TRANSPORTSDépassés par l'insécurité, les agents de la TAN suggèrent des solutions

Nantes: Dépassés par les agressions, les agents de la TAN suggèrent des solutions

TRANSPORTSLes transports en commun nantais sont à l'arrêt ce mercredi à la suite d'une nouvelle agression d'un conducteur
Frédéric Brenon

Frédéric Brenon

L'essentiel

  • Un conducteur a été attaqué par plusieurs personnes mardi soir sur la ligne 3 de tramway de Nantes.
  • Solidaires et excédés par la récurrence des agressions, les agents de la TAN ont cessé le travail.
  • Ils suggèrent différentes mesures afin d’entrevoir une amélioration.

Le passage à tabac d’un conducteur de tram mardi soir sur la ligne 3 à Nantes a été « l’agression de trop ». L’ensemble du personnel de la Semitan, encouragé par la direction, a cessé le travail ce mercredi. Malgré la grogne de certains usagers, « il n’y avait pas d’autre choix », estime Gabriel Magner, délégué CFDT. « On dénonce des problèmes d’insécurité depuis plusieurs années à Nantes, ça ne peut plus durer », insiste le syndicaliste. Les témoignages du terrain vont dans le même sens.

Agent de prévention expérimenté, Malik* considère que la situation nantaise est devenue « catastrophique ». « La police est dépassée. Il y a plein de collègues qui ne veulent plus travailler la nuit. Je les comprends. Moi-même, je déconseille à ma famille de prendre les transports en commun le soir. » Conducteur depuis trois ans à la TAN, Jimmy* dit avoir assisté à une dizaine d’agressions. La dernière pas plus tard que le soir d’Halloween lorsqu’un client énervé l’a pris à partie et menacé de mort dans un bus.

« Il avait la haine contre moi alors que je sermonnais calmement un autre client, raconte-il, encore choqué. Le degré de violence a passé un cap. Ça va de l’incivilité banale à l’agression directe parce que notre tête ne revient pas ou parce que la ligne a un problème. On prend le volant la peur au bide. » « Ça s’est clairement dégradé, abonde Manu, depuis 11 ans à la Tan. Les agresseurs n’ont plus de profil type, plus de limites. Et on se sent souvent démunis. »

Deux agents par véhicule? Davantage de policiers?

Quelles solutions envisager dans ce contexte ? Une demande revient avec insistance au sein du personnel : augmenter les effectifs de l’entreprise. « Il faudrait deux agents dans la plupart des véhicules. Quand on est deux, le dialogue avec la clientèle est plus efficace et, surtout, ça change le rapport de force. Le conducteur ne serait plus une cible facile », considère Jimmy. « Recruter pour avoir davantage de présence humaine, ça doit être la priorité, même si ça coûte cher », est également convaincu Bertrand*.

Jimmy suggère aussi de renforcer la formation du personnel. « Savoir gérer un conflit, choisir la bonne attitude en fonction des situations, ça s’apprend. Et ça s’entretient. » « Certains collègues sont envoyés au contact de la clientèle par défaut, déplore Bertrand. C’est un poste où, au contraire, on a besoin d’expérience. »

Comme d’autres, Malik pense que l’amélioration de la situation passera principalement par un renforcement des moyens de la police nationale, notamment à Commerce où c’est « devenu très très chaud ». « Une présence systématique du milieu d’après-midi jusqu’à la fin du service de nuit, ça changerait beaucoup de choses », est-il persuadé. « Très souvent, quand on appelle la police, elle ne se déplace même pas faute d’effectifs », s’étonne Manu.

Des travaux d’intérêt général

La proposition d’une police métropolitaine des transports (32 agents municipaux), après les élections municipales, est accueillie positivement, même si certains conducteurs en poste doutent qu’elle « ait véritablement les moyens d’intervenir ». « C’est malheureux mais, pour que ça marche, il faut inspirer une certaine crainte », estime Bertrand.



Gabriel Magner, de la CFDT, évoque de nouvelles formes de réponses pénales. « La réponse judiciaire est inadaptée avec des prisons surchargées, les mineurs qui sont relâchés. On peut trouver d’autres solutions. Comme des travaux d’intérêt général par exemple. On a plein de véhicules et de rails à nettoyer. Il faut réfléchir à ça. » Manu se montre davantage fataliste. « On est face à un problème de société profond. On ne changera rien du jour au lendemain. »

* Les prénoms ont été modifiés