Deux Cannois, fausses victimes des attentats de Paris, à nouveau condamnés pour celui de Nice
JUSTICE•Ils ont écopé de quatre et six ans de prison ferme, après deux premières peines déjà lourdes…Fabien Binacchi
L'essentiel
- Après les attentats de Paris, ils avaient déjà obtenu 60.000 € du fonds de garantie
- La localisation de leurs téléphones a prouvé qu'ils ne se trouvaient ni à Paris ni à Nice
Leur comportement, « inexcusable et que rien ne peut expliquer » selon la procureure, leur a valu une nouvelle lourde peine. Fausses victimes des attentats de Paris déjà condamnés à trois et six ans de prison, Vera Vasic et Sasa Damjanovic, deux Cannois de 29 et 36 ans, ont à nouveau écopé mercredi d’emprisonnement ferme pour avoir tenté de renouveler leur plan après l’ attaque de Nice.
Quatre années pour elle et encore six pour lui. En plus, le tribunal correctionnel de Grasse les a condamnés à une interdiction de séjour dans les Alpes-Maritimes pendant cinq ans. Et à verser chacun 1 euro de dommages et intérêts au Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme (FGTI), qu’ils ont essayé une nouvelle fois d’escroquer.
Direction l’hôpital de Nice pour se faire passer pour des blessés
Le soir de l’attentat de la promenade des Anglais, le couple avait déjà perçu 60.000 euros du FTGI, à qui ils avaient réussi à faire croire qu’ils se trouvaient au stade de France le 13 novembre 2015. Mais ils en voulaient vraisemblablement plus.
« Le 14 juillet 2016, alors que vous êtes avec trois autres personnes en vacances avec vous à Cannes, vous êtes informés de ce qu’il est en train de se passer à Nice. Et vous décidez de sauter dans vos voitures pour vous rendre à l’hôpital Pasteur, engorgé par les vraies victimes. Tout ça pour raconter que vous avez été blessés dans le mouvement de foule dans le but d’obtenir une nouvelle indemnisation, relate le président du tribunal Marc Joando. Plus tard, vous décrirez même aux enquêteurs : "on a vu passer le camion, on a entendu les coups de feu, on a été piétiné". »
Les téléphones portables ont parlé
Cette deuxième demande auprès du FGTI paraît rapidement incongrue. Une enquête est déclenchée. Et leurs téléphones, localisés à Cannes au moment des deux attentats, finissent par les trahir. « Ils sont allés encombrer les urgences, les services d’enquête, et finalement toute la chaîne de l’aide aux victimes, alors qu’il y avait 86 morts encore tièdes sur la promenade des Anglais. Ces gens ont détourné le système de la solidarité nationale », a jugé Me Roland Rodriguez, l’avocat du fonds, qui s’est constitué partie civile.
« J’ai vraiment honte de ce qu’on a fait », a dit Sasa Damjanovic. « Je veux m’excuser auprès des victimes », a lâché de son côté Vera Vasic, en pleurs.
Les parents de deux jeunes enfants, qui vivaient en grande partie de prestations sociales, ont tenté d’expliquer qu’ils avaient imaginé cette escroquerie - sans complètement avoir conscience de sa portée morale - pour payer des loyers en retard et des emprunts qu’ils auraient contractés et pour lesquels ils auraient même reçu des menaces de mort. Dont le tribunal ne « trouve pas trace ». « Ils n’ont jamais déposé plainte », explique le président. « La peur domine parfois la raison », rétorque Me Jean-Pierre Andreani, l’avocat de la défense.
L’indemnité a disparu
Les 60.000 euros obtenus n’ont cependant pas servi à rembourser les impayés à leur propriétaire à hauteur de 14.000 euros. Mais alors à quoi a servi l’indemnité qui a depuis disparu ? Et à quoi auraient pu servir les sommes qu’ils allaient chercher après l’attentat de Nice ? « La vérité, c’est que cet argent n’était destiné qu’à vos propres intérêts », a soutenu la procureure Valérie Tallone, que les remords exprimés depuis le box n’ont guère convaincue.
Elle a requis cinq ans de prison pour la femme, et six ans pour son conjoint. « Vos comportements ne peuvent pas être excusés. Il n’est pas compréhensible de se faire passer pour des victimes d’actes aussi odieux », a-t-elle déclaré.