Bretagne: En plein boom, la filière bio s’estime trahie par les pouvoirs publics
AGRICULTURE•Rassemblés à Rennes, les producteurs dénoncent la suppression d’aides décidée par le gouvernement…Jérôme Gicquel
L'essentiel
- Le gouvernement a annoncé en septembre la fin d’une partie des aides à la filière.
- Les agriculteurs bio ne décolèrent pas et ont manifesté ce mercredi à Rennes.
- Ils estiment que cette décision va tuer une filière pourtant en plein boom.
En quelques années, les produits issus de l’agriculture biologique ont trouvé leur place dans le panier des ménages français. L’an dernier, la consommation en produits bio a dépassé la barre des 7 milliards, en hausse de 21,7 % sur un an. Pour accompagner cette demande florissante, les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à se convertir. Rien qu’en Bretagne, on recense ainsi plus de 2.600 fermes certifiées bio, contre seulement un millier en 2009.
Alors que le marché explose, la filière bio aurait de quoi avoir le sourire. Il n’en est rien. En cause, l’annonce du gouvernement le 20 septembre de supprimer les aides au maintien des agriculteurs bio à partir de l’an prochain. « Je souhaite que d'autres mécanismes que l'attribution systématique d'aides au maintien permettent aux producteurs déjà certifiés en agriculture biologique d'obtenir une juste rémunération », avait alors déclaré Stéphane Travert, ministre de l'Agriculture.
« Un très mauvais signal à la profession »
Pour les producteurs bretons, qui étaient rassemblés ce mercredi midi sur l’esplanade de Gaulle à Rennes, cette décision ne passe pas. « C’est un gros retour en arrière et un très mauvais signal adressé à la profession. On n’arrête pas de nous parler de santé publique et d’environnement, et résultat on supprime des aides aux agriculteurs qui œuvrent pour le bien de la planète », se désole Ronan Marquet, producteurs de légumes bio à Saint-Thual, au nord-ouest de Rennes.
« La filière bio est en pleine forme, est plébiscitée par les consommateurs et l’Etat choisit de se désengager, c’est à n’y rien comprendre », estime Julien Sauvée, producteur de lait et de viande bovine à Melesse près de Rennes et vice-président de la Fédération régionale des agriculteurs biologiques de Bretagne. Stéphane Travert estime de son côté que « c'est au marché de soutenir le maintien de l'agriculture biologique car la demande est là et il faut que nous soyons collectivement en capacité d'y répondre ».
Un manque à gagner pour les producteurs convertis
Cette suppression des aides au maintien versées aux agriculteurs bio ne signifie pas pour autant le désengagement total de l’Etat dans la filière puisque les aides à la conversion, destinées à lancer des débutants du bio, sont maintenues et même renforcées. « Cela risque quand même d’en refroidir pas mal à se convertir », indique Ronan Marquet.
Pour les convertis, c’est aussi un gros manque à gagner. « Je devrais perdre 10.000 euros l’an prochain. Cela risque de tuer la filière bio », assure Julien Sauvée. A ses côtés, un autre producteur converti au bio voit dans cette décision « un recul du gouvernement sous la pression des lobbys de l’agrobusiness ».