Internat de Sourdun: Entre cours, activités et vie en communauté
REPORTAGE•Visite au coeur de ce laboratoire éducatif...Hélène Colau et Alexandre Sulzer
9h, samedi dernier. Les voitures défilent à l'entrée de l'ancienne caserne. Des élèves sur leur 31 naviguent d'un baraquement à l'autre, guidant des parents venus découvrir l'internat avec des ados à l'enthousiasme variable. Du club scientifique à l'équitation, les activités proposées ont de quoi séduire. «Je voulais m'éloigner de Montfermeil (93), voir autre chose, confie Audrey. Je suis accro au théâtre. S'il n'y avait pas cet atelier, je ne voudrais pas venir ici.» Les locaux rencontrent moins l'adhésion. «C'est naze ici, y a pas de douche ni de toilettes individuelles, y a rien», râle un postulant. Mais son guide, qui vient de passer sept mois à Sourdun, le rassure: «Venir ici, ça a complètement changé ma vie.»
«En ZEP, j'aurais plongé»
Pourtant, il y a quelques mois, les ados projetés dans ce monde cadré, contraignant, ne voyaient pas forcément d'un bon œil cette rupture radicale avec le milieu familial. Seta, élève de seconde originaire de Vitry-sur-Seine (94), a intégré l'internat dans l'espoir de devenir magistrate. Jogging, iPod et moue boudeuse, elle effectue des «travaux d'intérêt général» au réfectoire, l'équivalent des retenues à Sourdun. «En ZEP, je sais que j'aurais plongé, avoue-t-elle. Sur la brochure, ils parlaient de la piscine, de la salle informatique… c'est ça qui m'a donné envie. Mais ici, on ne nous respecte pas. On nous dit de faire des trucs, et quand on demande pourquoi, on nous répond que c'est comme ça et c'est tout.»
L'internat a aussi ses bons côtés. Aristote et Islam, qui viennent de la même cité de Dammarie-lès-Lys (77), partagent une chambre. L'un a des lacunes en maths, et l'autre, arrivé de Turquie il y a trois ans seulement, peine un peu en français. «On a fait exprès de se mettre ensemble, pour s'entraider», assure Aristote tout en passant le balai dans sa chambre impeccable.
Prise de notes dès la 3e
L'atout de Sourdun, c'est justement cette solidarité et aussi le suivi personnalisé des élèves, tout au long de la journée. Comme les classes ne comptent qu'une vingtaine de jeunes, les profs sont plus disponibles. En cours de français, l'enseignante ne dicte pas, comme c'est habituellement le cas. Les 3e prennent déjà des notes. La participation est intense, aussi bien pour commenter Le Déserteur de Boris Vian qu'une planche de bande dessinée de Tardi.
Le système n'est pas parfait pour autant. La moyenne de Katia a baissé de cinq points au cours des deux premiers trimestres. «Je voulais aller en 1re S, mais ça ne va pas être possible. Ici, on travaille beaucoup, je crois que ça ne me convient pas», souffle-t-elle. «L'important, c'est que la plupart d'entre eux ont vraiment décollé, souligne Jean-François Bourdon, le proviseur. Et certains jeunes, plutôt tristes à leur arrivée, se sont épanouis.» A voir les mines radieuses lors des portes ouvertes, on a envie de le croire.