces plus tôt dans l’année et pousse les populations d’ours polaires de l’Arctique à passer plus de temps sur la terre ferme et à se rapprocher dangereusement des villages.
L’île Wrangel, située dans la mer des Tchouktches dans le nord-est de la Sibérie, est traditionnellement l’endroit où les ours polaires se reposent entre août et novembre, après la fonte des glaces et avant de pouvoir repartir à la chasse aux phoques. Elle est également considérée comme la principale zone de tout l’Arctique où ils donnent naissance à leurs petits.
Moins de proies
« Une baleine représente un véritable cadeau pour eux : plusieurs dizaines de tonnes » de nourriture, soit assez pour plusieurs mois, explique Grouzdev. Les ours polaires sont de plus en plus nombreux à se rendre sur l’île Wrangel et ils y passent aujourd’hui en moyenne un mois de plus qu’il y a 20 ans en raison de la fonte des glaces, selon Eric Regehr, spécialiste de l’Université de Washington. Cet automne, les observateurs en ont recensé 589, un nombre « anormalement élevé » et plus du double des estimations précédentes, s’inquiète Regehr.
Selon lui, la population d’ours polaires de la mer des Tchouktches, partagée entre la Russie et les Etats-Unis, reste « en bonne santé ».
Mais cela pourrait changer si le temps passé sur la terre ferme continue de s’allonger : car malgré l’existence de quelques sources de nourriture comme les boeufs musqués, les rongeurs ou même l’herbe, rien ne remplacera les apports en énergie de la chasse au phoque, essentielle pour la survie des ours polaires.