Criminalité à Paris et en banlieue: Dis moi où tu vis, je te dirai ce que tu risques
DELINQUANCE•Où sont le plus souvent commis les vols ? Quels secteurs sont les plus régulièrement cambriolés ? Les chercheurs de l’Observatoire national de la délinquance ont passé au crible les infractions enregistrées par les services de police de Paris et la petite couronneCaroline Politi
L'essentiel
- Les vols et vols avec violence sont surreprésentés à Paris.
- Les cambriolages et vols de voitures sont plus fréquemment commis en banlieue parisienne.
- Le taux d'homicides volontaires reste faible dans l'agglomération.
C’est un travail de fourmi auquel s’est attelé l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Pendant de longs mois, ses chercheurs ont passé au crible les infractions enregistrées par les services de police de Paris et de la petite couronne entre 2016 et 2017. Soit près d’un million de faits au total. Leur rapport, publié ce jeudi sous la direction du géostatisticien Jean-Luc Besson, permet d’établir une véritable géographie de la délinquance dans le Bassin parisien. Sans grande surprise, les Hauts-de-Seine reste le département le moins criminogène. Paris, en revanche, enregistre le plus d’infractions. Et chaque secteur à ses spécificités.
Une surreprésentation des vols à Paris
Les vols simples, c’est-à-dire commis sans violence, constituent l’infraction la plus courante : 116.000 faits ont été enregistrés en 2016 dans le Bassin parisien. Et c’est dans la capitale que le risque de se faire chaparder son sac ou son téléphone est le plus élevé. Dans le 1er arrondissement, par exemple, les vols sont seize fois supérieurs à la moyenne. Et les chiffres sont à la hausse : selon l’observatoire de la délinquance, une augmentation de 4,4 % a été constatée à Paris entre 2016 et 2017. « On est face à une délinquance d’opportunité et Paris est une zone d’attraction : c’est là qu’il y a la plus grande concentration de population, de zones touristiques, de commerces… », note Jean-Luc Besson. Au regard des infractions consignées par les services de police, l’essentiel des méfaits a ainsi lieu dans les bars ou les restaurants (38 %), dans la rue (32 %) ou dans les commerces (22,5 %).
Les vols avec violence sont également plus fréquents dans la capitale qu’en banlieue. Parmi les quatre « hot-spots » identifiés – c’est-à-dire les zones concentrant cette infraction – trois se trouvent à Paris, le dernier au marché de Saint-Denis. Le quartier Barbès-Rochechouart, au nord de la capitale, arrive en tête de ce triste podium : plus de 2.000 faits ont été enregistrés dans la zone en 2017. Suivent ensuite les Halles et le secteur de la Roquette, près de Bastille. En épluchant les données collectées par les services de police, les chercheurs ont établi que dans l’immense majorité des cas, ces vols sont commis sans arme (96,5 %) et sur la voie publique (91 %). Quant aux victimes, on dénombre légèrement plus d’hommes (53 %) sauf en Seine-Saint-Denis où les femmes sont surreprésentées (63 %)
Vols de voiture et cambriolages en banlieue
Si Paris n’est évidemment pas épargné par les cambriolages – leur taux est d’ailleurs en augmentation de 9 % entre 2016 et 2017 – ils restent néanmoins moins fréquents qu’en banlieue. C’est en Seine-Saint-Denis que cette infraction est la plus constatée (10,5 cambriolages pour 1.000 logements) suivi de près par le Val-de-Marne (9,6). Dans certaines communes, à l’instar du Bourget ou des Pavillons-sous-Bois, on enregistre un taux frisant les 20 cambriolages pour 1.000 logements.
Or, les cambriolages attirent les cambriolages. Plusieurs études ont observé qu’il existe une probabilité accrue que les auteurs répètent leurs actes sur le même lieu ou dans un rayon de 100 mètres et ce, dans la semaine qui a suivi le méfait. En clair : si la maison de vos voisins a été « visitée », le risque que la vôtre le soit aussi dans les sept jours est particulièrement important. « Ça s’explique par l’homogénéité des lieux d’habitation : quand on cambriole une zone aisée, il y a des chances de trouver peu ou prou la même chose dans le pavillon d’à côté », explique le chercheur.
Le contraste Paris-banlieue est encore plus flagrant pour les vols d’automobiles. Les communes en périphérie de la petite couronne affichent les taux les plus hauts, note l’étude. En tête du palmarès : à nouveau la Seine-Saint-Denis talonnée par le Val-de-Marne. C’est d’ailleurs dans ce département que se trouvent les deux villes les plus touchées : à Rungis et à Ablon-sur-Seine, on dénombrait en 2017 6,4 et 5,2 vols de voiture pour 1.000 habitants. A Paris, en revanche, les taux sont les plus faibles. « C’est principalement lié au fait que les parkings parisiens sont mieux sécurisés et donc plus dissuasifs que ceux en banlieue », note le chercheur. Une tendance qui semble se confirmer car la capitale et les Hauts-de-Seine enregistrent les plus fortes baisses de vols de voiture entre 2016 et 2017 : – 15 %.
Un taux d’homicide volontaire très bas dans toute l’agglomération
Si les crimes font régulièrement la Une des journaux, ils n’en restent pas moins très rares à Paris et dans sa banlieue. En 2017, les chercheurs ont dénombré 81 meurtres dans l’agglomération, soit 1,2 faits pour 100.000 habitants. Un taux globalement stable, voire en baisse ces dernières années. Dans le détail, la Seine-Saint-Denis affiche le plus haut taux de meurtre (1,6 pour 100.000 habitants), suivi de près par Paris (1,5). Le Val-de-Marne et les Hauts-de-Seine enregistrent des taux inférieurs à un homicide pour 100.000 habitants.
Les violences sexuelles homogènes dans le Grand Paris
Comme les homicides, les violences sexuelles sont relativement homogènes dans l’agglomération. Si leur taux reste faible – 0,4 cas pour 1.000 habitants à Paris et dans la petite couronne – elles sont en forte augmentation entre 2016 et 2017 : +9,4 %. Dans le Val-de-Marne, la hausse est même supérieure à 17 %. Ces données sont néanmoins à prendre avec prudence, avertit le statisticien, en raison notamment de la réticence de nombreuses victimes à porter plainte en cas d’agressions sexuelles ou viol. La capitale reste néanmoins la zone qui concentre le plus de violences : dans les 1er, 2e et 4e arrondissements, le taux de violences sexuelles est 2,5 fois supérieur à la moyenne de l’agglomération. A l’inverse, dans certaines communes, à l’instar de Marnes-la-Coquette ou Santeny, aucun cas d’infractions n’a été recensé en 2017.