la comédie italienne rit jaune
« Il n'y avait qu'un fou pour se lancer là-dedans », admet Attilio Maggiulli, en regardant, avec nostalgie, les masques, costumes et éléments de décors, qui jonchent les couloirs de son théâtre. Le directeur de la Comédie italienne, située rue de la ...Magali GruetPhotos : Sébastien Ortola
« Il n'y avait qu'un fou pour se lancer là-dedans », admet Attilio Maggiulli, en regardant, avec nostalgie, les masques, costumes et éléments de décors, qui jonchent les couloirs de son théâtre. Le directeur de la Comédie italienne, située rue de la Gaîté dans le 14e, a fondé ce lieu unique en 1980 après des études au Piccolo Teatro de Milan et un passage à la Comédie-Française. Un pari insensé à l'époque et aujourd'hui menacé, faute de subventions. Il y a deux mois, la dotation du ministère de la Culture lui a été retirée. La manne était indispensable pour la survie du théâtre. « Ça a été un choc. On ne m'a pas expliqué pourquoi. Il n'y a pas deux lieux comme celui-ci. C'est lamentable de le laisser crever », s'emporte cet Italien de 63 ans.
Attilio Maggiulli tente désormais de récupérer les fonds nécessaires par ses propres moyens. Dans son théâtre, quelques portants proposent des costumes à 50 euros ou à 100 euros. « Je vends des habits, des masques, des accessoires. Pas parce que j'en ai envie, mais parce qu'on a besoin d'argent pour payer les arriérés de charges sociales », souffle -t-il. Il ne vend « qu'aux théâtres, pas aux brocanteurs ou aux châtelains qui veulent faire des bals costumés ».
Attilio Maggiulli vit mal la situation. « Il n'est pas question que ce théâtre devienne une usine à gaz pour survivre, qu'il soit obligé de se prostituer pour faire rentrer de l'argent ! » En attendant, il frappe à toutes les portes. « La Mairie de Paris nous donne un peu, la région aussi. J'ai écrit à Mme Sarkozy, car elle est du même patelin que moi, près de Turin. »
Attilio Maggiulli a investi une bonne partie de sa vie dans cet ex-commissariat désaffecté qui lui a permis d'héberger sa passion pour la commedia dell'arte baroque fantastique. En trente ans, « environ 80 spectacles » y ont été montés et une école de théâtre a été créée, qui a formé de nombreux comédiens - parmi lesquels « Alexandra Lamy, la blonde d'"Un gars une fille" ». Des artistes y ont aussi appris la création de masques selon des techniques centenaires.
« On a joué du classique, du Goldoni, du Gozzi. Mais on a aussi créé des pièces d'actualité. » Certaines lui ont valu des soucis. Si Le Fabuleux Destin de Silvio Berlusconi se joue sans encombre, George W. Bush ou le triste cow-boy de Dieu lui vaut une visite de courtoisie et quelques coups en 2003. Aujourd'hui, il en rit. « Notre travail est une sorte de BD de notre époque. Sarkozy, Berlusconi, Bush, c'est du pain bénit pour le théâtre. » W
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