Paris mise sur « l’hyperproximité » pour décentraliser la capitale
MIEUX VIVRE LA VILLE•Propreté en partie à la charge des maires d’arrondissement, cours d’école cœur de quartier…, la ville de Paris veut décentraliser la capitale. L’opposition doute des mesures annoncées par Anne Hidalgo et son équipeAude Lorriaux
L'essentiel
- La décentralisation de Paris sera au menu du prochain Conseil de Paris de mercredi à vendredi.
- Les maires d’arrondissement devraient avoir plus de latitude décisionnelle dans les marchés publics et sur les services administratifs. Police et propreté seront aussi largement pilotées au niveau de l’arrondissement.
- Le groupe des Républicains, centristes et indépendants dénonce des mesures « creuses ».
C’est pour le premier adjoint d’Anne Hidalgo un « tournant historique » : la ville de Paris s’apprête, lors du prochain Conseil de Paris des 2, 3 et 4 juin, à transférer plus de pouvoir aux maires d’arrondissement, tout en développant en même temps plus de service dans les quartiers, dans le cadre de ce qu’elle appelle la « ville du quart d’heure ».
Concrètement, cela passe par la création dans chaque arrondissement d'un poste de directeur général adjoint chargé de coordonner les services qui gèrent l’espace public. Autre nouveauté, les directions générales d’arrondissement seront rattachées directement au secrétariat général de la ville, pour « cranter leur autorité fonctionnelle » sur les services déconcentrés, a expliqué Emmanuel Grégoire en conférence de presse ce jeudi 27 mai.
Police et propreté pilotées au niveau de l’arrondissement
Sur plusieurs sujets, la ville entend désormais procéder au niveau hyperlocal : sur la sécurité, alors qu’une police municipale dont les agents sont actuellement en formation est annoncée pour la rentrée. La ville assure que le pilotage de la police municipale se fera au niveau de l’arrondissement.
Sur la propreté, conformément au souhait d'Anne Hidalgo, la mairie annonce la création de responsables de quartier chargés de veiller à l’entretien des rues. Les permis végétalisés seront désormais accordés par les mairies d’arrondissement. Certains marchés passés par la ville, comme ceux pour enlever les graffitis et tags, seront désormais décidés au niveau local. Une ligne budgétaire sera directement gérée par les maires d’arrondissement. « L’objectif est de faire en sorte que le maire d’arrondissement soit le pilote à même de décider quelles sont les priorités dans son arrondissement », a complété Colombe Brossel, adjointe chargée de la propreté de l’espace public.
« Plateaux artistiques de proximité » et écoles ouvertes sur le quartier
Enfin la mairie promet un « nouveau socle de service en hyperproximité », selon les mots d’Emmanuel Grégoire, où l’école sert de référentiel, devenant la « capitale du quartier ». Soixante-quinze cours d’écoles et de crèches seront ouvertes sur leur quartier, en particulier le samedi, « d’ici septembre », pour devenir des lieux de convivialité, de rencontres entre les habitants et les associations. C’est légèrement plus que les 68 établissements déjà annoncés mi-mai.
Des « plateaux artistiques de proximité » accueilleront des activités artistiques des grandes institutions culturelles de la capitale, en particulier dans les quartiers qui n’en sont pas dotés, et des points d’accès aux livres seront créés. Enfin une maison des solidarités sera créée dans chaque arrondissement pour les habitants sollicitant une aide sociale.
Des annonces « creuses » pour l’opposition
Des mesures qui n’ont pas satisfait le groupe Républicains, centristes et indépendants, notamment en matière de propreté, qui demande une « latitude totale pour passer des marchés publics et pour expérimenter des techniques de nettoyage et de maintien de la propreté 7/7 et 24/24 ». Plus profondément, le groupe d’opposition estime que la mairie de Paris tend un piège aux mairies d’arrondissements, en se « débarrassant » de la compétence propreté « sans déléguer les moyens humains et financiers nécessaires à son exercice ».
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Sur la ville du quart d’heure, les Républicains, centristes et indépendants sont tout aussi sceptiques. Ils et elles estiment que ces annonces sont « creuses » et risquent tout au plus de créer des communautés en forme de ghettos dorés, « où la rue serait finalement privatisée et accaparée par une minorité » de Parisiens et Parisiennes. « La ville du quart d’heure est pour nous un repli sur soi, explique , à 20 Minutes Aurélien Véron, porte-parole du groupe Changer Paris. On passe d’un culte de la mobilité des échanges vers un culte de la proximité et de la lenteur, et finalement de l’entre-soi, où le message est : si vous ne venez pas en métro vous n’êtes pas le bienvenu ».
Alors que la ville de Paris est confrontée à une vaste campagne de critiques sur sa gestion de la propreté, sous le mot-dièse #saccageParis, ces mesures suffiront-elles à endiguer le mécontentement ?