Côte d'Azur: Le long parcours d'un citron pour être estampillé «de Menton»
AGRICULTURE•La récolte de l’agrume, reconnu par une Indication géographique protégée depuis 2015, a commencé près de la frontière italienneFabien Binacchi
L'essentiel
- Le citron de Menton fait l’objet d’une indication géographique protégée (IGP) depuis octobre 2015.
- Pour obtenir cette IGP, les agrumes doivent pousser sur un terroir argilo-sableux, situé à moins de 7 km de la mer et au maximum à 390 m d’altitude.
- Les fruits d’un même arbre ne finiront pas forcément tous « citrons de Menton ».
Sur les structures métalliques de la prochaine Fête du citron (à partir du 16 février), ils sont piqués par centaines. Mais ces agrumes-là, décoratifs, n’ont pas mûri sous le soleil de Menton. L’or jaune de la dernière ville des Alpes-Maritimes avant l’Italie, négocié jusqu’à 6 euros le kilo, est bien trop précieux pour faire le beau dans des corsos.
Présenté comme « le plus doux des citrons », ce « Citron de Menton », qui bénéficie d’une Indication géographique protégée (IGP) depuis octobre 2015, finira plutôt sur de grandes tables. Et la route est longue pour y arriver.
Pas précoce cette année, il commence juste à dévoiler ses parfums. « Ça peut parfois être dès décembre. Là, c’est maintenant que nous sommes en pleine période de maturité », expliquait mardi Stéphane Constantin, technicien au service municipal parcs et jardins, qui gère un conservatoire des agrumes sur les restanques de Garavan. « La récolte peut ensuite durer jusqu’à juin », précise le spécialiste.
L’an dernier, la neige tombée sur Menton, une première depuis 1986, avait fait des dégâts. Les indicateurs sont au vert, pour l’instant, pour cette nouvelle moisson.
Pas trop loin de la mer et pas trop haut
Et tant mieux, car la sélection est impitoyable pour obtenir la fameuse IGP. Les exploitations – à Menton, mais aussi Castellar, Gorbio, Roquebrune-Cap-Martin et Sainte-Agnès – doivent faire pousser des citrons SRA 625 (la variété dite de Menton) ou encore Adamo, Cerza, Eureka, Santa-Teresa et passer des prérequis.
« Le terroir doit être argilo-sableux. Les vergers sont situés à moins de 7 km de la mer et au maximum à 390 m d’altitude », résume Cédric Hérisson, le président de l’Association pour la promotion du citron de Menton (APCM).
Mais en plus, tous les fruits d’un même arbre ne sont pas forcément éligibles. Chaque exploitant doit faire valider ces citrons dans deux centres de labellisation, dont un Esat (Etablissement et service d’aide par le travail). En plus d’un contrôle organoleptique, « il y a un calibrage et une vérification visuelle. Ils ne doivent pas être trop tâchés, ni déformés », explique Julien Dallet, le responsable de la structure.
Le « sourire de Menton » sur le mamelon
Le fruit doit même arborer le « sourire de Menton », une sorte de fossette près du mamelon, à l’opposé du pédoncule. Tout cela est très précis. Et au final, 20 à 30 % des citrons sont déclassés (2 € le kilo). Les autres deviennent officiellement des citrons de Menton (4 € à 5 €) et 10 % obtiennent l’étiquette « extra », le graal proposé à 6 € le kilo.
Malgré ce strict cahier des charges, l’IGP fait son chemin. De cinq agrumeraies fin 2015, elles sont désormais 25 à s’y plier. Et les élus encouragent encore les vocations. Les PLU sont modifiés, du foncier est libéré et des aides sont proposées aux candidats agrumiculteurs. « Nous étions à 40 t de production labellisée en 2018 mais il y a un potentiel de 80 à 120 t sur l’aire géographique », explique le maire LR Jean Claude Guibal.