Paris : Dans la Seine, neuf espèces sont à surveiller
LE NOUVEAU COURS DE LA SEINE•Le saumon est revenu, on attend la loutre et on a peur pour l’anguille... Retour en images sur les espèces emblématiques de poissons, de mammifères et d’oiseaux du bassin de la SeineAnna Fonters
L'essentiel
- Les poissons migrateurs sont les grandes victimes de l'activité humaine.
- Au début du XIXème siècle, on pouvait voir un marsouin ou un phoque veau-marin traverser Paris.
- 39 % des espèces de poissons d’eau douce sont menacées ou quasi menacées de disparition.
Alors que des espèces ont déjà disparu du bassin de la Seine comme l’esturgeon ou le marsouin, d’autres sont aujourd’hui menacées, à l’instar de l’anguille. Mais certaines, comme les phoques ou les saumons, nous réservent encore bien des surprises…
Le marsouin
Des marsouins étaient vus à Paris jusqu’au début du XIXe siècle. Victimes de captures accidentelles, des passages de bateaux et de barrages (notamment celui de Poses, dans l’Eure, construit entre 1878 et 1881), ce cétacé a quasiment disparu. Il est de nouveau en augmentation sur les côtes françaises (et à l’embouchure de la Seine) mais avec la pollution et les ressources alimentaires insuffisantes, il ne remonte même plus jusqu’à ce barrage.
Le saumon atlantique
Depuis le début des années 2000, on peut de nouveau apercevoir des saumons atlantiques dans la Seine (grâce à l’amélioration de la qualité de l’eau), et une centaine traverserait Paris chaque année. Classé comme espèce « quasi menacée »*, c’est un poisson migrateur, qui fait des allers-retours entre rivière et mer. Sur son parcours, les menaces sont multiples : pêche, pollution, barrages…
La loutre d’Europe
Espèce semi-aquatique, la loutre d’Europe a fréquenté les rives de la Seine et y a nagé, probablement jusque dans les années 1960. Considérée comme nuisible (car piscivore), elle a longtemps été chassée avant de devenir espèce protégée en 1976. Grâce à cette protection et à l’amélioration de la qualité de l’eau, elle pourrait revenir bientôt puisqu’elle a déjà reconquis la Loire et passe près du canal de Briare (reliant les fleuves de Loire et de Seine).
Le phoque veau-marin
Essentiellement marin, le phoque veau-marin est aussi une espèce d’eau douce qui a remonté la Seine au moins jusqu’à la construction du barrage de Poses (Eure) en 1878. Victime de pollution et des pêcheurs, il réapparaît pourtant sur les côtes françaises (Manche, Baie de Somme…). Certains remontent la Seine près de l’embouchure jusqu’à Elbeuf (Seine-Maritime). Il pourrait un jour arriver jusqu’à Paris : en profitant par exemple de passer le barrage en même temps qu’une péniche ?
L’esturgeon européen
Poisson migrateur, l’esturgeon européen vit entre eau douce et mer et a disparu du bassin de la Seine depuis les années 1950. Il a été victime de pollutions, des barrages, et de la pêche (historiquement pour le caviar et aujourd’hui de capture accidentelle). La femelle doit atteindre environ 20 ans pour être mature, les cycles de reproduction sont donc longs. Classé « en danger critique »*, il a disparu de tous les fleuves européens, et sa dernière zone de reproduction se situe dans l’estuaire de la Gironde.
L’hirondelle de rivage
En Ile-de-France et en zone urbanisée, les hirondelles de rivage ne peuvent plus nicher dans leurs sites naturels d’origine, car les bords des rivières sont canalisés et bétonnés. Elles vivent donc dans des sites de substitution et des rives artificialisées.
Oiseau migrateur, elle a pour habitude de nicher dans les talus le bord des rivières et d’y creuser des tunnels dans lesquels elle vit en colonie.
L’anguille européenne
L’anguille européenne est classée « en danger critique »* car sensible à la pollution et victime de surpêche. Poisson migrateur, elle vit en eau douce et se reproduit en mer. Emportées sur les côtes européennes via le Gulf Stream (courant d’eau chaude venant du sud de la Floride), les anguilles risquent de moins rejoindre nos côtes, car le réchauffement climatique modifie la direction du courant.
L’ablette et le goujon
Ablettes et goujons avaient quasiment disparu de la Seine en 1980 mais sont revenus naturellement grâce à l’amélioration de la qualité de l’eau, et sont désormais très nombreux. Ces petits poissons sont classés en « préoccupation mineure », car leur risque de disparition de France métropolitaine est faible.
Notre dossier sur la SeineLe silure glane
Introduit du bassin du Danube par les pêcheurs il y a une quinzaine d’années, le silure glane est aujourd’hui présent dans tous les bassins français dont la Seine et il arrive que certains traversent Paris. Poisson-chat, c’est un sédentaire d’eau douce et un grand prédateur (pouvant faire jusqu’à quatre mètres de long). Espèce introduite invasive, il supporte bien l’eau chaude, mange un peu de tout, se reproduit facilement et pourrait avoir un impact néfaste sur les espèces autochtones de la Seine.
* Liste rouge des espèces menacées en France – Chapitre Poissons d’eau douce de France métropolitaine, UICN Comité français, MNHN, SFI & AFB (2019).
Données recueillies avec l’aide de : Florian Kirchner, chargé de programme « espèces » au comité français de l’UICN, Frédéric Malher, délégué régional de la LPO Ile-de-France, Patrick Haffner, mammalogiste (MNHM/OFB), Jean-Luc Baglinière, directeur de recherche à l’INRAE, Bernard Breton, président de l’Association Régionale de Pêche, Philippe Keith, professeur au Muséum national d’Histoire naturelle