TERRORISMEAttaque à Orly: Ziyed Ben Belgacem «avait plus le profil d’un suiveur»

Attaque à l'aéroport d'Orly: Ziyed Ben Belgacem «avait plus le profil d’un suiveur»

TERRORISMELe profil de Ziyed Ben Belgacem, l’assaillant de l’aéroport d’Orly, s’apparente plus à celui d’un délinquant chevronné qu’à celui d’un homme profondément radicalisé…
Caroline Politi

Caroline Politi

«Posez vos armes, je suis là pour mourir par Allah. De toute façon, il va y avoir des morts ». Il est 8h22 samedi matin lorsque ces mots résonnent dans le terminal sud de l ’aéroport d’Orly. Quelques secondes plus tard, Ziyed Ben Belgacem pointe son pistolet sur la tempe d’une militaire de la force Sentinelle et tente de lui voler son Famas. Elle résiste, une bagarre s'engage. L'assaillant sera finalement abattu à 8h25 de trois balles par un autre militaire. Si le profil d’un individu « extrêmement violent », déterminé à aller « jusqu’au bout » se dessine peu à peu, ses « motivations » interrogent, a confié samedi soir le procureur de Paris, François Molins.

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Un casier chargé

Car le CV de ce Français d’origine tunisienne, né à Paris en février 1978, s’apparente plus à celui d’un délinquant chevronné qu’à celui d’un homme profondément radicalisé. A 39 ans, Ziyed Ben Belgacem a été condamné à neuf reprises, notamment pour vols avec violences et trafic de stupéfiants. Cinq ans de prison en 2001 pour trois braquages de banques ou des bureaux de poste en Ile-de-France. En 2009, il est condamné successivement à trois puis cinq ans de prison pour trafic de drogue.

Sa vie ne sera qu’un enchaînement de courtes périodes de liberté et de séjours en détention. Le dernier s’est terminé au mois de septembre. Ziyed Ben Belgacem a été libéré sous contrôle judiciaire après six mois de détention provisoire dans le cadre d’une enquête - toujours à l’instruction - sur des vols à mains armées dans la capitale.

Pas de fiche « S » mais des signaux de radicalisation

C’est lors d’un de ces séjours en prison, à la maison d’arrêt d’Osny en 2011-2012, que Ziyed Ben Belgacem laisse transparaître « des signaux de radicalisation », selon les mots de François Molins. « Il a été suivi par le bureau du renseignement parce qu’il fréquentait quelques personnes radicalisées, notamment un homme fiché S, d’origine tunisienne comme lui », se souvient un gardien d’Osny. Mais le fonctionnaire n’a jamais observé de changements dans le comportement de Ziyed Ben Belgacem. « C’était plutôt un suiveur, pas du tout un soldat comme pouvait l'être Larossi Aballa [l’auteur de l’attaque de deux policiers à Magnanville, ndlr]. » A ses yeux, le terme radicalisé est « un bien grand mot ». Il garde en revanche le souvenir d’un homme « froid », « distant » qui « ne parlait pas beaucoup ».

Ce signalement lui vaudra néanmoins de faire l’objet d’une perquisition administrative, en novembre 2015, peu après les attentats de Paris. Quatre clés USB et une carte SD seront saisies mais leur exploitation ne donnera rien. Ce qui explique que Ziyed Ben Belgacem n’a jamais fait l’objet d’une fiche « S » (sûreté d’État).

Ce samedi, lors de la perquisition de son domicile de Garges-lès-Gonesse, les enquêteurs ont retrouvé quelques grammes de cocaïne et une machette. Il avait sur lui 750 euros, un exemplaire du coran, un paquet de cigarettes et un briquet. Mais aucun élément faisant référence à l'état islamique n'a été découvert. De même, à ce stade de l'enquête, on lui connaît aucun séjour en zone irako-syrienne. L'analyse de son téléphone se poursuit mais n'a pas permis de mettre pour l'instant en lumière des contacts des djihadistes, précise une source proche du dossier.

«Jamais il a fait la prière et il boit»

L'autopsie de Ziyed Ben Belgacem sera pratiquée dans la journée ainsi que des prélèvements sanguins pour déterminer s'il était sous l’emprise de drogue ou d’alcool. « Mon fils n’a jamais été un terroriste. Jamais il a fait la prière et il boit. Et sous l’effet de l’alcool et du cannabis, voilà où on arrive », a témoigné ce dimanche son père à l’issue de sa garde à vue.

La nuit précédant l’attaque Ziyed Ben Belgacem avait passé la soirée dans un bar italo-cubain de Vitry-sur-Seine, le Dolce et Pingaso. C’est en rentrant chez lui, à Garges-lès-Gonesse qu’il est arrêté en excès de vitesse. Lors du contrôle, il tire sur un policier avec un pistolet à grenailles, le blessant à la joue. Puis il se rend à nouveau dans le bar dans lequel il a passé la nuit, met en joue les clients, tire à plusieurs reprises dans le vide puis vole une voiture. En chemin, il appelle son père et son frère et leur confie avoir « fait des bêtises ». Ziyed Ben Belgacem était engagé dans «une sorte de fuite en avant avec un processus de plus en plus destructeur qui va visiblement crescendo», a analysé le procureur de Paris. Mais impossible à ce stade de l'enquête de dire si les événements ont été prémédités ou résultent d'une improvisation liée au premier contrôle de police.

« C'est un choc, mais qu'est-ce que vous voulez? C'est la fréquentation et la drogue... En fin de compte, c'est moi qui paye », a ajouté le père de Ziyed Ben Belgacem. Les gardes à vue de son frère et son cousin sont toujours en cours.