REPORTAGE«Donner aux migrants la possibilité de ne plus vivre dans la boue»

Centre d'accueil à Paris: «Donner aux migrants la possibilité de ne plus vivre dans la boue»

REPORTAGELe très attendu centre humanitaire pour primo-arrivants a ouvert ses portes, jeudi matin, dans le nord-est de la capitale…
Chloé Pilorget-Rezzouk

Chloé Pilorget-Rezzouk

C’est une grosse bulle colorée, jaune, grise et blanche, sortie de terre au pied du périphérique, porte de La Chapelle. Avec sa capacité d’accueil de 400 places, pour les migrants, annoncé en mai dernier par la maire Anne Hidalgo, a ouvert ses portes, jeudi matin, à 8h30, boulevard Ney, dans le 18e arrondissement de Paris. Avec un peu plus d’un mois de retard. « On attendait que et à Stalingrad soit résorbée, on ne pouvait pas ouvrir un centre qui allait d’emblée être embolisé », explique-t-on à la mairie de Paris. Objectif de l’endroit ? Offrir un accueil digne aux primo-arrivants, une alternative insalubres des quartiers de Stalingrad et La Chapelle.

Accueillir, et surtout informer

Sous cette seront reçus chaque jour, de 8 heures à 20 heures, jusqu’à 80 migrants venant tout juste d’arriver en France. « Bienvenue », affiche ainsi un panneau fixé à l’entrée et écrit en plusieurs langues - arabe, espagnol, français, anglais… A leur arrivée, ils reçoivent d’ailleurs un guide, traduit en cinq langues dont le patchoune. « On souhaitait qu’il existe un centre pour accueillir les primo-arrivants, qu’ils puissent être hébergés, se nourrir, avoir accès à la santé, et surtout, avoir accès à l’information », souligne Bruno Morel, directeur général d’Emmaüs Solidarité, à qui a été confiée la gestion de cette grande bulle humanitaire.

« Nous allons prendre le temps de l’explication, le temps que les gens se posent », abonde Yann Manzi. Le fondateur d’Utopia 56, l’une des associations mobilisées sur le site pour assurer notamment la distribution de vêtements et de nourriture, se réjouit : « C’est ce qu’il manquait à la France, un tel dispositif. Jusqu’à présent, les migrants arrivaient et étaient pris en charge par rien du tout. »

Hébergés jusqu’à dix jours

Après le recueil de leur histoire par des travailleurs sociaux, les migrants venus chercher refuge sont redirigés en fonction de leurs situations respectives vers des hébergements appropriés comme les centres pour demandeurs d’asile (Cada), les centres d’accueil ou d’orientation (CAO) ou encore, pour les mineurs, vers l’une des douze structures d’accueil de la ville de Paris. Ces derniers, ainsi que les femmes et enfants, y seront accompagnés physiquement par des bénévoles.

Dans ce centre tout neuf, seuls peuvent en effet être hébergés les hommes majeurs isolés, pour une durée de cinq à dix jours. Ils sont logés parmi huit modules d’une cinquantaine de places, en préfabriqué et sorte de cabanons, abrités sous une halle de 10 000 m2. Chacun de ces villages est « d’une couleur différente, avec un parcours fléché au sol, de façon à ce qu’ils puissent s’orienter », indique Yann Manzi.

seront accueillis dans des chambres de quatre lits, permettant, autant que possible, de préserver les affinités tissées. « C’est très important, ils ont fait la route ensemble, on ne va pas les séparer », poursuit le fondateur d’Utopia 56. Ici, ils peuvent aussi trouver un espace médical, un espace repos et détente, avec baby-foot et rameurs. « Ce centre, c’est leur donner la possibilité de ne plus vivre dans la boue », résume-t-il.

Des arrivées au compte-goutte

Pour cette première journée, les files dessinées par des barrières métalliques, le long des grilles du centre humanitaire, sont restées plutôt vides. Pas de mouvement de foule ou de précipitation, mais des arrivées progressives, dès 9 heures, par petits groupes d’hommes. Il faut que le bouche-à-oreille fasse son effet, expliquent les bénévoles sur place. Dès 8 heures, les maraudes menées par Emmaüs Solidarité avaient commencé à faire passer le mot. Et elles continueront demain, puis après-demain.

En début d’après-midi, on comptabilisait une soixantaine de personnes dont quatre femmes et leurs enfants. « Ce sont principalement des Afghans et des Erythréens », précise un membre d’Emmaüs solidarité. A quelques mètres de là, Balimba attend son bus. A 32 ans, ce Congolais en France depuis deux ans se réjouit de la présence d’un tel centre. « Je connais deux amis qui viennent du Congo. Ils veulent obtenir l’asile, mais sont à la rue », affirme-t-il. Avant d’assurer qu’il fera passer le message.