Espace: Pourquoi les trois exoplanètes découvertes ne sont pas près de nous accueillir
ESPACE•Déclarer ces exoplanètes semblables à la Terre comme « habitables » semble précipité…Olivier Philippe-Viela
Les trois exoplanètes « potentiellement habitables » dont l’existence a été annoncée lundi ne seraient pas si accueillantes que cela. Des chercheurs de l’université de Liège, dans une étude publiée par la revue Nature, ont rapporté la découverte de ce trio de planètes situées en orbite d’une étoile naine ultra-froide, en dehors du système solaire, à environ 39 années-lumière de la Terre (soit 400.000 milliards de kilomètres). En espace astronomique, cela reste proche de nous, selon l’astrophysicien Michaël Gillon, à la tête de l’équipe de chercheurs, qui parle d’une possibilité « de trouver des traces chimiques de la vie en dehors de notre système solaire ». Mais plusieurs facteurs rendent toutefois quasiment impossible la vie humaine.
En apparence comparables à la Terre… mais sans eau
Selon les chercheurs, la température et la taille de ces astres sont proches de celles de la Terre. Mais sur les trois exoplanètes observées, une seule serait en réalité «potentiellement habitable», deux se trouvant avec certitude hors « zone habitable ». C’est là que se trouve le malentendu qui a pu faire penser que l'Homme pourrait s'y installer : « Ce qu’on définit comme zone habitable en astronomie, c’est à peu près la distance entre la planète Terre et le soleil », explique à 20 Minutes Jean-Loup Bertaux, astronome et directeur de recherche au CNRS. Cela ne signifie pas nécessairement «habitable pour l’Homme».
« La vraie définition serait que la température soit au-dessus de 0° centigrade, pour que la présence d’eau liquide soit possible. Autrement, la vie ne peut pas se développer. Dans le cas de ces exoplanètes, l’effet de serre est trop important », précise le chercheur. En effet, trop proches de l’astre dont elles dépendent, l’étoile-naine Trappist-1, elles sont inondées par un rayonnement qui crée un effet de serre insupportable pour l’Homme et empêche la présence d’eau, condition nécessaire à l’apparition d’une forme de vie comparable à celle sur Terre.
Encore beaucoup d’hypothèses
La troisième planète ne peut pas encore être qualifiée d’habitable car on ne sait pas à quelle distance elle se trouve de son étoile. Elle serait probablement en zone habitable, et pourrait dans ce cas « potentiellement abriter de la vie sur toute sa surface », selon Michaël Gillon, mais sans certitude pour l’instant. « On ne sait pas du tout comment la vie humaine peut s’y développer», ajoute Jean-Loup Bertaux.
Leur taille et leur température sont donc connues, mais leur composition (rocheuse, gazeuse ?) fait encore l’objet de spéculations. On ne sait même pas si elles possèdent une atmosphère. Difficile donc de se projeter. Peut-être « dans cinq à dix ans » après étude de leur masse, « notamment avec le télescope spatial James Webb qui sera lancé en 2018 », a expliqué Michaël Gillon.
Des milliers d’exoplanètes déjà découvertes, mais très peu habitables
En 1995, deux astronomes de l’observatoire de Genève ont découvert une planète à 51 années-lumière de la Terre. C’est la première exoplanète observée, c’est-à-dire planète extérieure à notre système solaire, observée. Depuis, l’existence de 2.111 astres du même genre a été confirmée. Mais il y en a « moins d’une dizaine jugées habitables selon la définition en astronomie », explique Jean-Loup Bertaux, qui ajoute : « les étoiles de ce type, habitables ou non, que l’on appelle naines rouges, sont très nombreuses, mais difficilement observables car très petites, à peine plus grandes que Jupiter, avec un rayon et une luminosité très faibles. »
L’intérêt de la découverte du trio d’exoplanètes liées à Trappist-1 tient donc essentiellement à sa distance relativement proche, qui facilitera son observation. « Le fait remarquable dans le cas présent, c’est qu’elles sont à 40 années-lumière. Ces planètes-là passent devant leur étoile et sont proches de la Terre, ce sera plus facile d’observer leur atmosphère si jamais elles en ont une. Elles vont devenir une cible privilégiée de la future mission Webb », s’enthousiasme Jean-Loup Bertaux. L’Homme n’y posera donc pas un pied, mais la recherche sur les exoplanètes pourrait faire un bond en avant.