Deux ans après l'incendie de Notre-Dame de Paris, où en est-on ?

Incendie de Notre-Dame de Paris : Reconstruction, enquête… Deux ans après, où en est-on ?

CHANTIERChantiers à l’intérieur et à l’extérieur de la cathédrale, coûts, enquête sur l’origine de l’incendie… On fait le point
Notre-Dame de Paris: Deux ans après l'incendie, où en est le chantier?
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • Il y a deux ans jour pour jour, le toit de Notre-Dame de Paris partait en fumée, faisant peser le risque d’un effondrement de la cathédrale.
  • Aujourd’hui, ce risque est désormais écarté, mais le chantier promet d’être long. Sans doute plus long que l’objectif de 2024 donné par Emmanuel Macron.
  • La Mairie de Paris réfléchit par ailleurs à une requalification de l’esplanade de la cathédrale au-delà de 2024.

Deux après l’incendie, Notre-Dame de Paris ressemble toujours à une seconde dame de fer dans la capitale, entourée d’échafaudages. Il ne s’agit néanmoins plus aujourd’hui du dédale de fer éventré d’après l’incendie, mais bien de ce qui va servir à la reconstruction de l’édifice. Une reconstruction qui n’a en réalité pas encore commencé.

20 Minutes fait le point sur les chantiers autour et dans la cathédrale, les coûts et l’enquête sur l’origine de l’incendie.

Où en est le chantier ?

Deux ans après l’incendie, la reconstruction n’a, on l’a dit, pas commencé. Et pour cause : le démantèlement de l’échafaudage qui avait en partie fondu au-dessus de la cathédrale a été achevé seulement fin 2020. Une plateforme a été installée à la place, au-dessus de la nef. L’édifice est aussi protégé des intempéries par une sorte de « parapluie ». Il faudra encore quelques mois, jusqu’à la fin de l’été, pour terminer la phase de stabilisation et de préservation de l’édifice. Cela ne fait d’ailleurs pas si longtemps que le risque d’effondrement est écarté : la cathédrale est étayée de tous les côtés ou presque.

Notons néanmoins que deux des vingt-quatre chapelles de la cathédrale, « très abîmées par la pollution, mais aussi par des fuites d’eau », comme l’explique sur France Info le recteur de la cathédrale, Mgr Patrick Chauvet, ont déjà été rénovées. Il a été décidé de reconstruire « à l’identique » la charpente d’origine en bois. Idem pour la flèche construite par Violet-le-Duc au XIXe siècle.

Reste une question pour le toit : Y aura-t-il à nouveau un toit en plomb, qui a entièrement fondu et en partie pollué le secteur ? D’après le recteur de la cathédrale, c’est bien avec du plomb que les Monuments de France préconisent de restaurer les monuments comme Notre-Dame. Une autre option serait de passer au zinc, mais « il y a aussi, malheureusement, une pollution avec le zinc », rappelle Mgr Patrick Chauvet.

Combien ça coûte ?

On se souvient de l’immense afflux de dons, il y a deux ans, après le choc. 833 millions d’euros ont été envoyés ou promis, par des particuliers ou des grandes entreprises. On ne sait pas encore très bien si cela sera suffisant et on ne devrait pas le savoir avant longtemps, tant les prévisions sur ce type de chantier sont aléatoires, qui plus est en temps de pandémie.

Mais certains et certaines s’élèvent déjà pour dire qu’il y aurait… trop d’argent. Mercredi, au Sénat, la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, n’est pas allée jusque-là, mais elle a tout de même déclaré qu'« à l’heure actuelle, les sommes récoltées nous permettent d’envisager tranquillement ce chantier ». Ce dont on est sûr pour l’instant, c’est que « plus de 100 millions d’euros » ont déjà été utilisés, disait Guillaume Poitrinal, le président de la Fondation du patrimoine, sur France Info. Plutôt 165 millions, d’après LCI.

