«On fait quoi si la loi Travail passe?»... Des milliers de personnes rassemblées contre le recours au 49-3
REPORTAGE•Quelque 500 personnes, selon la préfecture de police, ont manifesté devant l'Assemblée nationale ce mardi soir aux cris de « tout le monde emmerde le 49-3 »…Romain Lescurieux
Seule sous son parapluie, elle demande à ses amis. « On fait quoi après, si la loi passe ? ». Silence général sous le regard de nombreux policiers, tournant le dos à l’Assemblée nationale.
Ce mardi soir, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées en France à l’appel de Nuit Debout afin de protester contre le recours à l’article 49-3 - une « insulte au peuple » selon le mouvement citoyen - pour faire passer cette loi travail. A Paris, ils étaient 500, selon la préfecture de police, entre dégoût, colère et sentiment d’impuissance.
« Je me souviens encore d’Hollande parlant du 49.3 avec des trémolos dans la voix »
« Nous sommes au-delà de la trahison. C’est lamentable. Nous sommes entrés dans une dictature démocratique », lance John, qui se mobilise depuis plusieurs mois contre ce projet de loi. Derrière lui et sous une pluie abondante, une première chaîne de manifestants se met en place devant les CRS, aux cris de « tout le monde emmerde le 49-3 ». En première ligne, des élus du Parti de Gauche, dont le coordinateur et conseiller régional d’Île-de-France et Danielle Simonnet, conseillère de Paris. « En ayant recours à ce 49.3, le parlement est muselé. La démocratie est donc ici en attendant d’avoir une sixième République », lance-t-elle.
« Libérez le Parlement », « Hollande démission », scande la foule. A 19h, la circulation devient compliquée. Les premiers fumigènes sont tirés et les policiers repoussent les manifestants le plus loin du Palais Bourbon, en n’hésitant pas à utiliser du gaz lacrymogène. Les foulards, les lunettes de piscine et le sérum physiologique sortent des poches. Non loin, Françoise, 58 ans, s’indigne. « J’ai connu des moments difficiles dans la mobilisation sociale. Mais jamais à ce point. Jamais avec un tel traitement policier alors que dans le même temps est utilisé à l’Assemblée un outil anti-démocratique », s’exclame cette femme. Puis, elle poursuit, enroulée dans sa parka rouge.
« Je me souviens encore de François Hollande parlant du 49.3 avec des trémolos dans la voix. Il nous fait ça. Il se moque de qui ? », dit-elle, bien décidée à continuer le combat. « Chaque fois qu’il se passera quelque chose, qu’il y aura un rassemblement, je serai là, jusqu’à la fin du quinquennat. Ça doit passer par la rue, les citoyens, par #NuitDebout. », conclut-elle. Et comme elle, d’autres ne comptent pas non plus s’arrêter là.
« On fait quoi maintenant ? On va où ? »
Très vite, la police encercle le cortège et n’autorise plus à en sortir. Une femme passe avec une pancarte sur laquelle est écrit : « Désolé pour le dérangement, nous essayons de sauver notre avenir ». Perchée sur le pont de la Concorde, une manifestante interpelle la foule. « On fait quoi maintenant ? On va où ? ». Non loin, Eve, 19 ans, étudiante, livre sa vision pour la suite des événements.
« Nous sommes là parce qu’on est dégoûtés. Parce qu’un vrai mouvement se mettait en place mais j’espère ne pas baisser les bras », explique-t-elle. « Ma mobilisation peut se poursuivre à #NuitDebout, avec des sit-in devant l’Assemblée, devant Matignon », détaille-t-elle. A 20h30, et face une pluie toujours plus abondante, de nombreux manifestants commencent à rebrousser chemin vers la Concorde, où se trouve là aussi un important dispositif policier bloquant le passage de la foule. Certains décident alors de rester et résister face à l’Assemblée.