SOCIETELes mères des lycéens humiliés à Mantes-la-Jolie réclament justice

Mantes-la-Jolie : Les mères des lycéens humiliés il y a un an réclament justice

SOCIETELes mères des 151 adolescents humiliés par des policiers à Mantes-la-Jolie (Yvelines) appellent à une marche à Paris, dimanche
Floréal Hernandez

F.H. avec AFP

L'essentiel

  • Une vidéo des ados agenouillés tournée par un policier avec le commentaire « voilà une classe qui se tient sage » avait été diffusée sur les réseaux sociaux et attisée la polémique.
  • Le Collectif de défense des jeunes Mantois appelle à marcher dimanche à Paris du quartier Barbès à la place de la République « contre l’arbitraire policier » et « pour la justice et la dignité ».
  • Une enquête administrative a conclu à l’absence de « comportements déviants de la part des policiers ».

Cent cinquante-et-un adolescents à genoux, les mains sur la tête sous le regard des policiers. Il y a un an, le 6 décembre 2018 au matin, ces images, aux abords de deux lycées de Mantes-la-Jolie (Yvelines) après trois jours de heurts et de dégradations en marge du mouvement de protestation lycéen, avaient provoqué un tollé et l'émoi.

L’image a fait le tour des réseaux sociaux : ces jeunes filles et garçons, âgés de 12 à 21 ans, à genoux, tête baissée, mains sur la tête, dans un jardin privé et l’arrière-cour d’une association, tenus en respect par des policiers avant d’être dispatchés dans des commissariats. Une vidéo tournée par un policier avec le commentaire « voilà une classe qui se tient sage », diffusée quelques heures plus tard, achève d’attiser la polémique.

Le fils de Myriam (elle se présente sous son seul prénom) est « resté agenouillé pendant trois heures et demie » avant de passer dans trois commissariats différents puis d’être finalement interrogé. Mais « sans avocat ni être filmé, ce qui annule la procédure normalement », relève la mère de l’adolescent, 16 ans aujourd’hui, qui n’a finalement pas été poursuivi.

Une intervention « nécessaire » selon un syndicat de police

« Les gens, quand ils voient les enfants à genoux, ils voient des jeunes de banlieue qui ont cassé. Et quand vous leur dites que ce n’est pas vrai, qu’ils sont ressortis avec des rappels à la loi pour plus de 90 % des enfants, ils disent : “Oui, mais il y a forcément quelque chose qui ne va pas” », peste Myriam. Soad Dahoumane, mère d’un lycéen, affirme que « la grosse majorité » sortait du lycée pour déjeuner, comme son fils. « C’est une minorité qui a foutu la zizanie devant le lycée et en fait, tout le monde a pris ! ».

Sollicitée par l’AFP, la direction de la police des Yvelines n’a pas souhaité s’exprimer, mais le syndicat Unsa Police a tenu à rappeler que « cela faisait plusieurs jours que de nombreux jeunes présents devant les établissements scolaires mettaient en danger leur intégrité physique et celle des habitants ». Pour le syndicat, l’intervention était « nécessaire » : « en face de 150 jeunes », les forces de l’ordre ont « figé la situation », pas pour « faire un exemple » mais pour pouvoir ultérieurement « déterminer le degré d’implication de chacun ».

La méthode employée choque toujours Yessa Belkhodja, porte-parole du Collectif de défense des jeunes du Mantois, créé au lendemain des interpellations : la position à genoux a été « vécue comme une posture d’humiliation ». Plusieurs familles ont porté plainte pour violences policières, emboîtant le pas au syndicat lycéen UNL, mais l’enquête préliminaire de la police des polices a débouché sur un non-lieu.

L’auteur de la vidéo sanctionné

L’UNL et le collectif ont décidé de redéposer plainte avec constitution de parties civiles, pour obtenir l’ouverture d’une instruction. « Trois jeunes seulement ont été auditionnés » par le parquet de Nanterre (où a été dépaysé le dossier à la demande des plaignants), déplore Me Arié Alimi, l’un de leurs avocats. Il demandera, dès qu’un juge d’instruction sera nommé, à ce que l’ensemble des interpellés soient entendus.

Parallèlement, soutenu par quelque 70 partis politiques, syndicats et associations, le collectif appelle à marcher dimanche à Paris du quartier Barbès à la place de la République « contre l’arbitraire policier » et « pour la justice et la dignité ».


Notre dossier Violences policières

Une enquête administrative a conclu à l’absence de « comportements déviants de la part des policiers ». L’auteur de la vidéo a été sanctionné administrativement et une action disciplinaire a été sollicitée. Une enquête du Défenseur des droits est toujours en cours.