Paris : « Le climat seul ne les motive pas »… A la manif Fridays For Future, on a cherché des lycéens et lycéennes
MOBILISATION•Il n’y avait guère foule à la manifestation organisée par le mouvement de grève mondiale pour le climatAude Lorriaux
L'essentiel
- Entre 50 et 100 personnes s’étaient donné rendez-vous à Paris vendredi pour réclamer une justice climatique.
- « 20 Minutes » a cherché à s’entretenir avec des lycéens et lycéennes, mais ils n’étaient pas présents en masse.
- « S’il y a un changement, il ne pourra pas venir que des jeunes », explique Inès, des Jeunes écolos, qui se sent un peu seule dans son lycée sur ce sujet.
On ne peut pas dire qu’il y avait une foule de lycéens et lycéennes à la manifestation ce vendredi en faveur du climat, et même pas foule du tout. Entre 50 et 100 personnes s’étaient donné rendez-vous, à 14 heures, en face de l’Académie du climat à Paris. Parmi lesquelles des élus et élues, des journalistes, et quelques lycéens et lycéennes, qu’il fallait bien chercher au milieu du rassemblement organisé par le mouvement Fridays for Future, lancé par Greta Thunberg en 2018, la première à avoir fait la « grève scolaire ».
« On est plus chaud, plus chaud que le climat ! » ou « Et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime, contre l’humanité » crient des militants et militantes, en brandissant une banderole #GenerationSacrifiée. A quelques mètres, un groupe de six ou sept jeunes femmes a confectionné son carton, avec un slogan décalé : « Il faut vraiment être un dinosaure pour investir dans les fossiles. » Elles viennent toutes du lycée franco-allemand de Buc, dans les Yvelines, et elles ont séché les cours pour venir ici.
« Il faut arrêter de culpabiliser les individus »
Devant le petit nombre de personnes réunies ici, Sarah, 16 ans, en première dans ce lycée, s’inquiète. « J’ai très mal vécu cet été, je suis catastrophée. Je pense qu’on peut agir par l’action, mais il n’y a pas d’action… », lâche-t-elle, un peu dépitée. Interrogée sur ses revendications, Rebecca, en terminale dans le même établissement, s’avoue démunie. « J’aimerais étudier en biologie environnementale pour mieux comprendre ce qui se passe et faire bouger les entreprises », dit-elle.
Le discours d’Emmanuel Macron, incitant à baisser la climatisation et le chauffage à 19 degrés, et le débat sur les jets privés, semblent avoir laissé des traces dans les consciences du petit groupe. « C’est important les petits gestes, mais le gros problème, c’est le réchauffement. Il faut arrêter de culpabiliser les individus quand le gros problème c’est l’avion de Bernard Arnaud qui fait des tonnes de CO2. Pourquoi est-ce que je me sens mal de prendre un avion une fois par an, quand lui c’est tous les week-ends ? », interroge Nell, 16 ans.
« Aucune action politique n’est à la hauteur des enjeux »
Présent avec d’autres élus, l’adjoint à la maire de Paris chargé de la transformation de l’espace public et des mobilités, David Belliard, abonde : « La question climatique se résout avec la question sociale. Quand on est dans un logement à 17 degrés, on ne peut pas baisser le chauffage. Les efforts doivent porter sur la population plus riche et les multinationales. » Plus loin, on croise la sénatrice écologiste Esther Benbassa, le député Nupes du Val-de-Marne Louis Boyard, la conseillère de Paris Raphaëlle Remy-Leleu.
Au micro, des porte-paroles de Fridays for Future semblent répondre aux critiques de David Belliard. « Aucune action politique n’est à la hauteur des enjeux », avertit une voix. C’est aussi le constat d’un lycéen appartenant aux « Jeunes écologistes Francilien·ne·s », qui voudrait « changer le système ». « Il faut arrêter le libéralisme et se diriger vers une société éco-socialiste. Je suis en faveur de la sobriété et de l’efficacité énergétique. Il faut décroître sur certains domaines, produire moins. Et se demander ce qu’il nous faut pour vivre décemment. Nous n’avons pas besoin de jets privés », clame Xander, 17 ans, étudiant dans un lycée à Évry.
« Je suis un peu toute seule dans mon lycée »
Xander n’a pas eu besoin de sécher, il a tout simplement demandé à sa professeure si elle acceptait de déplacer le cours, ce qu’elle a fait, nous dit-il. Mais il se sent bien seul dans cette lutte, car malgré cet arrangement, aucun de ses camarades de classe et aucun de ses amis n’a fait le déplacement : « Il y a une pensée écolo chez les gens de mon âge mais ils sont saoulés par le politique, explique-t-il. Le climat seul ne les motive pas. J’aimerais qu’on ne mette pas l’écologie dans un carcan de personnes qui prennent le vélo. Il faut ouvrir l’écologie à une écologie populaire, aux luttes féministes et à une écologie d’égalité », analyse-t-il.
Inès, elle aussi chez les Jeunes écolos, se sent également bien seule dans son combat. Elle n’a d’ailleurs pas osé faire sauter les cours, car personne dans son lycée privé de Charenton-le-Pont, ne s’y risquerait, nous confie-t-elle. Elle a donc sauté dans le métro juste après son dernier cours, et a pris la manif en cours de route. « Je suis un peu toute seule dans mon lycée. Je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un d’autre qui aille manifester dans ma classe. Et sécher les cours, sûrement pas ».
Loin des discours très positive attitude qu’on entend sur la jeunesse et le climat, Inès se veut lucide. « Oui il y a une conscience écolo dans ma génération, mais toute la génération Z n’est pas très écolo. Et puis quand je regarde les chiffres de participation des jeunes aux élections. Sur les questions d’engagement politique, qui sont à mes yeux importantes, il n’y a pas assez de mobilisation. » Et Inès de conclure : « S’il y a un changement, il ne pourra pas venir que des jeunes. »
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