OENOLOGIESemaine du goût: Le vin bio a-t-il un goût spécial?

Semaine du goût: Le vin bio a-t-il un goût spécial?

OENOLOGIELa certification et la culture de la vigne donnent-elle une touche particulière au vin bio?…
Romain Scotto

Romain Scotto

«Je ne conçois pas qu’un grand cru puisse ne pas être bio.» En une petite phrase, Aubert de Villaine a mis fin au scepticisme de tous les amateurs de vin qui n’osaient pas déboucher jusque-là une bouteille bio. Copropriétaire du domaine de la Romanée-Conti, il n’a pas encore apposé le macaron AB sur ses bouteilles. Cela interviendra peut-être un jour, mais en attendant, ses vins sont bien issus de l’agriculture biologique. Olivier Thiénot œnologue et fondateur de l’école du vin va même plus loin en affirmant qu’il «n’y a plus de grands crus qui ne soient pas bios aujourd’hui».

Faire du bio une affaire de goût est donc une erreur en matière de vin. Par rapport à un vin classique, le bio ne subit pas de traitement avec des molécules chimiques. Il possède moins d’additifs mais n’en est pas totalement privé non plus. La vigne, elle, n’est pas traitée avec des fongicides, pesticides, etc. «En goût, ça ne se retrouve pas car le vin passe en fut de chêne. Le bio reste une philosophie intéressante, moderne», poursuit le spécialiste.

Fruité, frais, aromatique

En poussant un peu le bouchon, il reconnaît tout de même que dans l’ensemble, les vins bios ont un côté plus fruité, frais, aromatique. «Il y a plusieurs écoles de pensée pour le goût. Certains disent aussi qu’un vin bio est moins long en bouche. Avec des arômes plus éphémères. Cela donne une impression de quelque chose de moins tendu que chez un vin classique.» Une affaire de palais éduqué, donc.

Si seuls 6 à 7% des grands vins seraient certifiés bio, la raison est peut-être culturelle. Avoir un macaron apposé sur une bouteille ne colle pas forcément à l’image d’un grand cru. «Le bio a peut-être encore une image alternative», observe Olivier Thiénot. Faire passer un vignoble en bio avec certification, c’est aussi assumer les éventuelles conséquences d’une catastrophe (maladie de la vigne non traitée par exemple).

Côté goût, la vraie différence s’observe plutôt avec les vins dits «natures» et donc sans additifs (notamment les sulfites). Un choix philosophique visant à retrouver l'expression naturelle du terroir. Toute intervention technique pouvant altérer la vie bactérienne du vin est proscrite. Le goût de ce vin, très fragile, dépend alors en grande partie de la qualité du raisin et de la maîtrise du processus de vinification.