Amazonie: face à la déforestation, le cri d'alarme des Guarani-Kaiowa
•"Nous sommes vivants mais nous mourons à petit feu": deux représentants ...© 2015 AFP
«Nous sommes vivants mais nous mourons à petit feu»: deux représentants des Guarani-kaiowa d'Amazonie sont venus à Paris lancer un cri d'alarme face à la déforestation et dénoncer l'accaparement de leurs terres, qui menacent leur avenir dans le sud-ouest du Brésil.
«Nous sommes ici pour demander de l'aide, non seulement pour la forêt et la nature, mais aussi pour notre vie», a expliqué mercredi au cours d'une conférence de presse Valdelice Veron, fille d'un cacique tué par un fermier en 2003.
Comme son père, près de 300 membres de cette communauté de 45.000 âmes ont été «massacrés ces dix dernières années» dans des conflits liés à l'expansion des cultures de soja et de canne à sucre, raconte-t-elle.
«Dans le Mato Grosso do Sul, le soja et l'éthanol que vous consommez sont mélangés au sang guarani-kaiowa», prévient la représentante du deuxième peuple autochtone du Brésil, installé sur 42.000 hectares.
Elle-même dit être menacée de mort dans son pays. Valdelice Veron voyage pour la première fois hors du Brésil, accompagnée du chef Natanael Vilharva-Caceres.
Tous deux ont participé mardi à un «sommet des consciences», organisé par la France en marge des négociations en vue d'un accord universel pour freiner le changement climatique.
«Nous mourons à petit feu», a expliqué Vilharva-Caceres, qui s'exprimait en portugais, tête ceinte d'une couronne de plumes.
Sur le banc des accusés, les cultures extensives de soja transgénique, encouragée par une demande chinoise massive, et les grandes multinationales productrices d'agrocarburants issus de la canne à sucre, «dont l'activité aggrave les conflits fonciers», souligne l'ONG Planète Amazone. La production mondiale d'éthanol a été multipliée par six de 2000 à 2010, passant de 19 à 100 millions de m3, rappelle l'organisation.
- Visites à l'Elysée et l'Assemblée -
«Assassinats, accaparement de terres, sous-alimentation, problèmes de santé, accidents du travail et salaires impayés sont le quotidien du peuple Guarani-Kaiowa», poursuit l'ONG.
La garantie des droits des peuples autochtones par la Constitution brésilienne? «C'est un papier, mais au moins, c'est écrit», relève le chef Vilharva-Caceres, avant de dénoncer plusieurs projets d'amendements qui menacent à ses yeux leur intégrité.
«La discrimination au Brésil est très importante. Souvent, les membres de notre communauté ne peuvent pas entrer au restaurant ou se promener dans la rue», dénonce-t-il.
Le processus d'attribution des terres aux Indiens doit recevoir à chaque fois recevoir l'aval final de la présidence brésilienne.
«La présidente Dilma Rousseff est complice de ces crimes, parce que sur sa table, il y a 22 décrets d'homologation en attente de signature depuis des années», affirme Valdelice Veron.
A Paris, les représentants ont été reçus lundi au palais présidentiel de l'Elysée par Nicolas Hulot, envoyé spécial de François Hollande pour la protection de la planète. Ils sont aussi allés défendre leur cause devant l'Assemblée nationale.
Fin juin, le Conseil indigéniste missionnaire (Cimi) du Brésil, lié à l'Eglise catholique, a dénoncé une recrudescence de la violence contre les peuples indigènes dans ce pays en 2014, avec 138 meurtres d'Indiens (+42% par rapport à 2013) et 135 suicides recensés.
Quelque 890.000 Indiens de 305 ethnies vivent au Brésil, sur une population de 202 millions d'habitants. Leurs terres occupent 12% du territoire, la plupart en Amazonie, mais beaucoup doivent encore être délimitées et ont été occupées par des colons.