Déprimés les Français? Des seniors livrent leurs conseils pour profiter de la vie à 200%
SOCIETE•A l’occasion du Banquet des Cheveux Blancs en présence de 400 séniors franciliens isolés et invités par la Secours populaire, on a guinché avec eux et on a posé quelques questions sur la vie…Romain Lescurieux
Vague d’attentats, chômage, inondations, incendies, polémiques à gogo, ou encore finale malheureuse de l’Euro… c’est le bad dans l’Hexagone. Le début difficile des Français aux JO de Rio serait même un « baromètre du blues national », relate Slate. Les Français - à qui Manuel Valls a demandé en juillet de « faire preuve de résilience et de résistance » - dépriment, fatiguent et ne croient plus en grand-chose, lit-on ici et là.
Evidemment, des sondages en pagaille viennent attester cette morosité ambiante. Selon un baromètre Odoxa publié en avril, la France se situe derrière tous les grands pays européens en termes de confiance en l’avenir. Vraiment ?
A l’occasion du Banquet des Cheveux Blancs, un événement organisé par le Secours populaire qui a réuni ce jeudi à la célèbre guinguette Chez Gégène (Joinville-Le-Pont) près de 400 séniors privés de vacances, on a dansé, on a écouté de l’accordéon en mangeant du pâté. Mais surtout on a parlé de la vie. Résultat : Les conseils des séniors pour être optimiste remplacent le Lexomil. Les voici et vous en faites ce que vous voulez.
« Un jour, ça nous tombera dessus mais en attendant vivons »
Accoudée sur une nappe à carreaux, Ginette, 76 ans, papote avec Colette, « 25 ans », précise-t-elle. Entre deux gorgées de Kir, elles dévoilent leurs recettes de grand-mère pour « garder la pêche ». « La vie est difficile et c’est compliqué de se projeter mais les gens doivent danser, surtout les jeunes. La danse c’est agréable et c’est un moyen de rester jeune et souple », assène Ginette, canotier sur la tête. Colette jette un coup d’œil discret mais assuré vers l’accordéoniste et reprend. « La danse, c’est la joie de vivre. » Dans les allées, les serveurs carburent sous le feu des lampions. Etle président du Secours populaire, Julien Lauprêtre, prend le micro.
« Il n’y a pas d’âge pour être heureux. Il n’y a pas d’âge pour être solidaire », lance-t-il, sous des salves applaudissements. « Il a raison », lance Aicha, 65 ans, habitante de Meaux « Le plus important, c’est de ne pas rester chez soi avec une glace devant la télévision. Il faut rester debout, rencontrer des gens, les écouter et leur accorder du temps », détaille-t-elle. « La dernière fois, un jeune homme m’a dit j’ai 700 amis. Pourtant, je n’en voyais aucun autour de lui. L’amitié virtuelle, ce n’est pas de l’amitié. Lâchez vos portables. Sortez de chez vous », sourit cette jeune retraitée.
« Restez groupés, restez unis, motivés et faites vous entendre. Sans haine, ni violence, vous pouvez faire beaucoup de choses », s’exclame à un coin de table Anne-Marie, 75 ans. « J’ai connu la guerre et ce qu’il se passe actuellement n’est pas réjouissant. Un jour ça nous tombera vraiment dessus mais en attendant vivons », dit Ginette, lunettes vissées sur le nez. A 13h30, le déjeuner est lancé, les serviettes sont transposées méthodiquement sur les genoux.
Au menu : Pâté, magret fumé, gratin, un croustillant choco-pistache en dessert, beaucoup de pas de danse « et le tour est joué ». « On mélange les gens, les âges, les couleurs. C’est ça Gégène », gouaille une responsable de l’établissement « Tiens Monique, fait péter le vin rouge », braille Claude, qui trépigne d’impatience d’entrer en action sur la piste de danse. Dehors, Lucienne, cigarette au bout des doigts, profite de l’instant, sur les bords de la Marne.
« Venez faire la fête avec nous chez Gégène »
« La vieillesse, c’est un naufrage mais finalement on se rend compte qu’il faut savoir profiter de chaque instant et de chaque personne. Il n’y a pas de recette mais il faut arrêter de s’accrocher aux bobos du quotidien et avancer », explique-t-elle. Malgré la pluie, la chaleur de Joinville entre dans la pièce principale. Les chaises se vident. Non loin du zinc, Cathy, 78 ans, sort son rouge à lèvres. C’est l’heure du tango. « J’aime le tango. »
« Les jeunes, vous trouvez ça ringard mais venez faire la fête avec nous chez Gégène. Nous, on n’a que ça à foutre, on vous attend », s’excite Daniel, 69 ans, « l’année érotique », chantonne-t-il. « Calme-toi », claque sa compagne. « Même sans trop d’argent, on voit nos amis, on boit du vin blanc et on danse. C’est ça la vie. On râle mais nous ne sommes pas déprimés », explique-t-elle finalement. Plus discrète dans ses enchaînements de danse, Jeanine, 73 ans, se confie sur la piste de danse. « On a peur pour la jeunesse, pour nos enfants, nos petits-enfants. Mais on vous soutient. »