TECHNOLOGIENanomatériaux, méga-incertitudes

Nanomatériaux, méga-incertitudes

TECHNOLOGIECes matériaux présents dans un grand nombre de produits quotidiens devront désormais être déclarés par les industriels qui les utilisent...
Audrey Chauvet

Audrey Chauvet

Leur taille microscopique pourrait leur permettre de passer inaperçus mais les doutes qui résident encore sur leurs effets sur la santé humaine vont les obliger à se faire remarquer. Les nanomatériaux, ces matériaux d’une taille comprise entre un et cent nanomètres, sont de plus en plus utilisés dans les produits de consommation courante. Ils présentent toutefois des risques potentiels pour la santé qui ont motivé la création d’un registre national que les fabricants, distributeurs et importateurs doivent alimenter depuis le 1er janvier 2013. 20 Minutes passe les nanomatériaux à la loupe.

Où trouve-t-on des nanomatériaux?

Chaussettes anti-odeurs, tee-shirt permettant de recharger son portable ou tissus pare-balles: les applications des nanomatériaux sont extrêmement variées. Plus communément, on en trouve sous forme de poudre très fine dans les cosmétiques, les pansements, les vêtements de sport ou les emballages alimentaires pour leurs propriétés antibactériennes, mais aussi dans les sucres et sels alimentaires pour leur effet anti-agglomérant. Les industries de l'automobile, de la chimie, de la santé ou de l'électronique sont également de plus en plus intéressées par ces matériaux aux propriétés multiples.

Pourquoi font-ils peur?

Parce que leur impact sur la santé des consommateurs et des travailleurs qui les manipulent est encore mal connu. Les nanoparticules de dioxyde de titane par exemple, utilisées aussi bien dans les ciments que dans les crèmes solaires, ont été accusées par une étude du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) de perturber les fonctions cérébrales. L’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) explique que les nanomatériaux peuvent facilement être inhalés ou ingérés et pourraient ensuite «franchir les barrières biologiques (nasale, bronchique, alvéolaire…) et migrer vers différents sites de l’organisme via le sang et la lymphe (processus de translocation)». Problème: si on est désormais sûr que l’on en respire ou que l’on en avale tous les jours, «les connaissances sur la toxicité des nano-objets demeurent lacunaires», admet l’INRS.

Pourquoi les industriels doivent-ils les déclarer?

Dès mars 2010, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommandait «d’agir sans attendre au nom du principe de précaution», en rendant obligatoire la traçabilité des nanomatériaux. La déclaration, applicable depuis le 1er janvier 2013, permettra de «mieux connaître les substances mises sur le marché et leurs usages, de disposer d’une traçabilité des filières d’utilisation et d’une meilleure connaissance du marché et des volumes commercialisés», assure le ministère de l’Ecologie.

Et après la déclaration, que se passe-t-il?

Une fois les données collectées, l’Anses sera en charge de les gérer et de «guider les travaux de recherche et d’expertise sur les risques éventuels et les mesures de prévention à adopter». Les premières informations destinées au grand public seront publiées à la fin de l’année 2013. Avant peut-être la mise en place d’un étiquetage clair pour les consommateurs et l’interdiction de certains usages pour lesquels l’utilité des nanomatériaux serait faible par rapport aux dangers potentiels, comme recommandé par l’Anses.