Pollution aux nitrates: «Il faut sanctionner financièrement», estime Corinne Lepage
INTERVIEW•La France a été de nouveau condamnée jeudi par la justice européenne pour manquement à ses obligations de lutte contre la pollution aux nitrates…Propos recueillis par Romain Lescurieux
La Cour de justice de l’Union européenne a condamné la France ce jeudi pour ne pas avoir correctement transposé la directive «nitrates» de 1991 de manière à empêcher tout risque de pollution des eaux. Mais sans sanction financière. Corinne Lepage, ancienne ministre de l’Environnement et présidente du Rassemblement citoyen a répondu aux questions de 20 Minutes.
Quelle est votre réaction à cette condamnation?
Cette condamnation est tout à fait normale. La directive européenne date de 1991 et la France n’a jamais réellement réagi. Quand j’étais ministre de l’Environnement sous le gouvernement d’Alain Juppé, j’ai tout de même fait voter un décret en 1996 pour mettre en œuvre des programmes d’action en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole. Et j’ai notamment obtenu la fin des constructions de porcheries en Bretagne. Car le problème des nitrates en France est surtout un problème breton. Mais près de vingt ans plus tard, la question n’est toujours pas réglée.
Faut-il sanctionner financièrement la France pour que la directive soit respectée?
Oui. Je pense qu’il faut sanctionner financièrement pour qu’il se passe quelque chose. Ou du moins, il aurait fallu par exemple cette année, un délai de six mois pour respecter certaines exigences et si les objectifs n’étaient pas atteints, infliger une amende. Sans cette mesure, le dossier des nitrates n’évoluera pas et nous serons condamnés une nouvelle fois.
Concrètement, que préconisez-vous?
La France doit arrêter de déposer du lisier et le traiter. Par exemple, les Pays-Bas ont plus de porcs que nous et traitent le lisier pour en faire des engrais. Mais la France reste dans le déni en pensant que le nitrate n’a pas d’importance. Pourtant les eaux sont polluées et les gens payent. Nous sommes dans une situation de pollué-payeur alors qu’il faudrait appliquer le système de pollueur-payeur. Mais pour ça il faut du courage politique.