Côte d’Azur : Les yachts ne pourront plus jeter l’ancre aussi près de la côte
NATURE•Pour protéger les herbiers de posidonies, poumons de la Méditerranée, mais aussi limiter le trafic des gros yachts près du littoral des Alpes-Maritimes, de vastes zones deviennent interdites au mouillage des bateaux de plus de 20 ou 24 mètres selon les secteursMichel Bernouin
L'essentiel
- La préfecture maritime interdit le mouillage des gros yachts sur de vastes zones côtières des Alpes-Maritimes pour protéger notamment les herbiers de posidonies.
- Les professionnels du yachting envisagent d’attaquer cette décision devant la justice administrative.
Les super yachts le long du littoral des Alpes-Maritimes, à quelques brasses des plages, c’est terminé. Lundi, le préfet maritime de la Méditerranée a fait le déplacement à Saint-Jean-Cap-Ferrat pour signer un nouvel arrêté interdisant le mouillage des bateaux dépassant les 20 ou 24 mètres dans de vastes zones de bord de mer avec un objectif majeur mis en avant : la préservation des herbiers de posidonies.
Ces plantes sous-marines sont le poumon de la Méditerranée. Elles produisent de l’oxygène indispensable à la vie aquatique, mais aussi protègent dans leurs feuilles les poissons juvéniles, cassent la houle et stabilisent les fonds avec leurs racines.
Cette espèce emblématique des fonds marins méditerranéens, protégée depuis 1976, est particulièrement fragile. Ses rhizomes ne poussent que de quelques centimètres par an alors qu’une seule ancre peut en arracher des dizaines de mètres en quelques secondes.
Les fonds colonisés par ces posidonies ont donc été cartographiés précisément. C’est sur cette base que la préfecture maritime a élaborée des zones d’interdiction au mouillage pour les yachts de plus de 24 mètres. Un seuil qui est abaissé à 20 mètres dans la partie du littoral des Alpes-Maritimes à l’est du fleuve Var.
Le second objectif avancé par le préfet Laurent Isnard pour justifier ces nouvelles zones où les grandes unités ne pourront plus jeter l’ancre : « décongestionner trafic maritime et zones de mouillages dans des zones de forte présence (risques de conflits d’usage et accidents) ». Pour le vice-amiral Laurent Isnard, ce texte est le fruit d’un « consensus large avec les associations de protection de l’environnement, les pêcheurs, et représentants du yachting et de la plaisance, même s’il ne fait pas plaisir à tout le monde »
Pourquoi pas les petits plaisanciers ?
« Nous sommes pour, à 100 % pour protéger les posidonies, mais cet arrêté pose beaucoup de problèmes » tempère Thierry Voisin. Pour le président du Comité européen des professionnels du yachting (ECPY), association basée à Nice qui regroupe de nombreux professionnels du secteur, cet arrêté ne vise tout simplement pas les bons usagers de la mer. « Les capitaines des yachts de plus de 20 mètres sont des professionnels, officiers de marine marchande la plupart du temps. Ils savent localiser et respectent les herbiers de posidonies, ce qui n’est pas toujours le cas des petits plaisanciers. »
Les dizaines de milliers de bateaux de moins de 24 mètres qui évoluent en Méditerranée feraient bien plus de dégâts aux fonds marins que les 1.500 yachts de plus de 24 mètres qui y croisent en été, selon Thierry Voisin. Et ce n’est pas tout : « l’arrêté du préfet maritime se base sur la position du flotteur alors que le yacht peut avoir son ancre posée dans le sable tout en étant positionné au-dessus des posidonies. On est alors à la merci d’une sanction arbitraire ! » Estimant que cet arrêté est « pris dans la précipitation », le président de l’ECPY « envisage dès maintenant d’engager un recours administratif ».