la folle histoire du curé nantais

la folle histoire du curé nantais

Jean Tessier Il célèbre sa dernière messe pour les « morts de la rue »
Guillaume Frouin

Guillaume Frouin

Samedi matin, à la chapelle de l'Hôtel-Dieu, Jean Tessier célébrera sa dernière messe en mémoire des « morts de la rue ». Douze sans-abri, morts cette année encore à Nantes, dans l'indifférence générale. Le curé de 83 ans va en effet quitter en décembre « Fraternité – L'Ecoute de la rue », l'association qu'il a créée en 1995. Surnommé « l'abbé Pierre nantais », il va néanmoins continuer à consacrer son existence – qui fait l'objet d'un livre en préparation – aux plus démunis. Né lui-même dans une famille modeste de Saint-Etienne-de-Montluc, il a en effet toujours appliqué les préceptes du fondateur de l'institut où il a effectué son noviciat. « Ne travaillez pas à grandir, mais à vous rapetisser de telle sorte à devenir l'égal des pauvres », disait ce dernier. « Vous devez être, vivre et mourir avec eux. »

Quatre ans dans une roulotte de Gitan
Jean Tessier a donc débuté sa carrière à la fin des années 1950 dans les quartiers ouvriers de Saint-Nazaire, encore dévastés par les bombardements des Alliés. « A Penhoët et Certé, la pratique religieuse avoisinait les 0 % », se rappelle le prêtre. « Il y avait là-bas une forte influence marxiste, et l'Eglise s'était insuffisamment préparée à la montée de cette mentalité ouvrière. » Malgré cela, faute d'avoir pu acheter « la baraque la plus minable de Certé », Jean Tessier va donc vivre pendant quatre ans « dans une roulotte de Gitan » plutôt qu'au presbytère.
C'est là qu'il va tisser des liens d'amitié avec des immigrés algériens, qui l'amèneront à partir dix ans pour Guelma (Algérie). Le curé catholique s'y occupera, pendant dix ans, de la scolarisation de jeunes musulmans de 15 à 17 ans. A son retour à Nantes, fidèle aux préceptes de son mentor, Jean Tessier se met alors en quête d'un « taudis », qu'il trouvera finalement rue Richebourg. Il y vivra dix ans, là encore, au milieu des immigrés maghrébins et de « Français malheureux ». De cette époque, il a gardé sa petite table en Formica.

Aumônier de prison pendant vingt ans
En quête d'un emploi, comme n'importe quel démuni, le curé va ensuite prendre en charge l'accueil des SDF à « l'asile de nuit » du quartier des Hauts-Pavés. « J'étais heureux, car je vivais avec les gens qui étaient au dernier barreau de l'échelle sociale », se souvient-il aujourd'hui. L'homme deviendra ensuite aumônier en prison, où il restera vingt ans. Ce n'est qu'après que l'homme fondera « Fraternité – L'Ecoute de la rue », puis le Collectif d'action pour les sans-abri (CASA), où il défend depuis la cause des SDF. « Jésus a lui-même été SDF », justifie le curé. « Quand il diffusait son message, il dormait dans les jardins ou chez des amis. »