LOGEMENTLa crise du mal-logement se renforce à Paris et en Ile-de-France

La crise du mal-logement se renforce à Paris et en Ile-de-France

LOGEMENTL’antenne francilienne de la Fondation Abbé-Pierre a présenté son nouveau rapport sur le mal-logement dans la région
Mathilde Desgranges

Mathilde Desgranges

L'essentiel

  • La Fondation Abbé-Pierre a présenté les résultats de son dernier rapport sur le mal-logement en Ile-de-France, coécrit avec l’Institut Paris Région.
  • « On dénombre désormais 1,3 million de personnes mal logées dans la région, ainsi que 2,9 millions de personnes en situation de fragilité », affirme Eric Constantin, directeur régional de la Fondation Abbé-Pierre.
  • Selon lui, le mal-logement dans la région serait d’abord dû au manque de logements et au coût élevé des loyers.

«On a voulu faire le point sur ce qu’il s’était passé depuis 2019 », commence Eric Constantin, directeur régional de la Fondation Abbé-Pierre. Cette semaine, la Fondation Abbé-Pierre présente les résultats de son dernier rapport au sujet du mal-logement en Ile-de-France, coécrit avec l’Institut Paris Région. Deux ans après la publication du dernier rapport, « on a vu que les choses n’allaient pas vraiment mieux », souligne-t-il. Depuis, la crise s’est renforcée. Le nombre de personnes placées en structure d’urgence a augmenté de 80 %, de personnes hébergées dans des hôtels de 30 %, et le nombre de demandeurs de logements en situation précaire est en hausse de 10 %.

Dans la région, « on dénombre désormais 1,3 million de personnes mal logées, ainsi que 2,9 millions de personnes en situation de fragilité par rapport à leur logement. » Au total, les difficultés liées à l’habitat concernent un tiers des Franciliens.

« La moitié des logements passoires sont des locations »

La région représente seulement 18 % de la population nationale. Mais elle concentre 24 % des ménages vivant dans des passoires énergétiques, 34 % des demandeurs HLM, 39 % des ménages expulsés de leur logement, 46 % des personnes hébergés en structure et 60 % des ménages reconnus prioritaires au titre du Droit au Logement (DALO). La problématique du mal logement y est particulièrement ancrée, notamment en raison d’un nombre insuffisant de logements et de leur prix.



« De plus, et c’est une spécificité francilienne, la moitié des logements passoires sont des locations, surtout des locations privées, affirme Eric Constantin. Derrière cela, il y a donc des propriétaires qui sont peu enclins à rénover leurs logements. » Une situation qui devrait s’améliorer avec l’application de la loi Climat, qui prévoit que les logements ayant un diagnostic de performance énergétique (DPE) de la lettre G seront retirés du marché locatif en 2025, les F en 2028 et les E en 2034 (hors location saisonnière).

30 % des locations dépassent de l’encadrement des loyers

Si la Fondation reconnaît « des avancées » dans la politique de la mairie de Paris dans la régulation du parc locatif privé, notamment avec l’adoption de l’encadrement des loyers, elle souligne des mesures insuffisantes. « Plus de 30 % des locations privées restent au-dessus de l’encadrement des loyers à Paris », souligne Eric Constantin.

La mesure a aussi été adoptée en Seine-Saint-Denis, dans la Plaine Commune et dans l’Est Ensemble, deux structures intercommunales. Mais le directeur de la Fondation Abbé-Pierre souhaiterait un élargissement de l’encadrement des loyers à un large panel plus large de villes franciliennes.

Du retard sur la construction des logements sociaux

Après la chute provoquée par la crise sanitaire, « la production sociale de 2021 reste encore près de 20 % inférieure à son niveau de 2019, avec près de 23.000 logements locatifs “sociaux” agréés en Ile-de-France contre 28.594 en 2019, affirme la Fondation Abbé-Pierre en s’appuyant sur les chiffres du comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH). Cela ne représente que 73 % des objectifs fixés. »



En 2010, l’Etat et la région Île-de-France ont estimé devoir construire entre 32.000 et 37.000 logements par an pour atteindre les 30 % de logements sociaux dans la capitale d’ici 2030. Cette année, « l’objectif [fixé à 31.377] est en deçà de ces seuils, regrette Eric Constantin. L’Etat ne se donne pas les moyens » pour lutter contre le mal-logement. « Sachant que le nombre de logements réellement construits atteint rarement le seuil fixé », ajoute-t-il. A ce rythme, il semble peu probable que l’Etat remplisse ses engagements à horizon 2030.