La Tour Paris 13, symbole de la reconnaissance du street art

La Tour Paris 13, symbole de la reconnaissance du street art

CULTURE – Avant la fermeture définitive de cette tour investie par les plus grands noms du street art tout ce mois d’octobre, retour sur un succès qui donne des idées…
Oihana Gabriel

Oihana Gabriel

Jusqu’à huit heures d’attente… Si les expos parisiennes sont réputées bondées, la Tour Paris 13 a côtoyé les sommets coté fréquentation. Les visiteurs de la Tour Paris 13 ont dû s’armer de patience pour grimper les neuf étages, redessinés par 104 artistes, de cet immeuble du 13e voué à la destruction. Car jeudi à 20h, le rideau se baissera sur l’expo convoitée.

Reconnaissance du street art

L’équation de départ laissait augurer des embouteillages à l’entrée: un mois pour visiter 36 appartements… en limitant l’accès à 49 personnes au même moment pour des raisons de sécurité. «On n’a pas une organisation muséale», se justifie Mehdi Ben Cheikh, à l’origine du projet. La préfecture nous a imposé ces restrictions, mais on arrive à 1.000 visiteurs par jour.»

Ajoutez à cela une proposition insolite, éphémère, gratuite et surtout de street art. «Le succès de la Tour 13 démontre le changement de regard de la population vis-à-vis de cet art», reconnaît Bruno Julliard, adjoint au maire de Paris chargé de la Culture. Constat partagé par Mehdi, qui avoue qu’en 2004, lorsqu’il ouvre sa galerie Itinerrance, «il était beaucoup plus difficile de vendre des œuvres de street art qu’aujourd’hui.»

Révélateur d’un déficit?

Mais pour le galeriste, l’engouement, qui l’a surpris, révèle également «un sérieux manque de représentation du street art. Tout est à réinventer pour présenter ces œuvres. Il ne s’agit pas d’exposer des toiles et d’en faire une question de fric.» Analyse différente du côté de la Mairie de Paris: «Ce n’est pas révélateur d’un déficit [de lieux pour le street art] à Paris, plaide Bruno Julliard. La Tour Paris 13 aurait de toute façon eu un succès énorme parce qu’elle rassemble dans un même lieu tous les grands noms du street art. C’est comme si vous proposiez dans un musée moderne les plus grands peintres du 20e siècle…»



Une tour-tremplin pour les artistes

Face à l’affluence, peut-on imaginer une suite? La tour a beau pleurer en couleur, elle s’effondrera dans les prochaines semaines pour laisser place à 300 appartements neufs. «On s’est engagé auprès de la Sablière, le bailleur de cette tour, à ne pas déranger leur planning pour la reconstruction, se justifie Mehdi. Les habitants n’ont qu’une hâte, c’est de rentrer chez eux. Je n’ai pas envie de retarder ce moment pour des raisons artistiques. La destruction en elle-même sera une performance. Mais on pourra rebondir vers d’autres projets», promet le galeriste. Avant de souligner qu’avec l’appui de la mairie du 13e, il tente de monter un musée à ciel ouvert depuis deux ans et demi, en invitant des artistes à investir de grands murs dans l’arrondissement. La blogothèque, site partenaire de l’événement propose également aux internautes de voter pour les œuvres dont les photos seront conservées sur la Toile.

Plus généralement, la renommée internationale de la Tour Paris 13 servira de tremplin aux 104 artistes bénévoles. «Des galeristes sont venus faire leur marché!», assure Mehdi. Même si les derniers lieux culturels ouverts à Paris (104, Gaîté Lyrique, Petit Bain…) n’ont pas mis à l’honneur cet art populaire, la capitale souhaite figurer dans la short list des villes phares du street art. «Je pense que nous pouvons augmenter les lieux d’accueil du street art, notamment sur les berges, reprend Bruno Julliard. Dans ce centre dédié au hip-hop des futures Halles, il y aura également des ateliers de graff. Mais il faut garder un savant dosage entre aide sans surencadrer un art qui se veut transgressif, pirate.» Un équilibre que la Tour Paris 13 revendique, aux dires de Mehdi: «on a démontré que ça valait la peine, à voir si les institutions prennent le relais.»

Retrouvez notre diaporama de la Tour Paris 13