Aéroport de Nantes : Ils attendent avec impatience l’interdiction des vols de nuit
AVIATION•Le couvre-feu tant attendu par les habitants sera mis en place ce vendredi à l’aéroport de Nantes. Les atterrissages et décollages seront interdits de minuit à 6 heures du matinFrédéric Brenon
L'essentiel
- Afin de lutter contre les nuisances sonores, les avions n’auront plus le droit d’atterrir ou de décoller de l’aéroport Nantes Atlantique entre minuit et 6 heures.
- Les avions classés parmi les plus bruyants seront même interdits dès 22 heures.
- Les habitants les plus exposés au bruit sont impatients.
Plus que quelques heures de patience avant d’espérer pouvoir goûter à « un sommeil enfin réparateur ». A Saint-Aignan-de-Grand-Lieu, l’une des deux communes voisines de l’aéroport Nantes-Atlantique, ce vendredi 8 avril est attendu avec enthousiasme. C’est en effet ce jour-là qu’entre officiellement en vigueur le couvre-feu aéroportuaire. Concrètement, afin de limiter les nuisances sonores, les vols de nuit (décollages et atterrissages) seront interdits de minuit à 6 heures du matin. « Seule une compagnie qui aura des besoins imprévus, indépendants de sa volonté, pourra voler », précisait en septembre Yoann Le Corte, chef de projet pour la Direction générale de l’aviation civile (DGAC). En cas d’infraction constatée, l’opérateur s’expose à une amende pouvant grimper jusqu’à 40.000 euros.
La mesure, réclamée de longue date par les riverains et maires des communes les plus exposées au bruit, sera renforcée d’une interdiction faite aux avions les plus bruyants dès 22 heures. « Ça va être un gros progrès, prédit Jean-Michel, habitant du centre bourg de Saint-Aignan. Les avions, actuellement, on les entend jusqu’à minuit. Et ils nous réveillent parfois dès 5h30 du matin. » « C’est de pire en pire, estime Danielle, au centre commercial de la commune. On s’était habitué à avoir moins de bruit depuis le début du Covid. Mais depuis quelques mois ça revient à fond. » « J’ai hâte, confirme Emeline, jeune mère de famille. Quand un enfant se réveille à 5 heures à cause d’un atterrissage, ça chamboule toute la famille. »
« On sera extrêmement vigilants »
Le Coceta, collectif d’habitants exposés aux nuisances aériennes, se félicite d’un couvre-feu « arraché au forceps » face aux compagnies aériennes et élus craignant pour l’attractivité de la métropole. Mais il ne crie pas victoire pour autant. « On aurait voulu que l’interdiction soit plus ambitieuse et s’étende jusqu’à 7 heures du matin. Dormir de 6 heures à 7 heures, ce n’est pas du luxe. Mais il y a eu une grosse résistance des compagnies », souligne Paolo Ferreira, président du Coceta.
Il insiste également sur le flou entourant d’éventuelles exceptions. « Les grandes compagnies low cost ont des avions basés à Nantes. Seront-elles autorisées à atterrir de nuit pour qu’ils retrouvent leur base ? Le texte n’est pas clair sur ce point. »
Sollicitée, l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) dit à peu près la même chose. Elle a d’ailleurs rendu un avis défavorable au projet, considérant la définition des exceptions « imprécise juridiquement », au risque que les compagnies aériennes s’octroient quelques libertés.
L’autorité pointe également du doigt le mode de calcul des avions les plus bruyants, l’État ayant retenu la méthode de la « marge acoustique » jugée moins contraignante pour les compagnies que la méthode du « bruit certifié réel ». « On sera extrêmement vigilants ces prochaines semaines », prévient d’ores et déjà le Coceta. En 2019, juste avant la crise sanitaire, une dizaine de vols nocturnes étaient recensés par jour.
Des prévisions de trafic « inquiétantes »
Plus globalement, le collectif s’inquiète des prévisions de croissance du trafic, lesquelles tablent sur 11 millions de voyageurs à l’horizon 2040 contre 7,2 millions en 2019. « Plus on va augmenter le trafic, plus les opérateurs vont concentrer des vols aux limites d’interdiction, entre 21 heures et 22 heures, ou après 6 heures du matin. Le bruit pourrait devenir infernal à ces tranches horaires », craint Paolo Ferreira. Jean-Michel, qui habite à Saint-Aignan-de-Grand-Lieu, n’est pas serein non plus. « J’espère que nous n’aurons pas un embouteillage de vols en fin et début de journées. Notamment le dimanche matin », s’inquiète-t-il.
En 2023, le couvre-feu devrait s’accompagner d’autres mesures destinées à tenter de réduire l’exposition sonore des habitants : un allongement de la piste de 400 m au sud pour favoriser les riverains du nord, ainsi qu’une nouvelle approche d’atterrissage (avec guidage ILS) au-dessus de Nantes, couplée à l’approche désaxée actuelle.
Pour rappel, l’aéroport Nantes-Atlantique a la particularité d’avoir sa piste orientée dans l’axe du centre-ville de Nantes et d’en être relativement proche (8 km). Le projet de transfert, déclaré d’utilité publique en 2008, avait été abandonné en 2018.