REGLEMENTATIONA Nice, un arrêté oblige au port du masque dans des conditions spécifiques

Déconfinement à Nice : L’arrêté de la ville oblige au port du masque dans des conditions finalement très spécifiques

REGLEMENTATIONLa mairie avait décidé d’abroger son premier texte, attaqué en justice
Fabien Binacchi

Fabien Binacchi

L'essentiel

  • La Ligue des droits de l’Homme avait attaqué l’arrêté pris par Christian Estrosi pour obliger au port du masque dans l’espace public.
  • La mairie a décidé d’abroger son texte dimanche soir pour en prendre un « plus adapté ».
  • Il est désormais obligatoire uniquement quand il existe « une incompatibilité avec l’exigence des règles de distanciation sociale ».

Obligation de porter un masque ou pas ? En ce lundi de déconfinement, certains Niçois étaient un peu perdus. Et pour cause. L’annonce, à la mi-journée alors qu’il était attaqué en justice, de l’abrogation de l’arrêté municipal réglementant son usage dans les espaces publics. Décision prise pour en reprendre un autre « plus adapté », dixit la mairie.

Le nouveau texte, arrivé en préfecture dans l’après-midi, impose le port du masque « sur le domaine public et ses dépendances et sur les lieux publics susceptibles d’accueillir du public » mais sous certaines nouvelles conditions détaillées. Très détaillées. Et quand il existe « une incompatibilité avec l’exigence des règles de distanciation sociale ».

Lors de croisements dans des lieux confinés

Il devra notamment être porté lors d’un « déplacement, un croisement et/ou une circulation de personnes en un lieu étroit, exiguë et/ou confiné » ou encore dans « un rassemblement simultané, intempestif et concomitant de personnes, en un même lieu ». Des PV sont prévus pour les contrevenants, mais les nouvelles règles apparaissent difficiles à contrôler. Ce nouveau texte n’est que « temporaire », précise la mairie. Un troisième est attendu après la promulgation de la loi d’urgence sanitaire.

Le maire LR de Nice Christian Estrosi avait pris son premier arrêté concernant tout « l’espace public » dès le 7 mai pour une application à partir de ce lundi. Il a abrogé ce texte dimanche soir, à quelques heures d’une audience au tribunal administratif où il était attaqué via deux recours déposés notamment par la Ligue des droits de l’Homme.

A l’audience, ce lundi, l’avocat de la ville Me Adrien Verrier a justifié l’abrogation du texte, intervenue à une heure tardive « pour en prendre un plus adapté ». Il a aussi défendu le bien-fondé du précédent texte, mettant en garde contre une éventuelle deuxième vague de la maladie : « Il fallait préparer le déconfinement par des actes positifs », a-t-il dit.

« Un tour de passe-passe et une esbroufe politico-juridique », a commenté Me Patrick Spinosi, l’avocat de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), qui a obtenu du tribunal administratif une condamnation de la ville à verser 1.000 euros de frais de justice à l’association et à l’autre plaignant, un ancien conseiller d’Etat.

Pas possible « d’aller à l’encontre de la législation »

Mireille Damiano, également avocate de la LDH et par ailleurs candidate de la liste citoyenne et de gauche au premier tour des municipales le 15 mars, a quant à elle ironisé sur l’abrogation en catimini de l’arrêté, publiée « sur un petit site dédié » où « il faut être extrêmement curieux pour voir ce qui se passe ». La suppression du texte démontre, selon elle, que Christian Estrosi savait « parfaitement qu’il ne [pouvait] pas aller à l’encontre de la législation nationale » et qu’il risquait d’être désavoué au tribunal.

« Sentant le vent du boulet, le maire de Nice vient précipitamment d’abroger son arrêté 'masques partout'. S’il l’a fait, c’est parce que notre association et un citoyen à titre personnel en ont demandé la suspension par référé devant le juge administratif, a réagi la Ligue des droits de l’Homme. Le maire de Nice, qui est aussi candidat à sa réélection, a énormément communiqué sur la question des masques et c’est son droit le plus strict ; sans doute mû par un sentiment d’impunité, il a cherché à capitaliser cette communication en achevant l’édifice avec un arrêté illégal imposant le port systématique du masque. »


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La LDH avait déjà obtenu le 17 avril une décision favorable du Conseil d’Etat concernant le même type d’arrêté pris par la ville de Sceaux (Hauts-de-Seine) sur le principe que les maires n’ont pas le pouvoir d’aggraver les mesures sanitaires prises par le gouvernement.