REPORTAGEJuigné-des-Moutiers est la plus petite commune de Loire-Atlantique

Loire-Atlantique : À la rencontre des 341 habitants de Juigné-des-Moutiers, la plus petite commune du département

REPORTAGEA contre-courant de l’explosion démographique en Loire-Atlantique, un village de 341 irréductibles résiste encore et toujours. Reportage au cœur de Juigné-des-Moutiers, où habitants, maire et directrice d’école vantent leur campagne
Pierre-Alexandre Aubry

Pierre-Alexandre Aubry

L'essentiel

  • Tandis que la Loire-Atlantique gagne des habitants chaque année, la commune de Juigné-des-Moutiers compte moins d’habitants qu’au début des années 80.
  • Le village est celui qui compte le moins d’habitants en Loire-Atlantique.
  • Malgré tout, les habitants se plaisent ici et vantent leur campagne.

La démographie continue de grimper en Loire-Atlantique. Le département attire et la population augmente d’environ 1,2 % en moyenne chaque année. Sa croissance démographique est même la troisième plus forte en France, derrière la Gironde et la Haute-Garonne. Aux antipodes de ce phénomène, la commune de Juigné-des-Moutiers plafonne à 341 habitants selon les dernières données Insee du 1er janvier 2021. Un chiffre qui en fait la ville la moins peuplée de Loire-Atlantique.

Dans ce village situé au nord du département, non loin de Châteaubriant et du Maine-et-Loire, les champs et la forêt occupent la majorité du paysage. « C’est vrai que ça ne bouge pas beaucoup. Le village perd même quelques habitants. Mais on est tranquille ici, j’aime mieux être en campagne », explique Michel, 71 ans. Installé à Juigné-des-Moutiers depuis 1975, il a longtemps travaillé au sein de l’entreprise de travaux publics Hervé TP, dont le siège est installé à l’entrée du village. Une société familiale qui fait vivre en grande partie la commune ligérienne. « Beaucoup d’habitants ont travaillé ou travaillent dans cette entreprise. Il y a du boulot dans le coin, ce n’est pas le problème », indique Brigitte Maison, maire de Juigné.

Stéphanie Bruneau est directrice de l'école Notre-Dame de Lourdes depuis 2010.
Stéphanie Bruneau est directrice de l'école Notre-Dame de Lourdes depuis 2010.  - P-A. Aubry/20 Minutes

« Ça va pas ! C’est le trou du cul du monde ! »

Une fonction d’édile que cette médecin retraitée occupe depuis 2020. Ici, les affaires courantes du maire sont bien différentes, et demandent un engagement particulier. « Quand on est une petite commune comme la nôtre, on a peu de personnel communal. Si quelqu’un ne peut pas assurer le périscolaire, c’est moi qui m’en charge. Avec le Covid, c’est fréquent. Je me suis retrouvée à travailler à la cantine », raconte Brigitte Maison. « C’est sûr que ce n’est pas comme pour Johanna Rolland [maire de Nantes], il faut être disponible pour parer à tout ».

Car malgré sa faible population, le village dispose d’une école privée. Avec une moyenne de 32 élèves par an, l’école primaire accueille deux classes comprenant quatre niveaux chacune. Une toute petite école, donc. Mais un lieu de vie. Et c’est ce qui fait sa force selon sa directrice, Stéphanie Bruneau, qui travaille au côté d’une autre institutrice : « C’est ce qui me convient. Ici, les habitants parlent le même langage. J’ai créé des liens avec les parents. Quand j’ai voulu travailler ici, on me disait : "Ça va pas ! C’est le trou du cul du monde !" D’accord, mais la qualité de travail est sans commune mesure ». Un côté familial dans le village qui, même s’il peut avoir des inconvénients, « facilite les choses » selon elle. « D’ailleurs, je n’ai jamais de pleurs à la rentrée ici. Car c’est un microcosme ».

La mairie de Juigné-des-Moutiers.
La mairie de Juigné-des-Moutiers.  - P-A. Aubry/20 Minutes

Fusionner ? Pas question !

Le long de la rue de la Mairie où se trouve l’école, quelques bâtiments récents sont visibles, tout près des deux seuls lotissements du village. Une bibliothèque est ouverte quelques heures par semaine. La nouvelle salle communale longe l’école, et des jeux ont été construits en face de l’établissement scolaire. En revanche, le petit centre bourg est bien vide. Pas de service : ni bureau de poste, ni pharmacie ou distributeur automatique de billets. Plus aucun commerce n’est ouvert depuis 2020 et la fermeture du dépôt de pain. L’ouverture d’un commerce multi-services est devenue le projet n° 1 de la mandature. « Il manque une boulangerie. Dans ma jeunesse, il y avait trois cafés dans le bourg », regrette un habitant. La voiture est donc un bien prioritaire pour les Juignéens, qui vont généralement faire leurs courses à Pouancé ou Châteaubriant.

Dans le petit bourg, plus aucun commerce n'est ouvert.
Dans le petit bourg, plus aucun commerce n'est ouvert.  - P-A. Aubry/20 Minutes

Alors pourquoi ne pas fusionner avec d’autres communes du coin, comme le font de plus en plus de municipalités ? Une hypothèse repoussée par la majorité des habitants. « On veut rester indépendants, on veut garder notre identité », rétorque le maire de cette commune qui a la particularité d’avoir placé Marine Le Pen en tête des suffrages lors des élections présidentielles 2012 et 2017. Comme fiers de vivre dans la plus petite commune de Loire-Atlantique, les habitants de Juigné-des-Moutiers revendiquent la campagne. Pas question de grossir. Juigné, c’est leur village, et ils y tiennent.

« On ne manque pas de place, toutes les maisons ont un grand jardin », lance Michel, qui habite l’un des deux lotissements. Le maire conclut : « Les habitants respirent ici, loin de la pollution ». Dans un département où la plupart des villes ne cessent de grandir, cherchant sans cesse de nouveaux terrains à bâtir, le village ligérien se pose comme un symbole de ruralité.