La Ville de Paris aimerait allonger le congé paternité de ses agents

La Ville de Paris aimerait allonger le congé paternité de ses agents… mais attend le feu vert de l’Etat

Mic Mac« Nous sommes partants », explique Olivia Polski, adjointe aux Ressources humaines de la ville, qui cependant ne souhaite pas s’engager pour l’instant pour une telle mesure parce que « le cadre légal n’est pas là »
Aude Lorriaux

Aude Lorriaux

Alors que la ville de Lyon vient d’annoncer qu’elle allait instaurer un congé paternité de dix semaines pour ses agents et agentes, soit l’équivalent du congé maternité, des élus à la Ville de Paris aimeraient lui emboîter le pas. Deux groupes de la majorité viennent de déposer des vœux en ce sens. Une proposition qui séduit l’adjointe aux Ressources humaines Olivia Polski, qui cependant ne veut pas s’engager sur ce terrain sans un accord formel de l’Etat, craignant que ne se rejoue le bras de fer de 2021, qui avait abouti à l’annulation en justice des dispositions prises par la mairie pour diminuer le temps de travail de ses agents et agentes.

Le vœu du groupe Les Ecologistes veut s’appuyer sur les autorisations spéciales d’absence, qui sont des congés exceptionnels accordés aux fonctionnaires en dehors des congés annuels. La ville de Saint-Ouen a récemment utilisé ce motif pour la mise en place d’un congé menstruel. « Les premiers jours de vie sont déterminants pour l’équilibre d’un enfant et d’une famille » argue le texte, qui veut égaliser le congé du deuxième parent avec le congé maternité. « C’est une mesure qui va dans le sens de l’égalité entre femmes et hommes, beaucoup de choses se jouent dans les premiers jours de vie pour l’organisation familiale et la répartition des tâches domestiques », plaide Alice Timsit, l’élue qui porte le texte avec ses collègues du groupe.

Un autre texte du groupe communiste met en avant, outre le bénéfice en matière d'égalité entre femmes et hommes, l’avantage que représenterait une telle mesure pour recruter des agents et agentes, alors qu’une « crise de l’attractivité frappe la fonction publique territoriale ».

« Nous sommes partants »

La littérature scientifique est claire sur le sujet : des inégalités se créent ou se renforcent souvent dans cette période charnière, où la mère prend le plus souvent les rennes dans le soin et l’éducation de l’enfant, bénéficiant de plus de temps auprès de lui. De nombreux experts et expertes soulignent l’importance de la mise en place d’un congé de durée égale, « pour éviter la mise en place des rôles sexués dans la famille », comme l’expliquait par exemple Violaine Dutrop dans nos colonnes.

Pour toutes ces raisons, l’adjointe de la maire de Paris aux Ressources humaines, Olivia Polski, voit d’un bon œil ces propositions : « On est évidemment ouverts à tout cela, je vais faire passer le sujet dans nos prochaines instances de dialogue social. Sous réserve de l’accord des syndicats et du Conseil de Paris nous sommes partants pour expérimenter un congé paternité de même durée que le congé maternité ou en tout cas plus long que l’actuel congé, et que la charge soit mieux répartie entre les deux conjoints. »

Il va falloir patienter

Mais le problème, explique l’élue, est que la Ville de Paris n’en a théoriquement pas le droit : « Il n’y a pas de cadre légal dans le service public pour cela. » En avril, la maire de Paris a écrit à la Première ministre, Élisabeth Borne, pour lui demander l’autorisation d’octroyer un congé menstruel à son personnel, selon le même procédé d’autorisation spéciale d’absence. Mais le courrier n’a toujours pas reçu de réponse, selon la mairie. Contacté par 20 Minutes, le cabinet de la Première ministre, relancé plusieurs fois, n’avait toujours pas répondu à notre demande portant sur ce courrier à l’heure de la publication de l’article.

Du côté du ministère de la Transformation publique, c’est un peu flou. En mars, son cabinet expliquait que « les autorisations spéciales d’absence existent et qu’il est possible d’élargir leur motif ». Aujourd’hui il affirme qu’effectivement, « en droit, une collectivité ne peut pas créer individuellement une autorisation spéciale d’absence ». Mais selon le ministère, le périmètre de ces autorisations pourrait prochainement « évoluer » : « Le gouvernement est en train de travailler pour créer le bon vecteur pour reconnaître les règles douloureuses mais sans créer de discriminations », explique-t-on. Ce pourquoi la ville de Lyon ou la ville de Saint-Ouen n’ont pas eu de rappel à l’ordre. « S’il n’y a pas de sanction pour Lyon c’est parce que cette question-là est réelle », nous dit-on.

En bref, un congé paternité ou un congé menstruel ont toutes les chances de voir le jour à Paris, mais… pas tout de suite. En attendant, la ville a plutôt réussi à ce que ses agents s’emparent de ce droit, ce qui n’était pas toujours le cas auparavant. Olivia Polski précise que 98,8 % des agents de la Ville de Paris ont pris leur congé paternité en 2022, contre 75 % en 2021.