Municipales 2020 à Paris : « Les électeurs populaires n’attendent rien de la gauche », selon Lutte ouvrière
POLITIQUE•La formation trotskiste considère avant tout le scrutin municipal comme l’occasion de batailler contre les politiques gouvernementalesGuillaume Novello
L'essentiel
- Comme à chaque élection, Lutte ouvrière repart au combat avec Laurent Vinciguerra comme tête de liste à Paris.
- Pour la formation trotskiste, l’élection municipale est surtout un prolongement des luttes sociales.
- Laurent Vinciguerra y voit l’occasion de poursuivre « le combat des travailleurs face aux politiques menées par le gouvernement au service du patronat ».
«La municipalité ne peut être l’instrument de la transformation sociale. » Le tract annonce la couleur, elle sera rouge. Loin des annonces fantasmatiques de certains candidats, Lutte ouvrière ne promet que la froide réalité des luttes sociales et ne se fait pas d’illusions. « La municipalité, même la mieux intentionnée, ne pourra pas corriger les effets de la crise, des bas salaires, du chômage », assène Laurent Vinciguerra, tête de liste LO à Paris et candidat dans le 14e. Mais alors pourquoi la formation trotskiste présente-t-elle des listes dans treize arrondissements sur dix-sept à Paris, et dans dix-huit communes sur 41 en Seine-Saint-Denis ?
« On participe aux élections municipales parce qu’on tient, comme dans les autres élections en fait, à y défendre un drapeau, un courant d’idées qui représente le combat des travailleurs face aux politiques menées par le gouvernement au service du patronat », explique le candidat d’extrême gauche, chauffeur de bus dans le civil. Il estime que le scrutin municipal peut « servir de prolongement de la lutte » : « On va combattre dans les élections les mêmes qu’on combat dans la grève, on va se confronter à nos ennemis de la classe capitaliste. »
Jean Hentzgen, historien et auteur d’une thèse récente sur le trotskisme, voit davantage dans ces candidatures « une raison de vivre ». « Ils ont des militants très sérieux, très efficaces, très organisés et il faut bien en faire quelque chose », analyse-t-il.
Mettre la municipalité au service des luttes
L’élection municipale n’étant qu’une des formes de lutte, Lutte ouvrière n’envisage pas cette échéance comme les autres grands partis. « Au niveau municipal, bien sûr qu’on a nos idées, affirme Laurent Vinciguerra. Si on avait des élus, on s’en servirait pour soutenir les luttes de la population laborieuse et on mettrait la municipalité au service de ces luttes. » Forcément on est loin de la polémique sur les voies sur berges.
Sur le terrain, les militants LO collent des affiches, distribuent des tracts, engagent des discussions. Le 7 mars, un meeting Paris-Ile-de-France s’est tenu à la Mutualité, « il y avait un peu plus de mille de personnes avec les porte-paroles, Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier », détaille le candidat dans le 14e. Le démarchage se fait aussi dans les entreprises, où historiquement Lutte ouvrière a toujours cherché à être présente. « Je fais savoir à mes camarades de travail que je suis candidat et pourquoi LO se présente et pourquoi les travailleurs doivent voter pour eux-mêmes », raconte Laurent Vinciguerra.
Pas de compromission avec la gauche de gouvernement
Non convié aux deux débats télévisés sur les municipales, le militant trotskiste s’offusque : « Avoir les moyens de défendre un programme et une candidature vis-à-vis de la population, ça passe par un accès aux grands médias. Or quand les grands médias ferment cet accès, on peut toujours dire “les élections, la démocratie”, c’est un leurre. »
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A l’issue du premier tour, « notre objectif n’est pas de nous allier pour à tout prix avoir des élus, on préfère ne pas compliquer notre message politique », assume le candidat. En tout cas, pas question de se rallier avec la gauche de gouvernement, « dans les bagages de Hollande, c’était Valls et Macron, et on voit où ça a mené ». De toute façon, « les électeurs populaires n’attendent rien de ces forces de la gauche ».
Même s’il n’avait rassemblé que 0,66 % des voix au premier tour en 2014, déjà dans le 14e arrondissement, Laurent Vinciguerra n’éprouve aucune « lassitude ». « Effectivement LO n’est pas le grand parti ouvrier qui serait nécessaire au monde du travail mais il y a quand même une certaine implantation et un électorat assez régulier », relève-t-il. « Il y a une capacité à se maintenir à long terme qui est surprenante, observe Jean Hentzgen. Mais les écrits de Trotski des années 1920 et 1930, c’est du solide, il y a une pertinence intellectuelle. » Armés idéologiquement, les militants de LO poursuivent la lutte, en espérant un jour meilleur.