À LA « RU »Alternatives grasses et note salée pour les étudiants privés de resto U

Montreuil : Des alternatives grasses et une note salée pour les étudiants de l’IUT privés de restaurant universitaire

À LA « RU »A Montreuil, le prestataire privé en charge de la restauration de l’IUT de l’université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis a décidé de ne pas rouvrir à la rentrée
Romarik Le Dourneuf

Romarik Le Dourneuf

L'essentiel

  • Fermé depuis le début de la crise sanitaire, le restaurant universitaire de l’IUT de Montreuil n’a pas rouvert ses portes depuis, le prestataire le jugeant trop peu rentable.
  • Les étudiants n’ont pour alternatives qu’un supermarché et des fast-foods, les obligeant, le plus souvent à manger des repas froids et peu équilibrés.
  • Ce type de situation commence à se multiplier selon le syndicat étudiant Unef, en raison du manque de moyens octroyés par l’Etat au Crous.

«Super U ou McDo ? » À l’heure du déjeuner, des dizaines d’étudiants de l’Institut universitaire de technologie (IUT) de Montreuil (Seine-Saint-Denis) s’arrêtent sur le trottoir, devant l’établissement, pour se poser cette même question tous les jours. Le supermarché semble obtenir les faveurs de bon nombre d’entre eux. Ils descendent la rue, tel une procession pour aller acheter sandwichs sous vide, chips et autres salades industrielles.

Il ne faut pas voir là un choix de régime alimentaire, les solutions de restauration manquent tout simplement pour les 600 étudiants de cet IUT, antenne de l’université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis. Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, le prestataire privé chargé de la restauration, depuis 2016 et l’abandon du centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous), a décidé de garder les portes du « RU » fermées, justifiant la crise sanitaire dans un premier temps, avant d’expliquer que celui-ci n’était pas assez rentable pour rouvrir.

« On aimerait manger chaud, au chaud et un peu plus équilibré »

« Il n’y a pas grand-chose dans le quartier, et ce n’est pas très varié », explique Justine, énumérant le Super U, le McDonald’s, une boulangerie et un kebab pour seules solutions à proximité, « plus loin, ce ne serait pas tenable sur le temps de la pause déjeuner ». Ces alternatives, appréciées sur le court terme, les ont lassés depuis longtemps, comme l’explique un étudiant, salade et bouteille de soda en main : « On aimerait manger chaud, au chaud et un peu plus équilibré. » « Et surtout pour moins cher ! », rebondit l’une de ses camarades.

« Au resto U, le repas est à 3,30 euros pour les étudiants. Et même à 1 euro pour les étudiants boursiers, rappelle cette étudiante, même en prenant le minimum, au supermarché, ça coûte vite 5, 6 ou 7 euros. » Ce qui correspond, pour ces jeunes aux revenus limités, à une note de 100 à 200 euros de plus par mois, juste pour s’alimenter. Il est possible bien entendu de préparer, chez soi, une gamelle pour le déjeuner, mais encore faut-il pouvoir la réchauffer. Et seuls deux micro-ondes sont à disposition des 600 étudiants, soit une file d’attente trop longue pour avoir le temps de manger sereinement ensuite.

Pas de réouverture envisagée

Avec 80 places assises, cette salle est d’ailleurs trop petite pour accueillir tous les étudiants, qui doivent souvent se rabattre sur les couloirs et halls de l’établissement. Aïssa, emmitouflée dans sa doudoune mange une salade sur un rebord de fenêtre avec une camarade. « On n’en peut plus, on commence déjà à geler. Ça va être long l’hiver », éclate-t-elle de rire, pendant que d’autres continuent à braver le froid à l’extérieur.

Si beaucoup arrivent à garder le sourire face à cette situation, ils n’en sont pas moins révoltés. « C’est injuste, on est des étudiants, comme les autres, ce n’est pas normal qu’on n’ait pas un restaurant, une cantine. » Pour plaider leur cause, les étudiants ont alerté toutes les instances possibles. En premier lieu, le Crous de Créteil, en charge de la restauration étudiante. Contactée par 20 Minutes, l’organisation n’a pas souhaité répondre aux sollicitations, se contentant juste de répéter ce qui a déjà été répondu aux étudiants : « Il n’est pas question pour l’heure de rouvrir le restaurant universitaire. Pour le moment, il est seulement envisagé d’installer un distributeur de plats à réchauffer sous forme de barquettes. »

Une situation loin d’être isolée

« C’est pourtant leur mission, après les aides sociales et le logement pour les étudiants, nous explique Imane Ouelhadj, vice-présidente en charge des affaires sociales du syndicat étudiant Unef, le problème c’est que l’Etat ne leur donne plus les moyens de l’assurer. »

Bien qu’impuissante sur le sujet de la restauration, l’université Paris 8 dénonce une « rupture d’égalité » entre les étudiants d’une grosse structure comme la faculté de Saint-Denis et une plus petite « donc difficilement rentable » comme l’IUT de Montreuil. Même la mairie, contactée par 20 Minutes, exhorte les parties concernées à régler la situation et prospecte « pour trouver des alternatives » en attendant une solution plus pérenne.

« Il est urgent de s’attaquer à la précarité étudiante qui n’a fait qu’exploser avec le Covid-19. La seule solution viable, c’est de redonner des moyens au Crous », explique Imane Ouelhadj. Selon cette étudiante, Montreuil n’est qu’un exemple parmi beaucoup d’autres en Île-de-France, et dans tout le pays. « Le cas de l’université Paris-Saclay​ est révélateur du problème, un grand nombre de petites structures éloignées les unes des autres et beaucoup sont ou vont se retrouver dans cette situation. »