A quoi va servir la « Maison des coursiers » à Paris ?
SOCIAL•Lors du Conseil de Paris qui s’ouvre mardi, un amendement sera déposé dans le cadre du budget 2021, pour obtenir une subvention afin de faire fonctionner la future « Maison des coursiers » prochainement ouverte dans le 18e arrondissement
R.L.
L'essentiel
- Barbara Gomes porte le projet de la Maison des coursiers. « Les plateformes refusent d’assumer leur rôle d’employeur. L’idée est donc d’avoir un espace dédié, un refuge pour les coursiers », explique la conseillère de Paris (PCF).
- Cette halte sera située dans le 18e arrondissement, a priori sur le boulevard Barbès, en lieu et place d’une ancienne boutique EDF.
- Une subvention de fonctionnement doit être votée au prochain Conseil de Paris qui s’ouvre ce mardi.
Ils roulent. Qu’il vente, qu’il pleuve, ils roulent pour livrer des burgers, des sushis, des pizzas et des poke bowl dans les entreprises et les immeubles. Et entre deux courses, ils attendent dans la rue. En première ligne lors des différents confinements, ils sont même de plus en plus nombreux à arpenter les rues et à se partager la clientèle. Et ce, sans pause. Face à ce constat, les élus communistes parisiens, avec en tête la conseillère Barbara Gomes, ont décidé de prendre le problème à bras-le-corps et de créer la Maison des coursiers dans la capitale. Une première. Cette halte sera située dans le 18e arrondissement, a priori sur le boulevard Barbès, en lieu et place d’une ancienne boutique EDF.
Si le projet a été adopté au conseil d’arrondissement du 18e arrondissement fin novembre, un amendement sera déposé lors du Conseil de Paris qui s’ouvre ce mardi, dans le cadre du budget 2021, pour obtenir une subvention de 45.000 euros afin de faire fonctionner cette future Maison des coursiers aux multiples fonctions.
« Retrouver en dignité »
« Les plateformes refusent d’assumer leur rôle d’employeur. L’idée est donc d’avoir un espace dédié, un refuge où les coursiers pourront se retrouver, se reposer, discuter, s’abriter du froid, avoir accès à douches et sanitaires. En fait, de retrouver de la dignité », détaille Barbara Gomes. Cette « maison » sera gérée par des personnes de l’association Coopcycle, fédération de coopératives de livraison à vélo. Le lieu doit également permettre un accompagnement professionnel et social. « Cet espace leur permettra aussi de connaître leurs droits, leurs accès à la santé, et d’être éventuellement orientés professionnellement pour sortir des griffes de ses structures. Actuellement, c’est un travail précaire en zone de non droit », abonde Nicolas Bonnet-Oulaldj, président du groupe PCF au Conseil de Paris. « Nous sommes encore au stade d’expérimentation mais c’est un message fort de la ville de Paris. On dit "vous ne pouvez plus continuer à précariser notre ville" », reprend Barbara Gomes.
Les livreurs pourront ainsi aller aux toilettes, boire un café, et surtout discuter, se structurer. « Ce sera un lieu de lien social. Actuellement, s’ils ont du mal à défendre leurs droits c’est parce que nous sommes dans un individualisme organisé par ces plateformes », conclut Nicolas Bonnet-Oulaldj. Barbara Gomès précise : « Ils pourront ainsi tisser un lien de confiance et créer un collectif ».
Vers d’autres Maisons des coursiers ?
L’idée serait davantage que cette Maison des coursiers n’existe plus dans les années à venir et que les plateformes « assument leur rôle », indique les élus. Mais à l’heure actuelle, ils espèrent adresser un message fort. « Notre initiative est de porter ce projet politiquement, en espérant que cela inspire d’autres élus et villes de France. Et d’un autre côté, nous souhaitons que l’Etat contraigne les plateformes à respecter le droit du travail », indique Barbara Gomès. Cette semaine, à Bordeaux et à Lyon, des livreurs ont demandé à être requalifiés en salariés des plateformes et en CDI.
Notre dossier sur Paris
Après avoir défendu la mise en place d’une plateforme anti-Amazon, les élus communistes espèrent désormais que pour le secteur de la livraison la ville s’engage vers un modèle davantage tourné vers des systèmes de plateformes collaboratives. En attendant, cette première Maison des coursiers pourrait ouvrir ces prochains mois. Contacté par 20 Minutes, Deliveroo n’a pas répondu à nos sollicitations. De son côté, Uber Eats ne fait pas de commentaire sur l’initiative mais rappelle que « chaque année on mène une consultation auprès des livreurs et le souci qui a été remonté c’est le sujet du temps d’attente devant les restaurants. C’est un sujet sur lequel on veut progresser pour que le temps d’attente soit réduit ». A l’appel de collectifs, les livreurs seront, eux, en grève nationale ce dimanche pour demander une amélioration de leurs conditions de travail.