Paris: Des écoliers partent à la recherche des soldats morts pour la France
REPORTAGE•L’application « Mémoire d’homme », lancée en 2017 par Le Souvenir français, vient d’être mise à jour en intégrant plus de cent tombes de soldats inhumés au cimetière du Père-Lachaise à ParisJuliette Desmonceaux
L'essentiel
- L’application « Mémoire d’homme » géolocalise les tombes de soldats morts au combat, principalement pendant la Première Guerre mondiale.
- L’application a été lancée en 2017 par l’association Le Souvenir français, qui œuvre à l’entretien de la mémoire des soldats morts au combat.
- Elle intègre désormais une centaine de tombes situées au cimetière du Père-Lachaise à Paris.
- Des écoliers de CM1 et CM2 de l’école Arago ont testé l’application ce jeudi dans le plus grand cimetière parisien.
Mathieu, 10 ans, s’avance d’un pas hésitant dans l’allée des Thuyas, le regard fixé sur une tablette. « Regardez, vous êtes le petit point bleu et on doit aller jusqu’au point vert », explique Daniele Valli, membre de la Ligue de l’enseignement, au jeune garçon et aux autres enfants qui l’accompagnent. Depuis plusieurs minutes, le petit groupe est à la recherche de la tombe d’un soldat parisien, mort au front en 1917. « C’est là », s’exclame soudain l’un d’eux en pointant du doigt la sépulture.
Scolarisés en CM1 ou CM2 à l’école Arago dans le 13e arrondissement de Paris, les écoliers expérimentent l’application « Mémoire d’homme » qui permet de géolocaliser les tombes de soldats morts au combat et inhumés dans des cimetières communaux. Lancée en 2017, elle est l’œuvre du Souvenir français, association qui œuvre pour l’entretien de la mémoire des combattants français. Depuis peu, les Parisiens peuvent l’utiliser : une centaine de tombes de soldats, principalement morts en 1914-1918, inhumés au cimetière du Père-Lachaise a été rajoutée cette année.
Une mini-biographie et quelques photos retracent la vie du soldat disparu
Face à la sépulture, Mathieu consulte la courte biographie du soldat enterré qui s’affiche sur la tablette. « Né le 10 mai 1888 dans le 20e arrondissement de Paris, Alphonse Lachavanne est recruté à l’âge de 20 ans dans le 217e régiment d’infanterie […]. Il est tué lors des combats de l’extrême en 1917 », lit-il pour ses camarades de classe.
En plus de la présentation du Poilu, quelques photos l’accompagnent. En quelques clics, les enfants découvrent ainsi de façon interactive les grandes lignes de l’histoire de ce combattant, enterré à quelques rues de leur établissement.
« C’est super ! », s’enthousiasme Sorene, élève de CM1. « C’est moderne et c’est mieux qu’une carte où il faut regarder dans quelle rue on doit tourner », affirme-t-il. Sa camarade Noémie renchérit : « C’est plus facile car le point se déplace quand on marche, comme sur un téléphone. »
« Renouveler la transmission de la mémoire des soldats morts pour la France »
Pour Gaëlle Pfister, leur enseignante, l’application constitue un outil pédagogique utile. « Il leur permet d’être acteur et autonome dans l’apprentissage », se réjouit-elle. Dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale en 2018, le conflit a occupé une place importante cette année dans le programme de ses élèves. Avec l’application, l’institutrice trouve un moyen de changer d’approche sur le sujet. « Quelque part, ils mènent une enquête en cherchant des indices », note-t-elle.
Pour Serge Barcellini, président de l’association Le Souvenir français, il était primordial de « renouveler la transmission de la mémoire des soldats morts pour la France. » En créant une application, l’association vieille de 132 ans, cherche à s’adresser aux jeunes générations avec un outil qui leur est plus familier.
En s’intéressant uniquement aux cimetières communaux, elle permet aussi de créer une proximité avec l’utilisateur, remarque Hervé Deguine, porte-drapeau du 11e arrondissement de Paris pour l’association du Souvenir français. « Ça n’a rien à voir avec le fait de voir des soldats dans un cimetière militaire, là on les voit avec leur famille. Ils sont avec un père, un frère, qui eux aussi ont été tués. Et tout à coup, on est saisi par la brutalité de la guerre », souligne-t-il d’un ton grave.