Le Sud-Est pourrait connaitre des «séismes d'une magnitude 7.2, ce qui est énorme»
INTERVIEW•Une secousse de magnitude 3.5 a été enregistrée dans le Var dans la nuit de samedi à dimanche, mais les spécialistes estiment que la région pourrait être plus sévèrement touchée…Fabien Binacchi
La terre a encore tremblé cette nuit sur la Côte d'Azur. Des centaines de ces secousses, le plus souvent quasiment imperceptibles, font frémir chaque année le Sud-Est, une terre propice à de tels phénomènes. Mais jusqu'à quel point?
Un séisme de forte magnitude et potentiellement mortel, comme en 1887 sur la côte Ligure, peut toujours survenir, selon les sismologues.
En 2015, Anne Deschamps, directeur de recherche au CNRS, rattachée au laboratoire Géoazur, à l'université de Nice, et à l'Observatoire de la Côte d'Azur, avait répondu aux questions de 20 Minutes.
La région est-elle particulièrement exposée?
Elle est considérée comme l'une des plus sismiques de France métropolitaine. Une secousse importante, de magnitude 5, est encore arrivée de Barcelonnette [Alpes-de-Haute-Provence] le 7 avril 2014.
Mais ça peut aussi venir du côté de Saorge, des régions italiennes de Cuneo jusqu'à la frontière, ou plus bas, au niveau de la marge Ligure sur une bande à 20-30 km des côtes.
Là, il y a eu des séismes relativement importants, comme celui de magnitude 6.5 à 6.9, survenu en 1887. Et c'est la zone littorale qui pourrait être la plus impactée, parce que la plus dense.
Quelle est la spécificité de la zone?
Nous sommes sur la contraction des plaques africaine et eurasienne, responsable de la poussée des Alpes. La fracture s'est déplacée vers le Nord du Maghreb, consécutivement à une réorganisation de la croûte.
Il existe des failles dans le Sud-Est, mais aucune ne fait plus de 100 km de long. Dans la zone, la force des séismes est tout de même limitée par la faible vitesse de déformation des sols.
Peut-on estimer la magnitude maximale d'un séisme dans notre région?
Avec une probabilité de 90%, elle ne dépassera pas 7.2, ce qui est déjà énorme. D'autant plus l'épicentre est situé proche d'une ville. Les nouvelles constructions, érigées selon les règles parasismiques, pourraient résister, mais pour les anciens bâtiments c'est une autre histoire.
Et peut-on prévoir leur survenue?
Le moment où ça arrivera est difficile à contraindre. Mais nous pouvons juste imaginer qu'un séisme de très forte magnitude n'arriverait que tous les 500 ans dans la région.
La population est-elle assez préparée?
Ce n'est jamais assez. L'organisation d'une alerte séisme est prévue régulièrement dans les établissements scolaires. Mais malheureusement, je crois que ce n'est pas toujours fait de partout. Avec le laboratoire, nous essayons d'intervenir le plus possible dans les écoles pour expliquer que le risque existe, qu'il est bien là et qu'il faut en être toujours conscient.
En quoi consiste votre projet de coopération avec l'Italie?
Un tremblement de terre ne s'arrête aux frontières et pourtant la surveillance de la sismicité est interne à chaque pays. Notre projet Alcotra CASSAT vise à améliorer la transmission de l'information, d'un centre à l'autre. Ca nous permet de travailler sur les mêmes bases pour accélérer la recherche.