TOURISMEQuelle stratégie pour attirer les touristes en hiver à Nice ?

Nice mise sur le Carnaval, l’Unesco et la gastronomie pour attirer des touristes en hiver

TOURISMEAlors que les chiffres de la saison estivale « dépassent ceux records de 2019 » selon le Comité régional de tourisme Paca, les professionnels du secteur veulent « lisser » la fréquentation sur l’année et surtout sur l’hiver
Elise Martin

Elise Martin

L'essentiel

  • Atteignant des sommets de fréquentations en été, les professionnels du tourisme veulent changer de stratégie pour attirer également des clients l’hiver.
  • Le Comité régional du tourisme Paca et l’Office de tourisme métropolitain Nice Côte d’Azur ont alors proposé plusieurs pistes de travail.
  • Parmi elles, miser sur des événements comme le Carnaval et attirer plus de jeunes.

Avec des chiffres « records », « dépassant même ceux de 2019 » pour cette saison estivale, le tourisme atteint des sommets à Nice. Mais la stratégie des professionnels doit changer, selon le Comité régional du tourisme (CRT) Paca et l’Office de tourisme (OT) métropolitain Nice Côte d’Azur. « Il faut un retour aux sources, lance Rudy Salles, président délégué de l’OT lors d’une conférence de presse. A l’origine, le tourisme à Nice, c’était le tourisme en hiver ». Autrement dit : il ne suffit plus d’être au top en été, il faut l’être aussi en hiver.

« Il y a deux cents ans, on faisait du lobby pour demander aux hôtels d’ouvrir l’été, ajoute Loïc Chovelon, directeur général du CRT Paca, s’appuyant sur la diffusion d’un extrait de la série Downton Abbey, qui suit une riche famille anglaise dans les années 1910. Et ça a été oublié. Maintenant, quand on pense Nice, on pense station balnéaire. »

Pour changer la donne, le CRT et l’OT ont missionné le cabinet Voltère d’étudier le marché et permettre une stratégie pour « un développement touristique durable de la destination » (« durable dans le sens dans le temps pas au sens développement durable », précisera ensuite l’Office du tourisme). Cette étude a été ensuite présentée, entre autres, aux représentants d’hôtels, de restaurants, des institutions comme la CCI ou de commerces.

Créer des « produits »

« L’histoire de la ville de Nice, c’est aussi l’histoire du tourisme, commente François Victor, du cabinet Voltère. La beauté des paysages, le climat, les lumières, l’architecture et la végétation sont d’autant d’éléments attractifs à l’époque qui le sont encore aujourd’hui. Mais le travail pour attirer la clientèle à cette période n’est plus le même engagé qu’il y a deux cents ans ». Il s’appuie alors sur les chiffres : en hiver, la majorité des touristes sont étrangers et la population est plus âgée qu’en été. « On doit faire la même démarche pour aller chercher les jeunes que pour aller chercher des nouveaux clients, reprend Loïc Chovelon. On doit leur donner envie de Nice, ils doivent rêver de Nice, on doit rentrer dans leur tête pour qu’ils aient cette image que Nice est une destination, même en hiver. »

Parce que pour venir jusque sur la Côte d’Azur, difficile d’y arriver « par hasard ». Selon les graphiques du cabinet, même les Français prennent l’avion pour venir jusqu’à Nice. Il faut alors que le client « tape » la destination depuis là où il réside dans son moteur de recherche. Et pour ça, « il faut qu’il ait une raison de le faire », précise le directeur général du CRT Paca.

Il évoque alors les meilleures destinations « où partir en court séjour en hiver » qui arrivent en haut des classements sur Internet, telles qu’Amsterdam, Vienne, Barcelone, Gènes, Lisbonne ou Valence. Ainsi, le cabinet Voltère est allé voir ce que ces villes concurrentes proposaient pour s’inspirer. En résumé : « Elles ont créé des produits ». C’est alors ça le plan.

Les pistes sur lesquelles travailler

La première piste, c’est le Carnaval qui, selon Loïc Chovelon, n’a pas le retentissement qu’il mérite. « Il a du succès en France mais peu à l’international, continue-t-il. En comparaison, celui de Venise est puissant avec plus de 60 % de clientèle étrangère et celui Rio a une réputation mondiale. Les deux permettent des taux de remplissages d’hôtel de plus de 90 % sur la période alors qu’ici, on est plutôt aux alentours de 70 %. Ces deux villes en ont fait leur force, Nice peut le faire également, c’est ancré dans notre culture aussi. »

« Tout a été pensé pour inclure la population niçoise, rassure Catherine Anouilh, directrice marketing et communication de l’Office du tourisme métropolitain. Créer ce genre d’événements et appuyer notre communication là-dessus, c’est pour faire vivre l’économie locale. Les Niçois vont pouvoir s’approprier ces événements et être d’autant plus fiers de venir de la capitale azuréenne. »

Une fierté depuis peu, c’est le classement sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco comme « la ville de la villégiature d’hiver de Riviera » l’année dernière. Et la capitale azuréenne va maintenant jouer cette carte de référence. Le CRT et l’OT se sont alors penchés sur ce que proposaient les communes françaises également classées. « A Lyon, Strasbourg et Bordeaux, des produits « Unesco » ont été créés, développe Catherine Anouilh, directrice marketing et communication de l’Office du tourisme métropolitain. Des « cartes » spéciales, « des parcours et visites dans la ville », des « conférences », « il faut mieux marketer notre étiquette Unesco », affirme la directrice marketing.

Une idée en entraînant une autre, la troisième piste est la gastronomie. « La cuisine nissarte a un nom, elle est reconnue et est appréciée. On pourrait alors créer des festivals autour de cette gastronomie locale en hiver comme le fait Rennes mais à l’automne, lance Catherine Anouilh. A cette période, on n’a alors aucune concurrence. »

Ne pas oublier de compenser son carbone

Pour mettre toutes ces idées en place, d’autres réunions auront lieu durant l’année mais la stratégie commence « dès cet hiver avec le lancement de 100 tour-opérateurs » organisé mi-décembre, précise Catherine Anouilh.

Ensuite, ce sera des campagnes de communication et la proposition de tarifs spéciaux, même si la directrice marketing de l’OT confie que la « cible » reste une « clientèle aisée ». « On cherche des clients qui amènent plus de recettes, pas à avoir plus de monde, ajoute-t-elle assurant que Nice attire déjà beaucoup de personnes « CSP + ». Et cette clientèle vient plutôt de l’étranger. »



Alors pour compenser l’empreinte carbone que ces touristes auront en venant jusqu’à Nice, en avion donc, elle promet « de travailler sur des idées plus green », qu’elle ne peut pas dévoiler maintenant, dit-elle. « Sur place, on va faire en sorte que les clients consomment des produits plus écoresponsables, comme en les poussant à utiliser la mobilité douce. Des hôtels sont aussi déjà dans cette démarche. »

Comme le conclut François de Canson, président du CRT Paca : « Tout est parti de Nice, tout va revenir de Nice ». Et la boucle est bouclée.