COP22 à Marrakech: Noor, la centrale solaire qui pourrait éclairer le Maroc
REPORTAGE•La 22e conférence des Nations unies sur le climat se tient du 7 au 18 novembre à Marrakech, l’occasion de découvrir les initiatives écologiques du Maroc…Audrey Chauvet
De notre envoyée spéciale à Ouarzazate (Maroc)
Il faut sortir de Ouarzazate et emprunter la route au beau milieu d’un désert de cailloux. Ici, le soleil ne pardonne pas : la végétation inexistante et les retenues d’eau nécessaires pour alimenter la ville en témoignent. Mais le Maroc a trouvé une richesse dans cette aridité : depuis plus de six mois déjà, les rayons du soleil viennent frapper plus d’un million de miroirs qui permettent de générer de l’électricité renouvelable dans un pays qui ambitionne d’atteindre 52 % d’énergie verte dans son mix électrique d’ici à 2030.
Des miroirs à perte de vue
Inaugurée en février 2016, la centrale solaire de Noor s’impose déjà comme un mastodonte de l’énergie solaire : sa première tranche déjà en activité, Noor 1, couvre 480 hectares et produit 500 gigawatts-heures par an, soit la consommation de 600.000 Marocains. On dit que c’est « la plus grande au monde », mais Rachid Bayed, directeur de la réalisation chez Masen (Moroccoan agency for solar energy), préfère préciser : « C’est la plus grande centrale solaire thermique à concentration avec une seule turbine ».
Il n’empêche que les panneaux à perte de vue, plus d’un million en tout représentant 1,5 million de mètres carrés, produiront 2.000 gigawatts-heures annuels lorsque les trois tranches seront en fonctionnement à la fin 2017, soit assez pour alimenter en électricité 2 millions d’habitants.
La technique qui permet d’obtenir de tels résultats consiste à faire chauffer un liquide caloporteur grâce à la réverbération du soleil sur les panneaux. Ce liquide, qui peut monter à 400°C sans s’évaporer, sert ensuite à faire tourner une turbine. Simple, mais révolutionnaire dans un pays qui était jusqu’à présent dépendant à 97 % des importations pour sa consommation d’énergie.
« Le Maroc veut sécuriser son approvisionnement en énergie et créer une filière industrielle dans les renouvelables », observe Eric Baulard, directeur de l’Agence française de développement (AFD) de Rabat. L’institution française a participé au financement de la centrale Noor à hauteur de 100 millions d’euros via un prêt. « Aujourd’hui, quasiment tous les Marocains ont accès à l’électricité, la consommation est donc en augmentation et il y a des pics en été à cause des climatiseurs. »
Eclairer le chemin pour les autres pays africains
Plutôt que de continuer à importer de l’énergie et à creuser le budget de l’Etat, le Maroc a donc choisi de se tourner vers ses richesses naturelles. « C’est bon pour la politique énergétique du pays mais aussi pour l’environnement : grâce à Noor, on évite l’émission d’un million de tonnes de CO2 par an », chiffre Rachid Bayed.
La centrale présente aussi l’avantage de pouvoir continuer à produire de l’électricité même lorsque la nuit tombe : la production ne s’arrête que 3 ou 4 heures après le coucher du soleil. Une technologie qui pourrait intéresser un grand nombre de pays africains riches en soleil : Rachid Bayed s’attend à avoir de nombreuses visites pendant la COP22. « Nous avons déjà beaucoup de visiteurs venant d’Afrique », témoigne-t-il. « Noor », la lumière en arabe, pourrait être l’éclaireur d’une Afrique riche en énergie renouvelable.