Le pari de 2024 sera-t-il tenu ?

Au lendemain de l’incendie, Emmanuel Macron annonçait vouloir « rebâtir » Notre-Dame en cinq ans, pour 2024, année des Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Deux des cinq années sont déjà écoulées, et dans les bouches des responsables du chantier, le mot « rebâtir » a laissé la place au mot « rouvrir ». Jeudi matin sur France Inter, Jean-Louis Georgelin, le patron de l’établissement public chargé de chapeauter le chantier, a reconnu que « la mission est difficile ». « Il faut se concentrer sur l’objectif de rendre la cathédrale au culte et à la visite en 2024. C’est ce que veut le président de la République et nous tiendrons le délai. » Reste donc à voir ce que l’on entend par « rouvrir ».

Sur France Info, le recteur de la cathédrale, Mgr Patrick Chauvet, dit avoir « bonne espérance » de pouvoir à nouveau organiser « régulièrement » des messes dans Notre-Dame dans trois ans. Pour les touristes (10 millions par an avant l’incendie), ça sera peut-être plus compliqué : « Je ne peux pas me permettre de faire entrer des gens s’il y a encore des échafaudages », prévient-il. Si les touristes sont de retour dès 2024, ça ne sera de toute façon pas au rythme d’avant, puisqu’il est certain que les travaux ne sont pas finis, au moins à l’extérieur du bâtiment. « Il va falloir même des années pour achever un tel chantier, constate Mgr Patrick Chauvet. Pour refaire les arcs-boutants, on m’avait dit qu’il y en avait pour dix ans. »

Vers une requalification du quartier ?

Au lendemain de l’incendie, Anne Hidalgo avait annoncé une contribution à hauteur de 50 millions d’euros de la Ville pour la restauration de la cathédrale. Mais « en accord avec l’État », selon elle, cette somme sera finalement consacrée au réaménagement des abords du site, et notamment du parvis. Les architectes seront choisis sur concours à l’issue d’une « consultation très large », avec le diocèse notamment. « Les citoyens seront donc au cœur du processus de sélection de l’équipe lauréate par un jury, au printemps 2022 », promet la maire dans La Croix ce jeudi.

Anne Hidalgo veut un parvis « beaucoup plus accueillant » et « restreindre la place de la voiture » autour du site. Propriété de la ville, le parking souterrain situé sous le parvis, fermé depuis l’incendie et dont l’exploitant doit être indemnisé, doit devenir « un lieu chaleureux où les visiteurs trouveront une conciergerie et d’autres services pratiques ». Ce réaménagement pourrait permettre un accès par les quais de Seine, « par des bateaux-mouches ou des bateaux-taxis », selon Anne Hidalgo. Le calendrier dépendra de l’achèvement des travaux de la cathédrale elle-même. Le premier adjoint en charge de l’Urbanisme, Emmanuel Grégoire, a dit à l’AFP son espoir de commencer le réaménagement « à partir de 2024 ».

Et l’enquête sur l’incendie ?

Deux ans après, les enquêteurs ont terminé leurs investigations dans les décombres, mais une longue phase d’analyse des prélèvements doit encore s’étendre sur plusieurs mois pour essayer de déterminer l’origine du sinistre. « Dans l’état actuel des choses, il n’est pas possible d’affirmer qu’on sera en mesure de dire un jour de manière certaine ce qui a pu être à l’origine de l’incendie », vu notamment l’ampleur des dégradations causées par le feu, observe une source auprès de l’AFP.

En juin 2019, au terme de l’enquête préliminaire, le procureur de Paris avait indiqué privilégier la piste accidentelle. Rien ne semble depuis accréditer la piste criminelle. « Pour l’instant, on reste sur les mêmes thèses : le mégot, le court-circuit », indique la source proche de l’enquête, estimant encore qu’il est « trop tôt » pour dire qu’une de ces deux options est privilégiée.