Prospection pétrolière près des Canaries, un navire de Greenpeace bloqué
Repsol a donné mardi le coup d'envoi à la recherche d'hydrocarbures ...© 2014 AFP
Repsol a donné mardi le coup d'envoi à la recherche d'hydrocarbures au large des îles espagnoles des Canaries, que la compagnie pétrolière présente comme une chance pour le pays, mais qui suscite une forte opposition sur place notamment de Greenpeace dont un navire a été saisi.
Les opérations, menées depuis le bateau Rowan Renaissance, vont durer «une soixantaine de jours», a déclaré un porte-parole de la compagnie espagnole.
Le premier point de sondage se situe en pleine mer, à une cinquantaine de kilomètres à l'est des îles Lanzarote et Fuerteventura, connues des touristes pour leurs paysages volcaniques et leurs plages, au large des côtes africaines.
Repsol a prévu de prospecter jusqu'à 3.000 mètres de profondeur. En cas de résultats concluants, le groupe pétrolier a déjà reçu le feu vert du gouvernement espagnol pour deux autres sondages dans cette zone, jusqu'à 6.900 mètres de profondeur.
Repsol estime entre 17 et 19% les chances de découvrir des gisements d'hydrocarbures au large de l'archipel. Des premières explorations, au début des années 2000, avaient révélé des gisements à environ 70 kilomètres des côtes, près de la frontière maritime avec le Maroc. Mais elles avaient été interrompues par la justice en 2004.
Aujourd'hui, ce sont les associations écologistes et le gouvernement régional des Canaries qui s'opposent à ce projet soutenu par Madrid.
«Ils protègent une entreprise privée, Repsol, pour s'attaquer aux ressources qui sont les nôtres», a accusé le président des Canaries, Paulino Rivero, à la tête de la coalition nationaliste de centre droit Coalicion Canaria.
Greenpeace avait de son côté dépêché son navire Arctic Sunrise sur place, mais le bateau a été mis sous séquestre mardi par l'Espagne pour s'être approché du Rowan Renaissance dans une zone d'exclusion maritime.
Il y un an, le bateau de plus de 49 mètres avait été arraisonné par les autorités russes après une opération contre le géant gazier Gazprom dans l'Arctique pour dénoncer les risques d'exploitation d'hydrocarbures dans cette zone aux écosystèmes fragiles.
Une caution de 50.000 euros a été demandée pour permettre au bateau, bloqué à Arrecife, de reprendre la mer, selon un porte-parole de Greenpeace. Le ministère de l'Equipement espagnol n'a pas confirmé cette information, mais a admis qu'une procédure avait été engagée contre l'ONG.
«On ne nous fera pas taire, ni avec des amendes, ni par des charges violentes (contre les bateaux ndlr), ni avec des menaces», a déclaré dans un communiqué le directeur de Greenpeace Espagne, Mario Rodriguez.
- Référendum bloqué -
Le gouvernement espagnol a aussi fait bloquer par le tribunal constitutionnel la tenue d'un référendum, prévu par le gouvernement des Canaries le 23 novembre, pour demander aux habitants si «les Canaries doivent changer leur modèle environnemental et touristique pour privilégier les prospections de gaz ou pétrolières».
Le tourisme est la première ressource des sept îles de l'archipel, qui, outre Lanzarote et Fuerteventura, comprend El Hierro, La Palma, La Gomera, Tenerife, Grande Canarie, qui ont accueilli 10,6 millions de voyageurs l'an dernier.
Le Tribunal supérieur de justice des Canaries a été saisi d'un recours contre les prospections et, selon un porte-parole du gouvernement régional, il pourrait se prononcer «cette semaine ou la suivante».
Pour Repsol, ces inquiétudes n'ont pas lieu d'être car le bateau en charge de la prospection n'est pas visible des côtes. De plus, «10% de la demande en pétrole du pays», qui importe près de 80% de son énergie consommée, «pourrait être couverte» par les gisements espérés, assure la compagnie sur son site internet.
Le groupe pétrolier met aussi en avant des investissements prévus de plus de 350 millions de dollars (280 millions d'euros) pour les deux premiers sondages, des retombées économiques et des créations d'emplois aux Canaries où le taux de chômage frôle les 34% contre 24% pour l'ensemble du pays.
Les écologistes, eux, craignent un impact sur la faune et la flore et des risques sismiques. Le Fonds mondial pour la nature (WIFI), Greenpeace, mais aussi les conseils municipaux des îles de Lanzarote et de Fuerteventura ont déposé plainte à Bruxelles pour stopper Repsol.
La prochaine action contre la prospection est prévue pour le 30 novembre, et plusieurs organisations, réunies dans le collectif «Rave Canaries», ont lancé un appel pour réunir une flotte dans la zone prospectée.