CRISERéfugiés de la Porte de Saint-Ouen: Une situation aberrante après une tentative de démantèlement

Réfugiés de la Porte de Saint-Ouen: Une situation aberrante après une tentative de démantèlement

CRISELa police a tenté un démantèlement du camp ce mardi...
Anne Demoulin

Anne Demoulin

Ils sont encore une centaine de réfugiés syriens, hommes, femmes et enfants, entassés dans un camp au pied de l’hôpital Bichat, à proximité du boulevard périphérique, dans des conditions sanitaires catastrophiques. La tentative de démantèlement du camp, menée ce mardi par la police, met l’accent sur une situation aberrante.

Un démantèlement partiel

On s’affairait sur le camp de réfugiés ce mardi soir entre 22h et 23h. Syriens, membres du collectif des réfugiés syriens de la Porte de Saint-Ouen et riverains replantaient des tentes dans un petit espace délimité par des barrières et gardé par trois policiers. « Une trentaine de tentes a été enlevée ce matin, sous prétexte de ne pas gêner les bus », raconte Olivier, membre du collectif. Les tentes des réfugiés syriens étaient jusqu’alors installées tout au long du terre-plein central réservé aux bus de la RATP.

« De nombreuses familles avaient été logées la nuit de lundi à mardi à l’hôtel grâce aux dons récoltés. Quand la police est arrivée mardi matin, quelqu’un s’est présenté aux autorités comme le chef du camp et leur a donné le feu vert pour agir », poursuit-il. Jusqu’au soir, la police avait formellement interdit de réinstaller les tentes, avant d’autoriser finalement leur réinstallation à l’extrémité du terre-plein central. Contactée par 20 Minutes, la Préfecture de police de Paris n’a pas encore communiqué à ce sujet.

L’alerte a été donnée via les réseaux sociaux. « SOS ! Besoin de tentes pour mettre à l’abri les réfugiés du camp de St Ouen dont les tentes ont été détruites et emportées ce matin », peut-on lire. « On a jeté leurs duvets, toutes leurs affaires », déplore Salima, qui vient régulièrement assister un infirmier bénévole. « Je passe tous les jours devant le camp, j’habite à côté. J’ai vu que les tentes avaient été enlevées et je suis venue avec mon fils pour leur donner un coup de main », lance une riveraine.

Une situation sanitaire catastrophique

Sur le camp, ni toilettes, ni douches. 20 Minutes constate que la sanisette la plus proche est hors-service. L’infirmier bénévole prodigue des soins. Galle, herpès, angines, diarrhées, et autres infections pullulent. « On reste suspendu à des décisions sanitaires imminentes et urgentes pour les plus vulnérables », écrit le Dr. patrick Bouffard, médecin à l’hôpital Bichat qui passe régulièrement sur le camp.

« Nous avons demandé qu’un bloc sanitaire soit installé, sans succès », maugrée Olivier. Les réfugiés ont reçu des dons en grosse quantité, sans avoir de quoi les stocker. « La situation sanitaire provient de là, des tas de vêtements et de restes alimentaires qui se sont entassés avec la pluie », explique Olivier. Ces mêmes dons suscitent aussi des convoitises autour du camp.

Le collectif tente de réguler l’afflux en redirigeant vers les associations telles que le Secours populaire de Saint-Ouen. « Il faut passer évaluer les besoins et distribuer sur place au compte-gouttes », estime Salima, membre du collectif.

Une situation inextricable

« Désormais, on se concentre sur des missions plus pérennes. Nous essayons de faire aboutir la régularisation de leur statut, et à terme de leur logement », lance Olivier. La situation des réfugiés de la Porte de Saint-Ouen semble inextricable, face à trois difficultés majeures. « Tant que leur situation sanitaire n’est pas réglée, les structures d’accueil ne peuvent pas les accueillir », note le membre du collectif.

Les réfugiés ne réussissent pas à mener leur démarche administrative à terme : « La première chose qu’on leur demande, c’est une adresse. Cinquième tente à droite du terre-plein, ça ne marche pas ! », souligne-t-il.

« De nombreux réfugiés sont passés par l’Espagne avant d’arriver à Porte de Saint-Ouen », note Olivier. Ce qui selon le règlement de Dublin, les empêche de prétendre à une demande d’asile en France. Les Syriens de la Porte de Saint-Ouen se retrouvent donc coincés dans une situation kafkaïenne.